Denis Bogros : Histoire du cheval de troupe de la cavalerie française : 1515-1918. (9)
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CHAPITRE IX

LE BARBE, CHEVAL DU MAGHREB ET DE LA CAVALERIE FRANCAISE D'AFRIQUE.

USKUB : LA PLUS BELLE VICTOIRE

Dans les chapitres précédents nous avons déjà parlé du cheval barbe, le meilleur cheval de cavalerie légère, découvert par les cavaliers français sur la rive sud de la Méditerranée, après plusieurs siècles de recherche du bon cheval.

Le barbe

Ce cheval était connu, il avait déjà servi dans les écuries des Rois de France, et dans les haras d'élevage anglais et français.

Dès 1550, à Venise, écrit en italien, paraît un livre intitulé : Della Navigationi.e.Viaggi contenant un chapitre : La description de l'Afrique (1). Il y parle des chevaux barbes : "ces chevaux sont appelés en Italie : Barberi, et il ne est ainsi dans toute l'Europe parce qu'ils viennent de la "barbaria". Ils sont d'une espèce née dans le pays...". Ce pays c'est l'Afrique du nord, appelée le "Maghreb" (l'occident) par les cartographes arabes du Xème siècle et la "Barbaria" selon les cartographes européens du même siècle.

On se souvient que le roi Louis XIV (voir l'arrêt de 1665, "le roi étant présent" (sic)) fit importé des étalons de la Barbaria pour ses provinces de Xaintonge et d'Auvergne.

Mais ce cheval étalon était rare en notre pays, et inconnu dans les troupes à cheval.

Or, les jeunes officiers, de la cavalerie vaincue en Russie en 1812 par les Cosaques :

- se firent les apôtres d'une idée simple : il faut remonter la cavalerie de chevaux sobres, agiles et endurants (de Brack) (op. cit.)

- Mais où les trouver ?

- Comment les produire en quantités suffisantes (des centaines et des centaines) et à un prix convenable. La réponse ne fut pas trouvée en France, nous l'avons dit dans les chapitres qui précèdent.

Les hasards de la politique ont apporté la solution. Pour des raisons obscures le gouvernement français envoya un petit corps expéditionnaire prendre Alger sur la rive Sud de la Méditerranée en juillet 1830. Ainsi notre pays malgré ses nombreux changements de régimes à l'intérieur, poursuivra à l'extérieur la conquête de l'arrière-pays d'Alger... Conquête difficile, jusqu'au Sahara, jusqu'à Tunis, jusqu'à Rabat.

Cette conquête durera des décennies, presque un siècle ! Elle donnera à la cavalerie française son meilleur cheval de guerre de troupe.

Faisons plus ample connaissance avec ces chevaux (2) déjà rencontrés sous le nom de Barbes, qui en réalité sont les chevaux du Maghreb.

Elevés par les tribus bédouines (de la badiya) et montagnardes (berbères) depuis la Lybie jusqu'au Maroc, par la Tunisie et l'Algérie, ces chevaux constituent une population équine très originale, mais qui se différencie selon les régions d'élevage. Ces variations sont engendrées par la géographie, la climatologie, les reliefs, bref, les biotopes nombreux dans une aussi vaste région : celle de l'Afrique du Nord du Sahara, le plus grand désert du monde.

Cependant qu'ils soient des Atlas ou des hauts plateaux steppiques, ils sont toujours : agiles, dociles, résistants aux variations climatiques (sirocco, ou neige), sobres et endurants à la fatigue.

Décrivons ce cheval : il est médioligne, il pèse quatre cents kilos au maximum ; il est carré ; d'une taille de 1 mètre 50 centimètres environ ; il possède de ce fait un très bon équilibre. Aussi est-il capable, sous le cavalier de grimper dans les sentiers de chèvres, et de galoper au milieu des rochers et des touffes d'alfa ! Avec un dos tendu, c'est un porteur remarquable. Il part en campagne portant plus de 130 kg facilement. Son cavalier et son harnachement avec paquetage et équipements divers : les armes, trois jours de vivres, trois jours de fourrages / grains, trois jours de munitions. Car il est énergique et sobre. On marchera de longs jours avec au quotidien : trois kilos d'orge, quinze à vingt litres d'eau seulement. Il peut ainsi soutenir des étapes de 40 km sous le soleil ou dans la neige pendant des semaines, avec ses sabots durs, il ne perd pas de fers. En campagne on utilise essentiellement l'allure du pas. Mais il est toujours prêt à partir au galop pour l'attaque et la manoeuvre rapide sur l'objectif.

Après dix sept années de rudes conquêtes qui ont épuisé le pays il était nécessaire, la paix ayant été établie : "(d') accroître et améliorer les ressources de l'Algérie en chevaux". C'est le titre du rapport du général Oudinot (3), inspecteur de la Cavalerie, adressé au ministre de la guerre à Paris. Après une tournée d'inspection dans les provinces d'Oran, d'Alger, et de Constantine, ce rapport est signé de Bône (Annaba) le 20 août 1847.

Le roi abdiqua le 24 février 1848 car la République avait été proclamée le 22. La conquête de l'Algérie se poursuivait cependant avec ses problèmes. Loin de Paris et de ses putschs, les soldats français poursuivaient l'oeuvre de la France.

Sur le terrain, les Lamoricière à Oran, les Randon à Bône, les Bugeaud (4) à Alger (commandant en chef et gouverneur) avaient jeté les bases d'un système de production de chevaux de guerre par les indigènes des montagnes et des steppes prédésertiques. Ce secteur ayant une économie rurale traditionnelle, il fallait adapter le système des haras militaires à ce contexte géo, socio, économique.

Ce sera le maréchal Randon qui achèvera la conquête de l'Algérie, et organisera les haras militaires, en même temps que les bureaux arabes et les smalas de spahis.

Mais, il fallait d'abord obtenir le feu vert des groupes politico-agricoles tout puissants à Paris. On a vu dans les chapitres précédents comment en 1848 le général Randon, profita du rapport Oudinot qui avait fait du bruit (voir note 3). Il se fit désigner comme membre de la commission Achille Fould. Et là, il réussit à emporter l'adhésion des éleveurs de métropole !!!

Devenu homme de confiance de l'Empereur Napoléon III, il mit en oeuvre en l'élargissant, le dernier alinéa du rapport Fould, qui devint la loi en cette période troublée (5)... C'est en s'appuyant sur ce texte qu'il organisa les haras militaires de l'Algérie, pour lesquels il fit importer des étalons de pur sang arabe... qui furent répartis dans toutes les stations de monte du territoire. Ils apparaissent dans les comptes-rendus annuels d'élevage sous la dénomination : Syriens (voir Aurreggio op. cit.).

C'est grâce à cette politique d'élevage que la Cavalerie française d'Afrique put se remonter du meilleur cheval de guerre de troupe.

Ce cheval brilla particulièrement en 1870 au milieu des désastres de la guerre Franco-allemande ; mais c'est surtout lors du premier conflit mondial de 1914-1918, en Orient, sur le front de Macédoine qu'il apportera la preuve de ses qualités exceptionnelles.

C'est avec lui, et par lui, que la Cavalerie française aura sa dernière et sa plus belle victoire.

Uskub (Skopljé -Macédoine - Septembre 1918)

La grande guerre dura quatre ans. Années de morts et de souffrances ; le peuple français a payé plus que les autres, en Europe, pour la liberté ! En 1918, comme en 1870, c'est la Cavalerie d'Afrique et son cheval "l'arabe barbe" qui sauvèrent l'honneur des troupes à cheval. Troupes dont c'était la dernière participation à une guerre européenne, à un niveau significatif.

Elle offrit à la France la dernière victoire de la guerre : Uskub ; le 29 septembre 1918. Ce fut la plus belle (car avec capitulation de l'ennemi). Cette cavalerie légère avait le meilleur cheval de selle de guerre de troupe. Elle avait de bons généraux : le commandant en chef (né à Mostaganen) (Algérie). Franchet d'Espérey, vainqueur à la Marne (1914) avec la Vème armée, et le général de Brigade Jouinot-Gambetta (6). Nous sommes en plein dans notre sujet. Après la rupture du front Germano-Bulgare par l'infanterie à Dropopoljé, la brigade de cavalerie d'Afrique est lancée sur les arrières ennemis, le 21 septembre au soir, par le général en chef. Elle est composée des 1er et 4ème de chasseurs d'Afrique et du régiment de marche des spahis marocains : 2 000 chevaux barbes de troupe ! Objectif USKUB, noeud ferroviaire derrière le front. Sans laisser un traînard, la brigade atteindra le Danube où l'arrêtera l'Armistice générale, moins de 50 jours plus tard. Mais l'incroyable fut, les 26-27-28 septembre 1918, le raid, par des sentiers de chèvres, de ces 2 000 chevaux à travers les montagnes de Macédoine, culminant à 2 000 mètres. Par ce chef d'oeuvre de manoeuvre d'infiltrations sur les arrières, cette cavalerie légère investit et prit "Uskub" le 29 sans coup férir. La retraite de la XIème armée allemande était coupée, elle capitulera. Ce même jour (29) la Bulgarie demande l'armistice. Cette cavalerie française d'Afrique avait des chevaux fiables et performants.

Le général Jouinot-Gambetta a écrit : "Nos chevaux barbes se montrent admirables (pour grimper) la terrible pente". Dans son bulletin de victoire, le maréchal Franchet-d'Esperey a écrit : "cavaliers qui, par votre audacieuse manoeuvre, à travers un massif où d'autres que vous ne seraient jamais passés, avez, en atteignant Uskub, coupé la retraite à l'ennemi, et acculé une armée à la capitulation...".

Franchet d'Esperey avait médité sur la bataille de la Marne (Septembre 1914), victoire inachevée, faute de bons chevaux, mais aussi de bons généraux (Mac Carthy, op. cit.)... C'est pourquoi dès la rupture du front ennemi par l'infanterie à "Dropopoljé" il découpla sa Cavalerie d'Afrique sur les arrières Germano-Bulgares. Par anticipation de sa manoeuvre stratégique, il avait rassemblé et préparé cette cavalerie dans la région de "Monastir". Elle était remontée des meilleurs chevaux de troupe les arabes-barbes. Ces chevaux étaient produits au Maghreb, par le système "des remontes et établissements hippiques d'Afrique du Nord". Ce système fut un modèle de partenariat entre les éleveurs de chevaux du secteur traditionnel de l'Afrique du Nord, et le service des remontes du ministère de la guerre.

Celui-ci depuis 1848 (il avait été créé en France en 1831), avait reçu l'accord de la deuxième République pour développer et faire la promotion du cheval en Algérie.

Ce pays est le centre du berceau de la race dite "barbe". La race chevaline des steppes et atlas présahariens qui a été exportée dans le monde entier.

Les chevaux arabes-barbes furent les meilleurs chevaux de troupe de toute l'histoire de la cavalerie française, qui couvre les quatre siècles que nous venons de parcourir. Il faut dire aussi, que les cavaliers français entraînés en Algérie et les cavaliers marocains, qui participèrent à la campagne d'Orient de 1918, étaient parmi les meilleurs cavaliers guerriers que la France a engagés dans ses nombreuses campagnes.

Aristide Briand, homme d'Etat prix Nobel de la Paix, proclamera que cette bataille d'Uskub fut un chef-d'oeuvre (7).

C'était sur le front d'Orient en 1918. Pendant le même temps, les armées du front d'Occident, sous le commandement de Foch, remportèrent la victoire finale de la "Grande Guerre" en Belgique.

Elles étaient sous la dépendance directe d'un autre homme d'Etat : Georges Clémenceau, chef du gouvernement, ayant en charge la conduite de la guerre. Or, il avait décidé, dans le cadre de ses responsabilités et de la stratégie générale qui était la sienne, que le conflit devait trouver son terme en Europe occidentale.

Il en fut ainsi (8).

 
NOTES

(1)Cet auteur est connu sous le nom de : "Jean Léon l'Africain". Il s'agit d'un arabe du Maghreb "El hassan ben Mohammed el Wazzani ez Zayyati". Né à Grenade en 1489, capturé par les corsaires chrétiens, il s'installe à Rome où il enseigne l'arabe et la géographie. Revenu au Maghreb à Tunis, il se fera appeler : "yuhanna al Asad al Ghanati" ce qui veut dire "Jean le lion (léon) de Grenade".
(2)Le cheval du Maghreb - livres à consulter :
1) Le cheval barbe - Paris-Lausanne : Favre-Caracole, 1987.
2) Le cheval barbe - Paris :Maisonneuve, 1987 (?).
- Après un siècle d'influences du système des haras militaires que nous avons décrit, et qui s'appelaient "service des remontes et des établissements hippiques d'A.F.N.", on constate que le mot remonte est entré dans "l'arabe dialectal" parlé de l'est à l'ouest du Maghreb. - Le cheval arabe-barbe, élevé pour l'armée avec les étalons des dépôts de remonte et achetés par les commissions de remonte, est devenu "le cheval de la remonte".
- En arabe dialectal maghrébin "aoud larmoute". Etonnant - N'est-ce pas ? - Consulter le Dictionnaire Français-Arabe (arabe parlé marocain) de H. Mercier - Rabat : éditions La Porte, 1945, page. 208.
On lit "Haras" = "Larmud". (le "u" se prononce "ou" et le "d" se prononce "t").
(3)Oudinot de Reggio (gal), Rapport au ministre de la guerre sur la nécessité d'accroître... les ressources de l'Algérie en chevaux. Moyens proposés pour atteindre ce but. (Bône 20.08.1847) paru dans Le spectateur militaire livraisons : avril, mai 1848.
(4)Bugeaud de la Piconnerie - Maréchal duc d'Isly conquérant de l'Algérie. Il débuta sa vie de soldat comme grenadier à pied, vélite de la garde impériale à Austerlitz en 1805. Il a fait comme officier de l'infanterie (de 1808 à 1814) la terrible guerre d'Espagne contre les guerilleros espagnols et le corps expéditionnaire britannique. C'est dans cette guerre que Napoléon connut et subit sa première véritable défaite sur notre continent. La guérilla était un mode de combat auquel ni son armée, ni ses cadres, ni lui-même n'étaient préparés. C'est là-bas que Bugeaud gagna tous ses grades jusqu'à celui de colonel. Il comprit l'importance d'une Cavalerie rustique, binome indispensable de l'infanterie. C'est en Espagne que le fantassin Bugeaud conçut le système de forces des "colonnes mobiles" : infanterie, plus cavalerie légère, sans véhicules à roues... les seuls impedimenta nécessaires par portages sur animaux de bât. Quand il quitta Alger en 1848, l'Algérie des bédouins était conquise, il restait à réduire la Kabylie et ses montagnards. C'est Randon qui achèvera la conquête et organisera les bureaux arabes et le système des haras et remontes militaires.
Consultons les Oeuvres militaires du Maréchal Bugeaud, librairie Baudoin, Paris, 1883. En particulier le mémoire de 1842 intitulé "l'Algérie ? Des moyens de conserver et utiliser cette conquête". Page 307, chapitre : "Produits des contributions diverses" - Bugeaud écrit page 318 : "Il faut que la France (-) sache tirer parti de sa conquête...". Plus loin : "Voici encore quelques compensations (dédommagements... car la conquête coûtait chère)... : nous pouvons tirer de l'Algérie des moyens de force en Europe".
En effet : "Ses excellents chevaux donneraient à notre cavalerie légère une très grande supériorité sur celle des nations qui nous avoisinent. En achetant beaucoup de poulains, de trois à quatre ans, et en les préparant, soit en Algérie, soit en France pour la remonte de nos chasseurs et de nos hussards, nous nous créerons une véritable, une excellente cavalerie légère. Il n'est pas un officier de cette arme qui ne reconnaisse les immenses avantages que nos quatre régiments d'Afrique doivent aux qualités de leurs chevaux." (en 1842 : quatre régiments de chasseurs d'Afrique).
Le soldat/paysan, Bugeaud nous donne ici, en 1842, la réponse de bon sens à la querelle entre les éleveurs et les militaires français de métropole. (voir supra : le chapitre V). Mais, hélas, l'esprit de négoce l'a emporté sur l'esprit de défense nationale et la cavalerie partira à la guerre de "quatorze" avec une mauvaise remonte.
De la même façon, la France engagera la guerre de "trente neuf" sans divisions blindées... pour des raisons très semblables, l'esprit partisan remplaçant l'esprit marchand. Recurrence de l'histoire de la nation ?
(5)Dictionnaire du Second Empire édité par Arthème Fayard, 1995.
Article : "remonte" - Avec Randon qui fut deux fois ministre de la guerre (ce ministère administrait l'Algérie) et qui fut gouverneur commandant-chef en Algérie, l'Empereur Napoléon III put : "exprimer sa politique arabe dans le domaine hippique". Le maréchal Randon : "acheva la conquête et, en organisa l'administration (bureaux arabes). Il créa le service des remontes et des établissements hippiques de l'Afrique du Nord. Cette institution devait durer un siècle". (plus loin) "Charles André Julien, historien de l'Algérie a écrit : "(-) une action efficace fut entreprise pour rénover la race chevaline (-) en augmentant le nombre et l'emploi des étalons par une utilisation méthodique des dépôts de remonte et en transformant les smalas de spahis en "centres modèles d'élevage". La réussite fut totale."
(6)Jouinot-Gambetta (général de Brigade) a écrit : Uskub ou le rôle de la Cavalerie d'Afrique dans la victoire, Paris : Berger-Levrault, 1920.
Préface d'Aristide Briand - Président du Conseil du Gouvernement, ministre des affaires étrangères, Prix Nobel de la Paix 1926 (citation) : "La chevauchée de vos soldats vers Uskub est une épopée magnifique". "Les écrivains militaires trouveront... matière à discussion et des enseignements précieux sur le rôle que peut jouer, dans la guerre moderne, une cavalerie judicieusement employée..
- Homme d'état cultivé, il sait que la conduite de la guerre est de la responsabilité des politiques, mais que la conduite des opérations est de la responsabilité du commandant en chef. Il est heureux, quatre ans après, "La Marne" de dire ce que devait être le rôle d'une bonne cavalerie ! (c.a.d : bien remontée, bien entraînée, bien commandée).
(7)La manoeuvre d'Uskub.
Grâce aux généraux Franchet d'Esperey et Jouinot-Gambetta, le statège et le tacticien ; grâce aux meilleurs chevaux de guerre de troupe, qu'elle avait tant cherchés depuis François Ier ; la cavalerie française mettait à Uskub le point final à son histoire. Ce fut par la plus "achevée" des victoires.
A Uskub, un corps de cavalerie sans infanterie, sans artillerie, sans intendance, sans bagages, s'est infiltré par les "hauts" dans le dispositif ennemi. Il s'empara, sans coup férir, du centre névralgique ennemi : le noeud de ses lignes de communications, de ravitaillements, d'opérations, mettant pied à terre, les trois régiments de cavaliers tiendront trois jours avec leurs seules armes légères, en attendant les soutiens et les renforts.
Victoire d'anthologie
Le 29 septembre 1918, c'est avec la Bulgarie, le premier armistice de la guerre (si l'on excepte la capitulation russe de 1917).
Début octobre la XIème armée allemande capitulait.
Le 8 octobre les français entraient dans Sofia.
Mais, dès le 7 octobre, Georges Clémenceau a interdit à Franchet d'Esperey et à son armée d'Orient de dépasser la Serbie...
Clémenceau était le responsable suprême. C'est lui qui conduisait cette guerre. Sa stratégie générale était qu'il fallait gagner la guerre en Belgique.
L'armée d'Orient "marqua le pas" (sur ordre de Paris). Il est regrettable que "... de cette chevauchée triomphale (-) peu de chose est demeuré dans la mémoire collective des français et même dans celle des historiens", écrit Bernard Oudin (page 353) de son livre Aristide Briand, Paris : Laffont, 1987.
(8)Uskub 1918 - Garigliano 1944 - Un quart de siècle plus tard, l'armée d'Afrique remportera la célèbre victoire du Garigliano en Italie, sous les ordres du général Juin, né, aussi en Algérie, à Bône. (Franchet d'Esperey est né à Mostaganen). Ces deux victoires réalisées "par les hauts" et non par les vallées, ont d'autres points communs. En particulier, et c'est historique, l'interdiction faite par les instances politiques de conduite de la guerre, de poursuivre l'exploitation jusqu'au coeur des pays ennemis... Etonnant, n'est-ce pas ?
Le Maréchal Juin, le vainqueur, écrit le 22 avril 1952, dans la préface qu'il fait au livre du général Chambe : La bataille de Garigliano (Paris : Ditis, 1952) ce qui suit :
"Il eut enfin le mérite d'avoir clairement entrevu, après Rome, la grande erreur stratégique que les dirigeants de la guerre allaient commettre en arrêtant l'élan des deux armées victorieuses, dont les axes de marche étaient naturellement tracès vers le centre de l'Europe...". Rome a été prise par le corps expéditionnaire français du général Juin: le 4 juin 1944. Pour attendre les Soviétiques, la capitulation de l'Allemagne sera repoussée jusqu'en mai 1945 (à Reims et Berlin).
Remarque : encore une fois : similitude et récurrence historiques.


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