LEBLANC, Georgette (1869 – 1941) : Propos sur le cinéma (1919).

Saisie du texte : O. Bogros pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (24.X.2015)
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Texte établi sur un exemplaire (Bm Lisieux : nc) du Mercure de France. N°514 - T. CXXXVI, 16 novembre 1919, 30e année.
 
PROPOS SUR LE CINÉMA
par
Georgette Leblanc

~ * ~


Une question se pose souvent, à laquelle il ne nous semble point possible de répondre. Comment nos parents pouvaient-ils se passer des commodités ou des distractions qui nous sont devenues indispensables ? Comment remplissaient-ils les heures vides, ceux-là qui ne connaissaient ni les joies de la bicyclette, ni la rapidité de l'automobile, ni les péripéties du bridge, ni les plaisirs du tango, du tennis, du fox-trott ou du golf ?

A mesure que la civilisation devient plus raffinée, l'homme cherche plus d'auxiliaires contre l'ennui qui le menace. Plus se complique le mécanisme de sa pensée, plus il a peur de penser. Quand on songe aux journées interminables où le barbare restait en face de lui-même à ne rien faire ! Ne rien faire, l'homme de nos jours ne s'y résigne pas. Si agitée, si fiévreuse, si encombrée d'occupations vaines que soit sa vie, il trouve encore des instants à combler avec des occupations plus vaines encore. Faites-lui cadeau d'une distraction nouvelle, il s'arrangera pour lui donner toute la place qu'elle mérite, sans pour cela négliger une seule de celles qu'il avait adoptées.

Car il ne faut pas rester en face de soi. Voilà l'essentiel. Il ne faut pas avoir le temps de ne rien faire, le temps de rêver, ni de réfléchir, ni de regarder le spectacle de la vie, ni d'en écouter les silences impressionnants, ni d'en subir l'angoisse ou l'exaltation.

Contre tout cela, appelons à notre secours toutes les forces du dehors. Jadis on causait, on fumait, on buvait de l'alcool, on allait au café. Aujourd'hui, mêmes plaisirs, auxquels d'autres s'ajoutent, qui deviennent immédiatement aussi nécessaires.

Une question se pose souvent, à laquelle il ne nous semble point possible de répondre. Comment nos parents pouvaient-ils se passer des commodités ou des distractions qui nous sont devenues indispensables ? Comment remplissaient-ils les heures vides, ceux-là qui ne connaissaient ni les joies de la bicyclette, ni la rapidité de l'automobile, ni les péripéties du bridge, ni les plaisirs du tango, du tennis, du fox-trott ou du golf ?

A mesure que la civilisation devient plus raffinée, l'homme cherche plus d'auxiliaires contre l'ennui qui le menace. Plus se complique le mécanisme de sa pensée, plus il a peur de penser. Quand on songe aux journées interminables où le barbare restait en face de lui-même à ne rien faire ! Ne rien faire, l'homme de nos jours ne s'y résigne pas. Si agitée, si fiévreuse, si encombrée d'occupations vaines que soit sa vie, il trouve encore des instants à combler avec des occupations plus vaines encore. Faites-lui cadeau d'une distraction nouvelle, il s'arrangera pour lui donner toute la place qu'elle mérite, sans pour cela négliger une seule de celles qu'il avait adoptées.

Car il ne faut pas rester en face de soi. Voilà l'essentiel. Il ne faut pas avoir le temps de ne rien faire, le temps de rêver, ni de réfléchir, ni de regarder le spectacle de la vie, ni d'en écouter les silences impressionnants, ni d'en subir l'angoisse ou l'exaltation.

Contre tout cela, appelons à notre secours toutes les forces du dehors. Jadis on causait, on fumait, on buvait de l'alcool, on allait au café. Aujourd'hui, mêmes plaisirs, auxquels
d'autres s'ajoutent, qui deviennent immédiatement aussi nécessaires.

Imaginez la détresse de certains fervents du bridge auxquels le droit de jouer serait soudain retiré. Certes, vous avez vu, pendant la guerre, de ces gens qui, jadis, ne concevaient pas une journée sans une course ou une promenade en auto. Quel désarroi pour eux lorsque s'ouvrit l'ère des restrictions ! Avec trois heures de bridge et deux heures d'auto, on a la satisfaction d'un après-midi bien rempli. Rien à regretter. Le destin est magnifique... Et, le soir, cinéma.

Le cinéma, ressource suprême ! Dernière invention ! Inestimable présent du Destin ! Avec le cinéma, que le film soit bon ou mauvais, la salle confortable ou pitoyable, l'orchestre imposant ou réduit à l'unique piano, n'importe ! Vous êtes sauvé. La soirée est escamotée. La digestion se fera dans la béatitude, et vous atteindrez à votre insu les bonnes heures nocturnes où l'on est enfin préservé contre l'inutile pensée, les heures où l'on dort.

Le jour suivant, ou la semaine suivante, on recommence. La tentation est trop forte. Comment résister ? C'est là, tout près, au bout de la rue. Pas de toilette à faire : « On y va comme on est. » La dépense est minime. Quoi qu'il, arrive on ne regrettera pas son argent.

Et l'on y va. Oh ! sans grand enthousiasme. La plupart du temps on ignore le programme du spectacle. Sauf en de très rares occasions, rien de spécial ne nous attire, pas la moindre curiosité d'art ou d'intelligence, pas même l'espoir de sensations violentes ou la perspective du fou rire. Rien. En réalité, on ne quitte pas sa maison pour aller au cinéma, on va au cinéma pour quitter sa maison.

On y va par lâcheté, et par lâcheté on y reste. Au théâtre, si la pièce est mauvaise, vous sifflez ou vous vous retirez. Avez-Vous jamais vu quelqu'un manifester son irritation au cinéma, ou s'en aller parce que le film dépasse les bornes de l'absurde et de la bêtise ? On se cramponne jusqu'au bout. On espère jusqu'à la dernière minute.

Espère-t-on même ? Non. On se résigne. On accepte. « Dieu que c'est idiot ! » Et l'on sourit avec complaisance. On reste obstinément.

Et l'on y retourne même ! On y retourne cent fois encore ! Et cependant, vous qui succombez à la tentation, vous êtes un artiste, un homme cultivé, tout au moins un brave bourgeois qui a du goût, ou bien un ouvrier qui choisit son plaisir et l'apprécie à sa juste valeur.

Alors ne devons-nous pas admettre qu'il y a, tout de même, sur l'écran, autre chose que ce que l'on y voit au premier coup d'œil ? et dans le spectacle du cinéma autre chose que ce que l'on y va chercher ? Quelque chose de plus subtil, de plus mystérieux ; de plus complexe et de plus simple, de plus vulgaire et de plus ingénieux ?...

*
* *

C'est un dimanche. En province. Un jour de fête. Un jour de pluie. On pourrait dire quatre dimanches superposés ! Une somme d'ennui intolérable...

Les cloches brutales, joyeusement péremptoires, entrent dans ma chambre, abîment le silence et défigurent les choses familières. Par la fenêtre un' paysage de banlieue s'offre, morne et gris, sous un voile d'eau. Une pluie fine et assidue. Celle qui attriste, mais n'emprisonne pas.

Que faire ? Comment lire, rêver, travailler dans ce tapage et cet ennui ? Comment lutter contre la rigueur d'un tel sort ?

Au bout de l'avenue, le tramway passe. Il mène au cinéma. Pourquoi pas ?...

Sur la grande place la foule se presse. A l'entrée du théâtre on refuse du monde. L'affiche est pourtant bien inquiétante. D'un symbolisme exaspéré, elle présente un cœur saignant, un calvaire, un casque et une épée, des sabots d'enfants dans une grande cheminée, au-dessus de laquelle se dresse, barbu et couronné, un imposant père Noël. Evidemment, c'est très risqué. Mais il faut bien le tuer, ce dimanche !

Et j'entre, et je demeure là trois grandes heures. Et je regarde des films où il n'y a aucune ingéniosité, aucune imagination, aucune lueur d'esprit, aucune aventure extraordinaire, de ces films qui tombent dans les ténèbres de l'oubli sans qu'il en reste rien au creux de notre mémoire.

Qu'est-ce donc alors ? Quelles sont les causes pour lesquelles je m'en vais de là avec la conscience de n'avoir pas perdu mon temps, et pour lesquelles j'y reviendrai au prochain dimanche, au premier jour où pèsera sur moi la tristesse des heures ?

C'est de la vie d'abord ! La vie, qui nous intéresse toujours par-dessus tout. La vie, quelle qu'elle soit, médiocre ou magnifique, pauvre ou exaltée, subtile ou grossière, belle ou laide. La vie sous toutes ses formes. Des êtres, des bêtes, des insectes. Arbres, plantes, fleuves, mer, pluie ou soleil. La terre et tous les éléments. Et tous les mouvements de toutes ces forces, mouvements inconscients ou volontaires, sublimes ou absurdes, misérables ou infinis ! Ah ! que m'importait tantôt l'affabulation niaise qui se déroulait devant moi ! Les images multiples se succédaient sans relâche, m'apportant des flots de vérité et de réalité.

Au service d'un travail médiocre l'objectif aveugle, avide, avait dérobé des trésors, des horizons magnifiques, des espaces lumineux, des bois palpitants, des prairies adorables, des montagnes grandioses, des stalactites de glace. Et surtout, et sans cesse, il avait volé du soleil ! partout le soleil se glissait et s'insinuait, jouant sur les formes et sur les choses pour les exalter et les glorifier. Il y avait aussi des créatures qui passaient, riant, pleurant, blasphémant ou chantant. Je ne sais pourquoi, mais c'était la vie ! La vie qui est tout et qui n'est cependant qu'une cire molle et malléable entre les mains de chacun.

Je l'ai vue ce jour-là, sur l'écran, cette vie qui nous appartient, que nous maudissons sans cesse, et que nous devrions remodeler avec amour à chaque nouvelle aurore. Pauvrement, en noir et blanc, sur un petit carré de toile, sans le secours des mots, en dépit d'une histoire sotte, elle m'est apparue dans ses aspects multiples, admirables ou stupides, toujours immenses et respectables.

Je l’ai vue, non pas factice et transposée comme au théâtre où la vérité s'échappe par la brèche d'un quatrième mur illusoire, mais simple, réelle, entre les quatre murs d'une chambre, d'un salon, d'une mansarde, où, comme un œil indiscret, l'objectif s'introduit pour surprendre un peu de cette humanité qui nous passionne.

Je l'ai vue dans sa diversité infinie. En un moment j'ai parcouru le monde entier, mes yeux ont voyagé du pôle nord au pôle sud, connaissant tout, pénétrant partout. Sans chercher, sans vouloir, sans réfléchir, sans tourner des pages, sans le moindre effort, j'ai remporté le maximum de visions vraies, d'images naturelles. La, science nous amuse, le, document nous intéresse, les voyages nous divertissent, et si, trop souvent, le drame allie l'ingénuité d'un Berquin au romantisme le plus absurde, nous le supportons cependant, car il ne peut détruire la force du réel et du vrai dans lequel il se déroule. Nous en sommes quittes pour songer une fois de plus combien les conflits des hommes sont misérables en regard de la nature superbe et des bêtes paisibles.

Et c'est d'abord à cause de cela, de cette glorification de la réalité que l'on pourrait, il me semble, définir le cinéma : une expression merveilleuse qui prend place entre l'art et la vie, mais plus près de celle-ci que de celui-là.

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Ce n'est pas seulement la vie qui nous apparaît au cinéma dans sa profonde réalité. C'est la nature elle-même. Nous l'y admirons et la goûtons autrement, car nous la surprenons sans qu'aucun de nos sens en soit ému.

Si je me promène dans un champ, dans une forêt, dans un jardin, je participe aux choses qui m'entourent. J'en suis traversée avant que d'en être avertie. Leur charme, pour moi plus ou moins- grand, subit mon humeur plus ou moins heu-reuse. Si je les respire, si je les touche, elles se transforment. Le souffle qui passe sur la neige, en glaçant mon visage, modifie ma vision. Le soleil me heurte. La pluie me gêne. Le printemps m'angoisse. Au cinéma, la grâce personnelle des choses m'est révélée, car mon plaisir est détaché. Je considère et je décompose en ses éléments la force déchaînée du terrible vent qui ne me bouscule pas. L'autre jour j'ai vu-sur l'écran une vague qui tenait tout le cadre, une vague immense qui s'élevait transparente, géante, dans la lumière. Je ne saurais décrire son aspect féerique et formidable, mais je savais la traîtrise de la mer, et je l'ai vue ! J'ai vu en cet instant sa face hypocrite et mauvaise, superbe et si dangereuse.

Ainsi de mille beautés, que nous, voyons sans cesse, et que nous voyons mal, parce que nous les sentons en même temps. « Mon Dieu ! faites que je sorte de toutes choses pour mieux les contempler ! » s'écriait je ne sais plus quel philosophe. N'est-ce pas- juste ? Quand nous croyons contempler, nous subissons encore, nous échangeons. Pour vivre totalement, nous sommes trop armés, ou pas assez. Il nous faudrait des antennes, des tentacules, le flair des chiens, et tant d'autres armes encore ! Il nous faudrait surtout pouvoir en isoler à volonté le fonctionnement, afin de posséder la puissance entière de chacun de nos ressorts. Mais c'est à la fois que je sens, que je touche, que je respire et que j'écoute. N'est-ce pas trop, ou n'est- ce pas trop peu ?
Au cinéma, il y a unité de perception. Un seul de nos sens est en éveil, et c'est le plus exercé et le plus indulgent. L'ouïe ne reste-t-elle pas très souvent au repos ? Indifférentes aux mille bruits qui constituent notre silence habituel, nos oreilles vivent dans une certaine oisiveté et sont moins contaminées par la banalité. Mais nos yeux ! Il faut bien toujours voir, toujours regarder, toujours subir des spectacles que nous ne choisissons pas. Les rues, les maisons laides, les magasins remplis d'objets déplaisants, les couleurs offensantes, les affiches, les réclames, les images criardes, autant, injures et de coups pour notre vue. Sans compter les contrastes déplorables, la chambre d'hôtel et le musée, les coulisses et le spectacle, le palais et l'hôpital, la campagne et la gare, et tout ce que l'on aperçoit, que l'on devine, que l'on ne peut pas ne pas voir ! Nos pauvres yeux contents ou pas contents enregistrent toujours. Ils sont tellement adaptés à ce travail forcené que, la nuit encore, abandonnés à eux-mêmes, quand notre conscience a fui sous le double manteau des ténèbres et des paupières, ils fabriquent encore des visions !

Et c'est pourquoi ils acquièrent une bienveillance qui leur fait supporter, des visions élémentaires et possèdent une éducation qui les ramène par lassitude aux images simples, aux formes réelles que l'art ne transpose ni n'ennoblit.

Cependant, j'avoue que j'ai souvent fermé les yeux au cinéma. Le spectacle était trop niais et l'ombre si propice !

Et c'est ainsi, en libérant mes regards à l'aventure, qu'il m'a semblé surprendre les agréments épars et divers qui inconsciemment nous retiennent là, passifs et résignés... Un bois nous apparaît, si parfaitement surpris que nous croyons sentir l'odeur de la terre humide. Une plaine ondule sous le soleil et c'est tout    l’été. Un enfant joue, un chien court, un navire s'élance. Voici des Japonais dans un paysage inconnu, des Arabes dans une rue éclatante. Et, tout à coup, c'est une femme qui pleure. Nous ne savons pas pourquoi, nous n'avons pas suivi le drame, nous l'ignorons, c'est une inconnue, et pourtant elle nous émeut quelquefois plus qu'une héroïne de théâtre, qui, pendant trois actes, aura crié, peiné, gesticulé, pour capter notre cœur.

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Et voilà aussi une des grandes beautés du cinéma. Il nous apporte, telles des pierres précieuses, les plus petites nuances, du plus profond de l'âme. Quand nous passons dans la rue, et que nous voyons une femme ou un gamin qui pleurent, avons-nous besoin de savoir leur histoire pour être émus ? Non, c'est la toute-puissance des larmes qui nous prend le cœur. La grande, l'irrémédiable pauvreté du théâtre, c'est que les mouvements secrets y sont perdus. Ils sont trop loin, ils tombent en route. L'âme véritable est dissimulée sous un texte qui lui est étranger, comme les traits sont dissimulés sous le fard. Certes, je t'avoue, le grossissement des visages sur l'écran est peu esthétique, mais combien il nous apporte de vie intense et profonde! On pourrait presque dire que c'est de l'anatomie psychologique, tant il décompose les mouvements de l'émotion, de la douleur ou de la joie. Il nous tes montre presque par l'intérieur à force d'en grossir l'aspect. D'ailleurs, toute expression trop marquée est une grimace, la discrétion est indispensable. L'artiste doit sentir vivement et laisser voir très peu.

Cette femme qui souffre est complètement immobile, je vois son menton qui tremble à peine, et sa lèvre qui frémit. Son visage incliné de côté, ses cheveux rejetés en arrière, me présentent l'une de ses tempes où les veines se gonflent. La contraction légère de son cou me fait deviner sa gorge serrée par la douleur, et cette douleur me gagne souvent plus profondément que celle de l'actrice qui parcourt la scène, déchire son mouchoir, tord ses bras, halète, palpite, vocifère, se démène frénétiquement, désespérément, pour envoyer à vingt-cinq mètres de sa poitrine la représentation d'une émotion qui ne saurait y habiter.

Est-ce pour ces raisons que le Cinéma laisse passer l'âme mieux que le théâtre ? Cela vient-il aussi du silence des personnages ? Croyons-nous davantage aux regards sans voix ? aux sourires sans paroles ? Les âmes sont-elles plus nues de se montrer seulement vêtues de formes ? Sans doute, car l'écran est révélateur des races et de leur psychologie. Grâce à lui, par cet aspect démesuré qu'il donne au frisson d'une lèvre, à la, contraction d'un muscle ou d'une paupière, nous saisissons, plus vite et plus exactement que dans leur pays, les caractères différents d'un Américain, d'un Anglais, d'un Italien ou d'un Norvégien.

Il est intéressant de constater que, au cinéma, la beauté ne nous attache pas par elle-même. C'est un coffret précieux, mais hermétique. En revanche la plus légère indication de bassesse et de vulgarité nous devient odieuse. Ce que nous appelons le rayonnement d'un être est inscrit sur l'écran plus et mieux que dans la vie. Une multitude de gens cinématographiés restent plats dans notre souvenir et s'effacent bientôt. Quelques-uns ont un relief, une force vitale. Au-delà de notre rétine, ils ont frappé notre esprit et même notre sympathie. Nous ne saurions les oublier.

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II y a quelques mois, on donnait sans grande réclame, car la bande avait été jugée trop réaliste, un film intitulé « Châtiment ». C'était un épisode de la guerre en Orient, très simple, très vraisemblable, exprimé dans une suite de tableaux de maîtres, avec des coups de lumière à la Rembrandt... Des scènes admirables se déroulaient à l'ombre d'un vieux couvent, où des soldats ennemis, ivres de chair et de sang, faisaient soudain irruption. A leur tête, il y avait un soldat kurde, doué d'une expression si extraordinaire que je ne pense pas qu'il puisse émaner d'un être plus d'intensité et plus de pensée visible. Je regardai le programme. Le rôle était interprété par un artiste américain.

Je crus alors que, pour faire vivre un type avec autant de vérité, cet homme avait dû être choisi entre tous comme ressemblant exactement au personnage fictif. Or, peu de temps après, dans un autre film ayant pour titre « Le Défenseur », il me sembla le retrouver, jouant un rôle où il était absolument métamorphosé. Autre caractère, autres gestes, autres expressions, et même autres traits. Persuadée que, derrière ce masque inconnu, habitait une force, une volonté, je dirai presque une âme, qui déjà m'avaient émue, je consultai l'affiche.

En effet, c'était le même artiste, le soldat kurde au profil d'oiseau de proie, à la bouche vorace, au regard terrible, qui animait de sa magnifique allure le drame du vieux couvent, et qui nous présentait maintenant, à travers les péripéties du « Défenseur », un homme au profil plat un peu kalmouk, un avocat au regard incisif et glacé, à la lèvre fine et sceptique.

A quoi l'avais-je reconnu ? A ce quelque chose de mystérieux, d'insaisissable, que l'objectif semble dérober au plus profond des humains, et que l'écran révèle et accuse ; ce quelque chose qui fait l'ascendant d'un orateur, la domination d'un acteur, le magnétisme d'un psychiatre, le pouvoir d'un homme d'Etat, la séduction, l'emprise ; ce quelque chose que nous appelons l'âme et qui est en vérité notre force psychique avec ses vertus secrètes, plus ou moins fortes, étranges ou subtiles.

Lorsque nous connaîtrons toutes les ressources d'un mécanisme capable d'extérioriser des nuances aussi profondes, les plus intéressantes visions pourront être réalisées.

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En attendant que ces problèmes soient abordés et résolus, contentons-nous de ce que nous offrent les modestes ressources du cinéma actuel, et, sans arrière-pensée, prenons plaisir... aux films américains. La naïveté, la fraîcheur, la jeunesse de la race leur prêtent des qualités qui expliquent leur succès autant et plus que la supériorité des moyens matériels. Les hommes sont de grands gars au sourire honnête, simples et sans cabotinage. Leur rayonnement sympathique captive la salle. Les femmes sont enfantines, vives, claires, leur beauté n'est rien moins que fatale. Tous sont sportifs, ou pourraient l'être, leurs mouvements sont souples, précis, bien ajustés à l’intention
Un grand acteur français disait un jour à l'un de ses élèves : « Allez donc au bout de l'intention ! » Evidemment, mais il faut pour cela une plénitude de force et de santé, un organisme équilibré. Il faut que la machine humaine soit en parfait état. Les Américains donnent cette impression physique agréable de jeunes créatures saines et puissantes. Ils sont mus par une mécanique neuve dont les ressorts ne « jouent » pas encore, et ils animent ainsi de leur grâce et de leur jeunesse des films dont les moindres valent par le naturel des personnages et par la richesse de vie qu'ils mettent au service de l'objectif. Des cavaliers fous traversent les pampas, de superbes brutes luttent à coups de poings dans les mines et font songer aux bronzes héroïques du grand Constantin Meunier, des batailles se livrent, il y a de la force, des muscles, de l'allégresse, de l'ardeur, du sang, et, au milieu de tout cela, ingénue, fragile et candide, une enfant blonde qui ne comprend pas...

Est-ce de l'art ? Qu'importe ! Encore une fois, c'est de la vie, et voilà l'essentiel.

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Et d'ailleurs, l'art est-il possible au cinéma ? N'y-a-t-il pas antinomie entre les deux termes, et contradiction entre ce que l'un et l'autre ils représentent ? L'art est une transposition. Il voile, atténue, choisit, interprète, met en valeur. Le cinéma ne transpose pas. Il montre, insiste, accuse, s'acharne avec cruauté. Il ne mentira jamais assez pour s'élever au rang de l'art. C'est son honneur de n'accepter que le vrai, et de grossir jusqu'à l'absurde les pauvretés de l'artifice. Il a une façon implacable d'exposer à nos yeux les ruses d'un grand acteur, alors qu'il magnifie les larmes d'un enfant, l'indifférence d'une bête, ou la placidité d'un champ dans le soleil.

Et voilà sa condamnation aux yeux de beaucoup d'artiste qui pensent, comme Oscar Wilde, que toute beauté, toute poésie, sont encloses dans le mensonge, le secret, le mystère... Que ceux-là ne craignent donc rien ! Les forces secrètes (hélas ! et heureusement) ne font que grandir à mesure que nous en reculons les limites. Qu'on le veuille ou non il y en aura toujours assez autour et au-dessus de notre vie. La quantité de vérités que nous pouvons amasser constitue un foyer que nous alimentons sans cesse de nos erreurs et de nos illusions. Sur la cime des flammes commenceront toujours l'indéfinissable, l'inconnu.

Si le cinéma, aujourd'hui, nous semble difficilement conciliable avec l'art, ne peut-on pas l'orienter vers d'autres conceptions et d'autres réalisations ? Auprès d'aventures romanesques, qui n'auraient pas de mal à être mieux traitées, d'autres films ne pourraient-ils s'ajouter, féeriques, documentaires, biographique et même philosophiques ?

Bien des choses sont à tenter sur l'écran ! Si le théâtre paraît avoir donné sa mesure ; si l'on y a tout essayé, jusqu'à mêler les spectateurs aux acteurs, la scène et la salle ; si la division semble faite une fois pour toutes entre les pièces joua-bles et les pièces « non jouables » ; si l'esprit doit trouver toujours une pâture plus infinie et plus profonde dans la lecture qu'au théâtre, le cinéma, par contre, est si jeune que l'on peut difficilement prévoir toutes ses possibilités et toutes les satisfactions que nous avons le droit d'en attendre au point de vue intellectuel. La pensée n'est-elle pas dans la suggestion, et ne peut-on pas tout suggérer par l'image ? Ne pensons-nous pas à l'aide de visions et de mots, et la succession soudaine, multiple et infinie des aspects, n'est-ce pas le cinéma seul qui peut l'enregistrer?

Alors que lui manque-t-il pour nous procurer des spectacles capables de contenter notre esprit ?

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Que lui manque-t-il ? D'abord l'établissement qui n'accepterait que des films choisis, et le directeur averti qui saurait attendre l'affirmation de sa bonne renommée pour assurer ses bénéfices. Quant aux auteurs, ils viendront en foule, lorsqu'ils ne seront plus obligés de se soumettre aux formules vulgaires.

Jusque-là le programme est si facile que l'on s'étonne qu'une affaire aussi avantageuse n'ait pas été déjà réalisée. Mais la tâche malaisée serait le recrutement d'interprètes qui ne soient ni des artistes, ni surtout des acteurs, les principes scéniques, pour toutes les raisons que nous avons étudiées, étant con-traires aux lois de l'expression cinématographiée. Ici la création d'une école s'imposerait comme en Amérique. Il ne suffit pas de choisir des êtres doués des qualités physiques et psychiques nécessaires. Il faut encore leur apprendre à s'extérioriser en restant simples, à penser fortement et de façon visible, à développer l'intensité des émotions tout en gardant une extrême mesure dans le geste et l'expression. Il faut aussi qu'ils aient du charme plus que de la beauté. Certaines vedettes américaines nous attirent, quel que soit le film, par une autorité particulière, quelque chose de concentré et de dominateur. D'autres nous émeuvent par l'humanité qu'elles dégagent. Leur visage possède une sensibilité merveilleuse qui reflète tous les états d'âme, tous les mouvements du cœur.

Avec des miroirs aussi sensibles que le sont ces visages, on arriverait, j'en suis sûre, à traduire les drames les plus subtils de notre vie intérieure, car c'est surtout l'insuffisance de l'interprète qui borne les scénaristes en France. Ils ont dû se maintenir jusqu'ici à une psychologie de premier plan, à celle qui ne va pas au-delà de l'action visible. On a pu se permettre certains mouvements secrets, à condition qu'ils fussent nettement catalogués et « d'un usage très répandu », tels que la jalousie, la traîtrise, la ruse, la malice, ou bien le sacrifice, l'abnégation, la bonté méconnue, la générosité cachée. Ainsi l'objectif a été voué aux vérités élémentaires, et l'on a cru qu'en dehors de ces grandes lois primordiales qui mènent l'humanité il n'existerait plus.

Evidemment, vérités et lois seront toujours les mêmes, mais elles nous apparaîtront dans leurs aspects multiples, si l'on en traduit les nuances infinies. La passion d'une Hermione, d’une logique si souterraine dans son incohérence, sera mille fois plus difficile à exposer aux yeux que celle d'une Phèdre, qui va tout droit du malheur au tombeau. Pour traduire Hermione, il faudrait joindre à des qualités exceptionnelles une valeur psychique et une force énergétique peu communes. Mais le féminisme n'a pas encore détruit les Hermione, et si l'on fon-dait une école à Paris, comme en Amérique, les sujets instinctifs et passionnés ne manqueraient point.

Ont-ils tous passé par l'école, les centaines d'interprètes qui rendent supportables les aventures enroulées autour d'une intrigue policière quelconque et de beaucoup d'autres bandes du même genre ? Ils sont si nombreux qu'il est permis d'en douter. Serait-ce alors une question de race, de dispositions naturelles ?...

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Nous avons reconnu tout à l'heure que, pour constituer des spectacles intellectuels dans un établissement choisi, les scénaristes ne manqueraient pas. Afin de commencer cette entreprise sans risques inutiles, de tels spectacles pourraient n'être proposés au public que deux ou trois fois par semaine, les autres jours restant consacrés aux banalités habituelles. On verrait ainsi jusqu'à quel point ils sont désirés.

On a souvent parlé d'un cinéma-éducateur. Pourquoi n'aurait-il pas ici son après-midi ? Je ne parle pas de films pour enfants, mais simplement d'un programme sérieux, c'est-à-dire scientifique, philosophique, psychologique, biologique. On pourrait faire d'intéressantes choses, si l'on mettait en œuvre dans ce sens toutes les possibilités de l'objectif, si l'on nous montrait, par exemple, la conception de telle ou telle loi morale, diverse dans chaque pays. Ne serait-il pas curieux de superposer les renversements d'un même problème, proposé de même façon et dans la même anecdote ? On en suivrait à chaque fois la courbe différente, donnant lieu à des états d'âme imprévus, et aboutissant à une solution nouvelle. Puis, en réduisant véridiquement au minimum la nécessité de cette loi, on nous en présenterait la face inéluctable.

Que le cinéma éducateur nous aide ainsi à la connaissance de l'esprit humain. Qu'il fasse un parallèle entre l'histoire d'un peuple et celle d'un individu. Qu'il décompose la vie d'un héros, de façon à rendre compréhensible d'abord l'homme, la nature, le caractère, le terrain dans lequel vont sourdre les énergies nécessaires qui feront lever l'inspiration et qui mettront eu marche sa volonté. Qu'il nous montre par une anecdote psychologique les véritables ressorts de la chance, selon la si juste définition d'Alfred Capus : « La chance est la faculté de s'adapter instantanément aux événements. » Qu'il définisse les dangers de l'imagination, en représentant la vision erronée à côté de la vision réelle. Qu'il analyse au cours d'une aventure la façon dont se désagrège peu à peu un ca-ractère soumis à des influences diverses. Qu'il nous expose encore l'intention d'une action, puis cette action modifiée par les circonstances, par le milieu, et finalement sa réaction.

Par exemple, la cause de l'aboutissement misérable d'une série de gestes généreux et justes, cause quelquefois infime, que le héros n'aura même pas soupçonnée. Ou bien le contraire, si souvent constaté : la montée glorieuse d'une vie dont les calculs secrets ne sont guère avouables...

De tels films demanderaient, bien entendu, à être conduits avec une logique implacable. Si l'art, sous ses formes diverses, nous semble volontiers supérieur dans le désordre, nous voulons au cinéma l'ordre et la clarté, et nous nous irritons quand « ça ne tient pas debout ». Or, jusqu'à ce jour, les films dénués de psychologie ne nous ont représenté que le squelette des événements, nous privant ainsi de l'enchaînement qui constitue la logique, souvent invisible, mais toujours présente, dans cette réalité où il n'y a pas d'effet sans cause. Et nous sommes d'autant plus mécontents que nous sentons mieux les prodiges que, dans ce sens, pourrait accomplir le cinéma.

La nécessité de rester dans l'image, mais la possibilité d'en chaîner ces images sans interruption, en montrant à la fois les causes et les faits, leurs répercussions justes ou fausses, tragiques, absurdes ou plaisantes, leurs déformations ou leurs interprétations, et les anneaux en apparence insignifiants qui relient entre eux les événements opposés, tout cela nous forcerait à considérer justement ce que nous appelons assez pompeusement notre Destin, lequel est comparable à un réseau dont chaque maille nous relie les uns aux autres. Les chanceux, les habiles sont ceux qui ont la science instinctive du mouvement juste, qui savent mesurer les rapports, évaluer les effets, ne pas tirer trop à droite ni trop à gauche : n'est-il pas là, tout simplement, le secret de la réussite ? Les violents passent au travers du réseau, déchirent les mailles, et l'on souffle autour d'eux. Les délicats, les sensibles comprennent et n'osent pas toujours agir quand et comme il le faudrait. On dit qu'ils-ont peur des contingences : ils ont peur de tirer sur les mailles d'autrui...

En résumé, on pourrait profiter du cinéma pour donner aux jeunes esprits la connaissance de certaines lois irréductibles qui constituent le mécanisme de la vie. Il ne suffit vraiment pas de s'en tenir à la punition des méchants, à la récompense des bons, à l'affirmation du Bien, du Mal, du Bon, du Juste ou de l'Injuste. On fabrique ainsi aux consciences un petit monde d'appuis illusoires au milieu de quoi elles circulent jusqu'au jour où elles s'aperçoivent qu'il n'y avait rien là que des majuscules. Le bien et le mal ne sont pas des entités. Pour le prouver, qu'on nous montre les lois auxquelles le bonheur et le malheur paraissent généralement attachés.

Et que l'on ne nous dise pas qu'après toutes les démonstrations possibles l'essentiel échappera toujours. Hélas ! oui. Mais pourquoi exigerait-on ici ce qu'aucune puissance ne pourra jamais nous révéler ? Quel est l'art, le moyen, la science, qui ne laissera pas de place à l'inconnu ? D'ailleurs, un professeur pourrait commenter le film, et des causeries intéressantes ou amusantes expliqueraient et développeraient les idées trop abstraites pour l'écran. Et puis, après avoir subi docilement tant d'histoires absurdes, lamentables et incohérentes, quelle serait notre mansuétude pour les erreurs qui se commet-traient au nom d'un effort nouveau !

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Les pièces de théâtre arrangées pour le cinéma perdent généralement beaucoup, et ne donnent pas à l'objectif les éléments qu'il réclame, toujours pour cette raison que le cinéma est plus près de la vie que de l'art. Une des rares pièces émouvantes dont j'aie vu la traduction en film est La Course du Flambeau, le chef-d’œuvre de Paul Hervieu. Je dois même avouer que la très grande idée de ce drame, si noble, si tristement humain, m'a semblé sur l'écran plus douloureuse que sur la scène. Gagne-t-elle en intensité par la délivrance d'un texte trop livresque ? On est prêt à le croire quand on songe aux pièces d'Henry Bataille si admirablement mises en scène sur des bandes italiennes, et qui perdent cependant beaucoup à être dépouillées d'un dialogue souple qui accomplit le miracle d'être beau sans jamais arrêter le mouvement. J'ai vu au cinéma peu de choses aussi navrantes que la fin de la Course du Flambeau. La mort très simple de la grand'mère, qui s'éteint dans la neige au cœur d'un paysage magnifique, au moment même où sa fille envoie un dernier baiser à sa petite fille, est admirable. Nous avons là, en pleine vérité, une superbe synthèse de l'idée de Paul Hervieu, alors qu'au théâtre nous sommes gênés par la toile tremblotante du chalet suisse, par le carton découpé des sapins, et par le choc impitoyable des cannes sur le plancher.

Pourquoi ne tenterait-on pas aussi la féerie, toujours si précaire sur les planches ? Quelques essais de ce genre n'ont rien donné. On avait choisi des thèmes trop enfantins et trop connus. Mais si l'on essayait, par exemple, de certains contes de Tennyson, de certaines légendes de la Chine ou du Japon, on aurait certainement des résultats curieux.

Le cinéma est, en général, plus proche du roman, et le serait encore davantage des biographies. Ne serait-il pas intéressant d'en faire l'expérience ? Quand on songe avec quel amour nous allons à la recherche des personnalités qui nous charment, combien nous serions heureux de les voir vivre, travailler, aimer, souffrir, et puis disparaître !
 
Le bon vieux Fabre l'entomologiste, au milieu de ses insectes, dans son paysage et sa maisonnette, entouré de ses petits-enfants, aidé par eux, constituerait un filin bien amusant.

Avec quel plaisir les fervents de Jean-Jacques Rousseau suivraient sa vie sur l'écran ! Quelle joie de le voir grandir aux Charmettes, sous l'égide souriante de la délicieuse Mme de Warens !

Ah ! l'amour au cinéma, non pas l'amour imaginé et toujours un peu factice, mais l'amour de deux êtres qui ont vécu, l'amour des grands amants dont la douleur et l'exaltation ont bouleversé l'humanité ! l'amour de Pétrarque et de Laure, de Racine et de la Champmeslé, l'amour de La Vallière, l'amour de Mlle de Lespinasse, l'amour de George Sand et de Musset, les amours de Victor Hugo d'après le beau livre de M. Louis Barthou !...

Au théâtre les émois les plus touchants sont perdus et les paroles prononcées gênent souvent. Le mélange des sensibilités les plus délicates y produit de la dureté et de l'ironie.

Mais, au cinéma, chaque sensibilité garde son acuité personnelle. Et c'est à l'oreille, pour nous seuls, en grande confidence, que nos semblables nous chuchotent leurs peines, et nolis révèlent les secrets douloureux de leurs âmes...

GEORGETTE LEBLANC.


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