[CUISINE, Recettes].- Le Trésor de la cuisine du bassin méditerranéen par 70 médecins de France / Révision et préface par Prosper Montagné. ; ill. de V. Le Campion.- Paris : Editions de La Tournelle [ca1937].- 127 p. : ill., couv. ill. ; 23 cm.

Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (23.I.2015)
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LE TRÉSOR
DE LA CUISINE
du Bassin Méditerranéen

par
par 70 Médecins de France
Révision et Préface par
PROSPER MONTAGNÉ

Le Trésor de la cuisine du bassin méditerranéen

[Table des matières (Pdf)]

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LISTE DES MÉDECINS AYANT COLLABORÉ A CET OUVRAGE :

Mmes Olivier-Fauchier, J. Queslier, Jeanne Tixier, M.-L. Vouaux. MM. Aronwald, Camille Badin, Baissette, Barbier de la Serre, Louis Beauchard, Jean Bedos, Benoit, Paul Bidault, F. de Bil, Raymond Boissier, Bouchère, Bourgin, G. de Bousquet, Paul Bruder, Cambessédès, Louis Camous, Chanot, Chuche, Clavel, Fernand Clément, Hubert Cleu, P.-C. Comte, F. Conil, Maurice Charenton, François, A. Frécon, Gérard Desfarges, R. Gentil, Guichard, Hautechaud, L. Heynen, Raymond Habault, Jean Laborde, Lafon, Georges Lebret, Léon Meunier, Maxime-Leroy, A.-E. Lévy, A. Lourteau, A. Magnan, T. Malachowski, Gaston-A. Manouvrier, J. Martin, E. Montagné, Louis Moret, Pierre Noël, Xavier Poli, Élie Roux, L. Saint-Pierre, Sassier, Sauveplane, André Tacheron, P. Tison, Tubiana, Pierre Uhry, Vaillant, Valet, Veyrat, Charles Vincenti, C. Wibault, M. Zermati.

LE FESTIN D’HIPPOCRATE

Brillat-Savarin place les médecins dans la catégorie des « gourmands par état » : « Vous êtes, leur dit-il, un jour où, sous la présidence du docteur Corvisart, il assistait lui « neuvième », (ainsi se qualifie l’auteur de la Physiologie du goût) à un repas de médecins, vous êtes les derniers restes d’une corporation qui, jadis, couvrit toute la France. Hélas ! les membres en sont anéantis ou dispersés… Plus de fermiers généraux, d’abbés, de chevaliers, de moines blancs : tout le corps dégustateur réside en vous. Soutenez avec fermeté un si grand poids, dussiez-vous essuyer le sort des trois cents Spartiates au pas des Thermopyles… » (1).

Mais après avoir ainsi loué les qualités gourmandes des médecins, Brillat-Savarin leur adresse quelques blâmes : « Il ne veut pas mourir, dit-il, sans leur reprocher l’extrême sévérité dont ils usent envers leurs malades ».

« Dès qu’on a le malheur, dit le maître ès-sciences gourmandes, de tomber dans leurs mains (il parlait des médecins du commencement du XIXe siècle), il faut subir une kyrielle de défenses et renoncer à tout ce que nos habitudes ont d’agréable… Le médecin rationnel, poursuit-il, ne doit pas perdre de vue la tendance naturelle de nos penchants naturels, ni oublier que si les sensations douloureuses sont funestes par leur nature, celles qui sont agréables disposent à la santé. On a vu un peu de vin, une cuillerée de café, quelques gouttes de liqueur rappeler le sourire sur les faces les plus hippocratiques. »

Et voilà bien, n’est-ce pas ? une excellente doctrine. Et combien l’approuveront les médecins qui sont les auteurs des savoureuses recettes de cuisine publiées dans ce petit recueil.

Que, d’une façon générale, les médecins soient des gourmands (« gourmands » dans le sens noble du mot), de cela je n’ai jamais douté. Trop souvent, en effet, il m’a été permis de constater « de visu » comment se comportaient à table les nombreux médecins dont je m’honore d’être l’ami, et trop souvent aussi il m’a été donné de les entendre parler – et avec quelle compétence ! – des choses de la cuisine, pour ne pas savoir qu’ils avaient porté  au plus haut point le culte raisonné de la bonne chère, et que si, par état, ils vénéraient Hippocrate, dieu de la Médecine, par état aussi, et par goût, ils honoraient comme il convient Comus, dieu des festins.

Si j’avais ignoré cela, je l’aurais pu apprendre lorsque les circonstances m’ont donné la possibilité de lire, d’analyser, et, finalement, de juger les mirifiques recettes que, pour répondre à la demande qui leur avait été faite par Grandgousier, avaient envoyé à cette revue les médecins du bassin méditerranéen.

Ah ! quel magnifique festin ont ainsi décrit ces médecins gourmands ! Quel beau, quel délectable Codex culinaire, celui qui a pu être fait en réunissant en un livre magistral toutes les formules envoyées à Grandgousier par les médecins du pays d’Oc, par ceux de la Provence parfumée, par ceux aussi qui vivent dans la gourmande Gascogne.

Mais, dans une gerbe trop opulente, il a fallu choisir. Et combien difficile était ce choix, tant étaient méritantes toutes les recettes envoyées !

Oui, bien ardue a été la tâche du jury, et si, malheureusement, un grand nombre de recettes ont dû être éliminées, c’est que, pour le premier volume de ce recueil gourmand, le nombre des pages avait été strictement fixé et qu’il ne fallait pas le dépasser.

Mais combien friand est le menu de ce premier livre, et que grand sera le plaisir qu’auront à le parcourir les gens qui savent « ce que manger veut dire » !

Ce menu est composé de la façon la plus classique, c’est-à-dire que les lois protocolaires du dîner y sont observées. Le beau repas offert par Grandgousier à ses amis commence par le potage et se termine par les entremets de sucre. C’est là une loi sage qui, depuis des siècles, est observée en France, pays traditionnel du bien manger.

Sans doute y a-t-il en ces temps derniers des gens extravagants, et surtout ignorants en la matière, qui ont voulu bousculer les traditions culinaires. Des théories folles ont été énoncées. On a préconisé des recettes plus ou moins « futuristes ». On a tenté de nous imposer une cuisine caricaturale. Le bon sens français qui, depuis deux millénaires, a permis à notre cuisine d’être ce qu’elle est – c’est-à-dire la plus savoureuse du monde, parce que la plus logique – s’est élevé contre de telles tentatives. Grandgousier a voulu participer au bon combat. Et c’est à ses amis, les médecins gourmands, qu’il a demandé des recettes de vraie cuisine française, des recettes qui ne soient pas à l’usage des snobs.

Ce sont des recettes de ce genre que l’on trouvera ci-après. Nos lecteurs sauront les apprécier.

Prosper MONTAGNÉ.

(1) Ce fut en 1806 que Brillat-Savarin prononça cette allocution.



POTAGES, SOUPES,
BOUILLIES ET PANADES


BOUILLON DE LAPIN A LA CRÈME. Faire un pot-au-feu, comme celui de la poule au pot, en remplaçant la poule par un lapin (réserver le train de derrière pour faire rôtir), avec les légumes aromatisés habituels, clou de girofle et feuilles de céleri, qui donnent un goût particulier au bouillon. Dégraisser le lapin si besoin. Après deux heures de lente ébullition, passer le bouillon sur une serviette mouillée et dégraisser à nouveau. Avant de servir, lier de quelques cuillerées de crème fraîche. Croûtons de pain grillé facultatifs.

Dr Pierre TISON, Le Cateau.

POTAGE A LA REINE. Faire cuire 250 grammes de riz au bouillon bien dégraissé. D’autre part, prendre la chair d’une volaille cuite au pot (200 grammes pour un litre). Piler très finement cette chair en réservant quelques morceaux de filet qu’on coupe en petits dés. Joindre à la chair pilée le riz cuit et passer le tout au tamis. Ajouter du bouillon de cuisson de la volaille en quantité suffisante pour obtenir un potage de bonne consistance. Au moment de servir, ajouter 50 grammes de beurre fin. (A volonté, lier d’un jaune d’œuf). Mettre les dés de volaille dans le potage et servir.

Dr BEAUCHARD, Saint-Aignan-sur-Cher.

POTAGE COULIS DE POULET. Mettre dans une marmite un poulet de grosseur moyenne dont on aura enlevé la peau et que l’on aura bridé. Le couvrir d’eau. Le faire cuire doucement, la marmite couverte, jusqu’à évaporation d’un quart du liquide. Égoutter le poulet ; désosser la viande de la poitrine et des ailes. Piler cette viande au mortier et lui ajouter, en la pilant, quelques cuillerées de la cuisson, de façon à obtenir une pâte assez liquide. Assaisonner de sel, d’un soupçon de muscade râpée et d’une faible pincée de zeste de citron. Faire bouillir doucement cette composition pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’elle soit de bonne consistance. Ce mélange doit être onctueux et cependant suffisamment liquide pour pouvoir être bu.

Remarque : On peut augmenter le pouvoir nutritif de ce potage en lui ajoutant de l’orge ou du riz cuit à l’eau (ou dans le bouillon du poulet) et passer au tamis fin.

Cet apprêt est très nourrissant et sa digestibilité le fait accepter par les estomacs les moins tolérants.

Dr BENOIT, Paris.

POTAGE CRÈME DE SALSIFIS. Grattez, lavez et cuisez des salsifis ; passez-les au tamis, délayer cette purée avec du lait ou du bouillon ; ajoutez une liaison de crème de riz. faites bouillir ; liez encore le potage en le versant dans la soupière sur des jaunes d’œufs délayés dans trois ou quatre cuillerées de crème et un bon morceau de beurre frais.

Dr GUICHARD, Saint-Jean-de-Losne.

SOUPE AIGO BOUIDO. Faire bouillir quinze minutes deux litres d’eau additionnée de 3 décilitres d’huile d’olive, de huit gousses d’ail, d’un bouquet de thym, laurier et sauge, d’une pincée de feuilles de persil et assaisonner de 25 grammes de sel et d’un peu de poivre. Dans ce bouillon, faire pocher des œufs et les conserver moelleux ; les égoutter et les dresser dans un grand plat creux sur des tranches de pain et verser le bouillon dessus.

Dr BEAUCHARD, Saint-Aignan-sur-Cher.

SOUPE AIGO-SAOU. 1 kilogramme de poissons blancs en tronçons. Un oignon émincé, deux tomates hachées, trois à quatre pommes de terre en quartiers. Deux gousses d’ail, bouquet garni avec céleri, 25 grammes sel, poivre, 1 litre d’eau. Cuire vingt minutes. Verser le bouillon en soupière sur les tranches de pain arrosées d’huile d’olive et poivrées. Servir le poisson à part accompagné de rouille ou d’aïoli. Rouille : Pilez au mortier deux gousses d’ail avec un piment rouge d’Espagne. Ajoutez gros comme une noix de mie de pain trempée et pressée. Mélangez. Versez sur le tout, petit à petit, quelques cuillerées d’huile d’olive, en broyant au mortier. Ajoutez à la fin quelques cuillerées du bouillon de l’aïgo-saou.
                               
Dr P. SASSIER, Paris.

SOUPE A L’ŒUF . Mettre au feu, dans une casserole un litre d’eau, quatre ou cinq gousses d’ail, du thym, du laurier, de la sauge et quelques croûtons de pain. Casser deux œufs ; séparer les blancs des jaunes. Déposer les jaunes dans une soupière avec un décilitre d’excellente huile d’olive. Monter en mayonnaise. Pocher les blancs d’œufs dans la soupe et, quand elle aura bouilli quelques minutes, la mêler doucement à la mayonnaise et la servir sans la remettre sur le feu.
                           
Dsse Olivier FAUCHIER, Francis-Garnier, Algérie.

SOUPE DES MAURES. Ce potage est aussi appelé Soupe de l’Esterel, et c’est ainsi que l’appelle Escoffier dans son Guide culinaire. Voici comment on le prépare chez moi : Faites revenir au beurre un gros oignon émincé. Mouillez cet oignon d’un litre de bouillon de pot-au-feu (ou de cuisson de haricots blancs). Ajoutez 250 grammes de chair de potiron détaillée en dés, dix cuillerées de haricots blancs cuits. Cuisez doucement. Passez au tamis fin. Délayez la purée avec 1 litre de bouillon de pot-au-feu. Faites bouillir. Ajoutez 100 grammes de gros vermicelle. Faites cuire ce vermicelle douze minutes.

Dr SAUVEPLANE, Nîmes.

SOUPE LANGUEDOCIENNE. Bien entendu, l’ail est la caractéristique de cette soupe dont souvent je me suis régalé en pays d’Oc, lors des séjours annuels que je faisais chez un vieil ami à moi, qui soigne les habitants d’une toute petite ville cévenole, habitants qui, disons-le tout de suite, ne sont jamais malades. C’est au dîner du soir que l’on nous servait cette soupe succulente dans une large poêle ; et, sur la flamme de la grande cheminée, notre hôtesse la « fricassait » en quelques minutes. Et de ce mets campagnard, voici la très simple recette : Mettez dans une grande poêle trois cuillerées de graisse d’oie. Faites chauffer cette graisse et mettez dans la poêle deux très larges tranches de jambon. Sitôt que ce jambon est bien rissolé, retirez-le de la poêle (conservez-le au chaud placé entre deux assiettes, car on le servira ensuite comme « relevé » de la soupe).

Mettez dans la poêle (pour quatre convives) une vingtaine de gousses d’ail écrasées. Cuisez cet ail sans le faire trop rissoler. Saupoudrez d’une légère cuillerée de farine ; faites revenir un peu cette farine. Mouillez de deux litres et demi d’eau (ou, si vous en avez, de bon bouillon). Ajoutez le suc de deux grosses tomates (suc que vous aurez obtenu en passant les tomates crues au tamis) ; assaisonnez de sel, modérément à cause du jambon, de poivre, copieusement, et condimentez d’une brindille de thym. Cuisez à gros bouillon, douze à quinze minutes.

Versez la soupe dans une grande soupière où vous aurez battus trois jaunes d’œufs avec quatre fortes cuillerées d’huile. Mélangez. Servez en même temps que la soupe de larges tranches de pain de ménage que vous aurez saupoudrées de fromage râpé et fait légèrement dorer au four. Servez aussi en même temps le jambon. Évidemment, une telle soupe ne saurait plaire à ceux qui ont horreur de l’ail. Je ne suis pas de ceux-là !

Dr BAISSETTE, Paris.

UNE SOUPE PROVENÇALE. Non, ma soupe n’est pas une bouillabaisse. Mais, tout comme on le fait pour cette dernière, on la prépare avec du poisson, de la tomate et de l’ail et, comme de juste, on la parfume d’une pincée de safran. Voici ma recette : Faites fondre dans quatre cuillerées d’huile d’olive quatre cuillerées d’oignon émincé. Cet oignon doit cuire sans presque colorer. Quand il est cuit, mettez dans la casserole les tomates hachées grossièrement, deux gousses d’ail écrasées, un gros bouquet garni, un petit morceau d’écorce d’orange sèche. Mouillez de deux litres d’eau. Assaisonnez de sel et de poivre ; condimentez d’une pincée de safran. Cuisez à grands bouillons pendant quinze minutes. Passez ce bouillon à la passoire fine ou au tamis, en pressant sur les légumes, de façon à en bien extraire le suc. Dans une autre casserole (ou dans celle nettoyée, où a été fait le bouillon) mettez huit tranches de congre (Ficla). Assaisonnez de sel et de poivre ces tranches de poisson. Arrosez-les de deux ou trois cuillerées d’huile d’olive et versez dessus le bouillon indiqué ci-dessus. Cuisez vivement pendant dix minutes. Ajoutez 1 litre de moules que, d’autre part, vous aurez fait cuire et décoquillées, ainsi que la cuisson de ces moules passée. Faire bouillir trois minutes. Dressez le poisson et les moules dans un plat. Versez le bouillon dans une soupière sur de larges et épaisses tranches de pain de ménage. Saupoudrez de persil haché.

Dr C. WIBAULT, Paris.

BOUILLIE SANS ALBUMINE (Recette diététique). Par personne : Trois à quatre cuillerées de farine de blé complète ; Quantité suffisante d’eau ; Deux cuillerées à soupe de crème. Malaxer la farine sous un filet d’eau, le gluten reste dans la main. Séparer le son au tamis, recueillir la farine qui passe avec l’eau à travers le tamis de façon à obtenir environ un quart de litre de suspension farineuse qu’on fait cuire dix minutes ; saler très légèrement. Délayer la crème dans une assiette, y verser le potage légèrement refroidi et mélanger.
 
Dr Léon MEUNIER, Paris.


HORS-D’ŒUVRE

ARTICHAUTS A LA GRECQUE. On utilise les cœurs d’artichauts tendres, qui devront d’abord tremper dans de l’eau légèrement vinaigrée, pour leur conserver leur blancheur. Dans une casserole en terre, faites bouillir : l’eau, l’huile, poivre blanc en grains, coriandre, citrons coupés en rondelles, jus de citron, oignons, laurier, ail, thym, sel. A l’ébullition, ajoutez les artichauts et laissez cuire vingt minutes. Placez-les dans un saladier recouvert d’un papier huilé. Pour douze artichauts : Eau, huile, 100 grammes ; trois gousses d’ail ; très petits oignons ; très peu de poivre à grain blanc ; quelques graines de coriandre ; une cuillerée à soupe de vin blanc sec. Faites bouillir vite. Un verre de Porto.
                               
Dr Louis CAMOUS, Nice.

BARQUETTES A LA MILANAISE. Préparer avec de la pâte à foncer de petites barquettes cuites à blanc, c’est-à-dire sans leur garniture. Les garnir de macaroni cuit, coupé en petits dés, additionner d’une cuillerée de maigre de jambon haché, lié au gruyère râpé (ou au parmesan). Gratiner à four chaud. Servir sur une serviette pliée.

Dr CHUCHE, Paris.

BOULES DE NEIGE AU JAMBON. Deux ou trois blancs d’œufs, 100 grammes de maigre de jambon, un grand verre de lait, deux cuillerées de farine, un œuf de beurre, sel et poivre. Faire très peu de béchamel épaisse et lisse, juste pour tenir bien la liaison. Saler, poivrer, tenir au chaud. Hacher le jambon pas trop fin et battre les blancs d’œufs en neige très ferme. Mélanger en tournant ; garder quelques morceaux de jambon pour décorer en servant. Avoir une casserole d’eau bouillante ; mettre peu à peu le mélange par cuillerées à bouche très pleines sur l’eau bouillante en tournant pour former une boule. Au bout d’une minute, retirer, égoutter et servir très chaud.

Dr BEAUCHARD, Saint-Aignan-sur-Cher.

LA BOUTARGUE OU POUTARGUE. La Boutargue est née à Martigues, petite ville située à 40 kilomètres d’Aix, sur les bords de l’étang de Berre. Déjà très en vogue au siècle dernier, elle a été souvent comparée, à plus ou moins juste titre, au caviar. Laisser macérer deux jours des œufs de mulet dans du gros sel. Presser pendant deux heures entre deux planches chargées de gros poids. Laver soigneusement et exposer deux heures au soleil. Arroser d’huile d’olive, ajouter des rondelles de citron, quelques truffes coupées en tranches minces et du persil haché. Dresser sur un plat et servir froid.
                               
Dr Jeanne TIXIER, Bayeux.

CASSOLETTE CHAUDE AU FROMAGE DE GRUYÈRE. Un jaune d’œuf, une pincée de farine, une cuillerée à dessert de lait, une cuillerée à soupe de fromage de gruyère râpé, une pincée de sel. Mélanger. Incorporer à cette pâte le blanc d’œuf fouetté ferme. Mettre dans une cassolette beurrée. Faire cuire au four à feu vif. Servir de suite.
                               
Dr Hubert CLEU, Aubenas.

FRITOT AUX ANCHOIS. (Transformation des  Savorys Anglais). Broyer au mortier des anchois avec huile et jaunes d’œufs (environ un par deux anchois) ; ajouter peu à peu de la farine. Mélanger toujours pour obtenir une pâte homogène que l’on mélange sur la table farinée avec une pâte de farine faite avec un peu d’eau et de l’huile d’olive. Bien pétrir le tout, et former en boule. La pâte étant bien homogène, l’abaisser en une couche mince de 2 à 3 millimètres. Couper en petits disques avec une tasse ou un verre et faire frire dans de l’huile. Délicieux chauds ou froids, avec de la bonne bière.
                               
Dr P.-C. COMTE, Tunis.

FRUITS AU VINAIGRE. Prunes, par exemple. – Ce sont des fruits confits qui se conservent des années durant. Proportions : 2 livres d’Altesses, 3 livres de sucre, une once de canelle, trois ou quatre clous de girofle (13 grammes), 2 litres de vinaigre. Essuyer les prunes, les piquer, les mettre dans un vase ; faite fondre le sucre dans le vinaigre en laissant bouillir un instant avec la canelle. Verser le mélange bouillant sur les prunes. Laisser neuf jours. Mettre ensuite dans une bassine ; laisser bouillir cinq minutes ; ôter les prunes à l’écumoire et les mettre dans les vases de conserve. Laisser réduire le sirop. Le verser sur les prunes. Couvrir le lendemain seulement.

Dr Pierre TISON, Le Cateau.

ŒUFS DU DOCTEUR. Pour six œufs pochés : Faire fondre au beurre des échalotes hachées très fin ; ajoutez 75 grammes de champignons hachés, quatre feuilles de laitue ciselées ; mouillez avec un demi-verre de vin blanc sec ; laissez réduire, puis, ajoutez un verre de fonds de veau que vous réduisez à glace, 2 décilitres de crème double, réduisez de même, de façon à obtenir une sauce onctueuse, ajoutez cerfeuil et estragon hachés avant de servir. Dressez les œufs sur une croûte de feuilletage ovale et nappez de cette sauce.

Dr BRUDER, Paris.

LA « PISSA ». (D’origine italienne, se vend dans les ports méditerranéens, notamment à Marseille.) Faire une pâte à tarte salée. Beurrer un moule à tarte, dans lequel on étend la pâte en faisant un rebord circulaire. Préparer : 1° Des morceaux de tomates, crus, dépouillés de peau et de graines ; 2° Un hachis d’ail et persil (piment rouge ad libitum) ; 3° Quelques filets d’anchois ; 4° Des olives noires dénoyautées. Répandre ces produits sur la tarte, saler légèrement, poivrer, bien arroser d’huile d’olive et mettre au four pendant vingt minutes environ. Servir chaud ou froid.
                               
Dr F. CONIL, Roquevaire.

PISSALADIÈRE. La « pissaladière » ou tarte aux oignons est de date fort ancienne ; elle semble exister déjà sous la forme d’un mets très rustique, mais très apprécié, dès l’époque de Boson, fondateur du royaume d’Arles (879). Elle semble avoir connu un regain de notoriété au XIIe et au XIIIe siècle, à l’époque des troubadours, Guilhem de Caberstant, Pons de Capdoul et Raimon de Miraval qui, selon la légende, en auraient été fort gourmands. Répandue surtout dans la Provence montagneuse et la plaine plutôt que sur le littoral, la pissaladière demeure actuellement encore un mets très apprécié des Provençaux. Pour 200 grammes de farine : 15 grammes de beurre ; 750 grammes d’oignons moyens ; 1 centilitre d’eau ; 1 centilitre d’huile ; 125 grammes d’olives ; six anchois. Préparer la pâte brisée et la faire cuire dans une tourtière, sans garniture. Simultanément, cuire les oignons à l’eau bouillante salée ; les passer au tamis, les écraser finement et les incorporer à une sauce béchamel ; ajouter les anchois pilés. Recouvrir la pâte du mélange, garnir d’olives dénoyautées, parsemer de petits morceaux de beurre et faire cuire dix minutes au four chaud.
                               
Dr P. SASSIER, Paris.

RAMEQUIN. Mettez dans une casserole un demi-litre de lait et placez sur le feu ; quand il commencera à être chaud, ajoutez petit à petit, et en tournant, environ trois poignées de farine ; tournez jusqu’à ce que votre pâte soit bien liée et sans grumeaux ; ajoutez-y du sel, un morceau de beurre, environ un quart de fromage de gruyère râpé et tournez encore, tant que la pâte n’est pas cuite et le mélange parfait. A ce point, vous retirez du feu et y mêlez trois œufs légèrement battus. Ayez un plat allant au feu, beurrez-le bien, versez-y votre pâte et mettez au four. Au bout de dix minutes, le ramequin doit être levé comme un soufflé, pris partout et ne coulant pas. Servez sans tarder.
                               
Dr Raymond HABAULT, Vierzon.

RILLETTES DE LAPIN. Mettez dans une casserole un poids égal de chair de lapin désossée cru et de la poitrine de porc frais, le tout coupé en dés de même grosseur. Couvrez d’eau. Ajoutez deux carottes et un oignon de grosseur moyenne, une petite gousse d’ail et un bouquet garni. Assaisonnez de sel, poivre et épices. Cuisez doucement pendant huit heures (quatre heures la casserole couverte, et quatre heures à découvert). Égouttez la viande et hachez-la. Remettez-la sur le feu, en la mouillant avec le jus de cuisson restant. Remuez le tout sur le feu, jusqu’à ce que le mélange soit parfait. Rectifiez l’assaisonnement, si c’est nécessaire. Mettez en petites terrines.

Dr HEYNEN, Bruxelles.

SARDINES MARINÉES AU VIN BLANC. Lever avec soin les filets des sardines en enlevant la tête, la queue et toutes les arêtes. Mettre ces filets par couches dans un plat creux allant au four, en interposant des rondelles d’oignons et de citron ; noyer dans vin blanc et cuire doucement à petit feu. Une fois cuits, égoutter les filets qui peuvent être mangés réchauffés ou froids, avec huile d’olive et jus de citron. Hors-d’œuvre simple et digeste pouvant se garder plusieurs jours.

Dr P.-C. COMTE, Tunis.

ZAKOUSKI BOLCHEVICK. Ajoutez à deux foies de volaille, légèrement roidis au beurre (ou grillés) et hachés finement, une pomme de reinette crue, épépinée, mais avec la peau ; y incorporer soigneusement une cuillerée à soupe de beurre frais et un jaune d’œuf dur. Tartiner sur une biscotte.
                               
Dr Jeanne TIXIER, Bayeux.


POISSONS, CRUSTACES, MOLLUSQUES

A) POISSONS DE MER ET DE RIVIÈRE, BOUILLABAISSES, BOURRIDES, BRANDADES, PAUCHOUSES


BONITE A L’ESCABÉCHE. A l’époque de la pêche à la bonite, les femmes du littoral de nos pays (Algérie) s’empressent de préparer ce plat ; elles en emplissent soupières et saladiers. Femme, mari et enfants mangent à toute heure une tranche de pain puis une tranche de bonite ; tout le monde se régale et la ménagère, toute une semaine durant, ne s’occupe pas des repas.

Pour un kilo de tranches de bonite : 2 décilitres d’huile, un gros oignon, deux grosses gousses d’ail piquées de clous de girofle, une pincée de sel, un piment de Cayenne, du poivre rouge, quelques brindilles de thym, une feuille de laurier, une branche de persil et 2 décilitres de vinaigre à l’estragon (estragon sauvage, poussant dans les rochers et différent de celui ordinairement utilisé en cuisine). Couper les bonites en tranches de 3 centimètres d’épaisseur, les rouler dans la farine et les frire à l’huile brûlante. Aussitôt cuites les retirer et les entasser dans un saladier. Mettre dans l’huile qui reste un oignon gros comme le poing, hâché menu et le faire roussir à petit feu ; une fois cuit, l’assaisonner de sel, poivre rouge, thym, laurier, persil, deux gousses d’ail piquées de clous de girofle, un piment de Cayenne, 2 décilitres de vinaigre à l’estragon ; faire bouillir le tout un quart d’heure, sans trop laisser réduire la sauce ; la verser sur les tranches de bonite de façon à les recouvrir entièrement. Se conserve une longue semaine et se mange froid ou chaud (lorsqu’on vient de le préparer).

Dsse OLIVIER-FAUCHIER, Francis-Garnier, Algérie.

LES BOUILLABAISSES. La bouillabaisse, ça n’est pas comme une formule du Codex, invariable de Lille à Montpellier. La bouillabaisse : mais c’est comme la femme ! Celui-ci la veut blonde et potelée à la Rubens, celui-là préfère la brune aux grands yeux noirs ou la rousse aux lourds cheveux chargés de reflets. Femme vertueuse ou femme « canaille », c’est-à-dire bouillabaisse sans « l’assent », ou, au contraire, chargée en oignons, aulx, thym, fenouil, laurier, sans oublier les autres épices et le safran ; lesquelles masquent souvent la pauvreté ou la rareté des poissons, car savez-vous que pour préparer une bouillabaisse « vraie de vraie » il faut un lot de poissons peu ordinaires ?

Je cite : langouste-rascasse (dont deux espèces vivant en Méditerranée) ; le rouget, dit « coq de mer », à la chair ferme et de bon goût ; la vive, chair délicate, mais gare aux épines redoutables ! le roucau, élégant, agile, au dos bleu et reflets verdâtres ; le Saint-Pierre, si curieux ; le congre, anguille de mer ; la baudroie, dite diable de mer, à la tête énorme, corps disgracieux ; le loup ; le merlan ; les crabes qu’il faut savoir broyer et ne pas mépriser. Enfin, sachons que les parfums si spéciaux de la bouillabaisse proviennent surtout des rascasses, des girelles aux belles couleurs, rouge écarlate, bleu turquoise, violet ; des langoustines… et aussi du safran, celui-là même qui est mis à tant de sauces : elixir de Garus, liqueur irlandaise d’Hacubac, stimulant général et emménagogue.

Je ne vous ai pas énuméré cette longue série de poissons pour vous décourager de la préparation et pour me punir de ne pas vous avoir livré la recette. J’ai simplement voulu vous faire voir qu’il y a bouillabaisse et bouillabaisse !
                               
Dr Louis CAMOUS, Nice.

BOUILLABAISSE. Les poissons qu’on doit employer sont : lei peis de roco (poissons de rocher), à chair ferme, notamment la rascasse (scorpène), sans elle pas de bouillabaisse, le rouquier, la galinette (trigle), la baudroie (lophie), le Saint-Pierre, la murène et cinq petits crabes, dits « favouilles », à Marseille et à Toulon. On utilisera des girelles et des sarrans ou serrans qui, de moindre dimension, seront, après cuisson, pilés ou écrasés, et passés au tamis et serviront à lier la sauce. Il faut 1 kg. 500 de poisson pour cinq personnes ; on coupe les gros par tronçons de 5 à 6 centimètres qu’on place dans une casserole en terre assez large, avec le contenu d’une petit boîte de safran (de 1 fr. 50), poivre et sel ; on hache un oignon, deux blancs de poireaux, deux tomates, une poignée de persil, une feuille de laurier, un zeste d’orange, trois gousses d’ail, une pincée d’herbes aromatiques (sariette) ; on verse un demi-verre d’huile d’olive, en imprimant à la casserole de lents mouvements giratoires pendant quelques minutes pour bien en imbiber le poisson. On ajoute de l’eau qu’on a fait bouillir, juste ce qu’il faut pour recouvrir le tout, et on laisse cuire pendant un quart d’heure. On dispose ensuite les poissons dans un plat et on verse le bouillon, augmenté du menu fretin écrasé et passé sur des tranches de pain d’un centimètre d’épaisseur, en maintenant chaud le poisson et le bouillon.

Voilà le plat provençal qui jouit d’une réputation universelle. Avec l’hymne national, il a porté partout le renom de Marseille. On ne doit pas en laisser altérer la composition. Si, par condescendance, on permet d’y introduire, tantôt du merlan, tantôt des langoustes, on ébranle une institution séculaire et on tombe dans l’anarchie culinaire, la pire de toutes. Toutefois j’accepte un amendement qui consiste à joindre aux poissons un crustacé qu’on trouve au cours de l’été, que les savants nomment scyllarus aretus et le public « cigales de mer ». Il ne dépasse pas de beaucoup 15 centimètres de longueur et il faut le prendre aussi dans la fleur de l’âge. Il a un fumet particulier qui ne domine pas tout d’une forte odeur, il est modeste, discret et a été adopté par nombre de gourmets friands de frutti di mare. Comme il n’est admis que pour son parfum, deux ou trois cigalons suffisent pour cinq convives. On les met dans la casserole en même temps que les rascasses, dont il faut au moins deux. Avoir soin aussi de faire une liaison de jaune d’œuf délayée d’un peu de bouillon tiède avant de servir, pour adopter le procédé cher aux pêcheurs du Grau d’Agde, qui ont appelé leur trouvaille « court-bouillon à l’Agathoise ».
                              
 Dr A. MAGNAN, Nice.

BOUILLABAISSE. C’est une soupe de poissons qui conclut une partie de pêche et qui s’appelle « bouillabaisse » (j’en demande pardon aux manes d’Ali-Bab) parce qu’elle bout abaissée, la marmite sur trois galets, tout le monde autour (« bouille-à-bas », basse, à ras de terre). Les cuisiniers se mettent à l’œuvre, vident et nettoyent leurs poissons. Sur un feu de brindilles ou de pommes de pin, puis de branches sèches, une première marmite d’eau est portée à l’ébullition et mise de côté dans le faîtout. Parfois, on fait cuire à l’avance des pommes de terre, à l’eau ou sous la cendre. Ensuite la vraie marmite chauffera un fonds d’huile, dans laquelle on fera revenir les tronçons d’une langouste, coupée vivante, ou les tranches de murène, vivante aussi, si les casiers n’ont rien donné. Ces tronçons bien revenus, on les met de côté pour laisser au fond de la marmite l’huile de leur cuisson et, dans cette huile restée brûlante, on fait faire un tour aux oignons, à l’ail, à l’échalote. Cela fait, sans retirer de la marmite ces aromates frits, on va réaliser le bouillon en jetant sur eux l’eau restée très chaude dans le faitout, après lui avoir ajouté sel, poivre, safran, tomates fraîches coupées, ou purée de tomates de conserve. Ce bouillon cuit très doucement, à petit feu, pour retarder l’ébullition – le parfum de la bouillabaisse se révèle déjà – on fait le point de sel, de poivre, de safran et on attend les premiers gros bouillons. A ce moment précis on jette peu à peu les tronçons de langouste et de murène, puis les petits poissons qui vont subir le feu pour la première fois (congres gris de rocher, murènes, grondaous, pajots, rascasses, sars, Saint-Pierre, chapons, rougets, girelles et grives). L’ébullition se rétablit vite, et vingt minutes après la bouillabaisse est terminée. Elle est trempée dans le faitout garni de tranches minces de pain séchées au feu mais non grillées, retiré avant qu’il ait pris couleur. Les morceaux de poisson sont dégustés en même temps que le bouillon, et parfois que les pommes de terre. Les proportions varient selon le nombre des convives et l’imprévu de la pêche. A Paris, je fais réaliser une excellente bouillabaisse avec homard, congre, lotte, Saint-Pierre ou cabillaud.

Dr G. LEBRET, Paris.

BOUILLABAISSE. Ce qui est indispensable : Une langouste, quelques crabes, de la rascasse et trois ou quatre autres poissons de roche qui sont, en plus de la rascasse déjà nommée : le roucaou, le serran, la galinette, la girelle, le congre, la baudroie, le merlan, la murène, le Saint-Pierre, etc. Pour six personnes, il faut au moins 1 kilogramme de pain. Pour avoir un prix de revient abordable, il faut la faire pour un minimum de six personnes. Le poisson écaillé, vidé et propre, coupez les têtes et les queues, ajouter les pattes et la queue de la langouste, ainsi que les crabes. Placez-les dans un plat. Prenez une casserole, mettez une cuillerée à bouche d’huile d’olive par personne. Hacher finement de gros oignons. Faites roussir. Ajoutez quatre tomates hachées, un bouquet garni (fenouil, persil, laurier), un morceau d’écorce d’orange, deux gousses d’ail, sel, poivre, safran (quatre petits paquets). Rangez dessus votre poisson et faites un peu mariner. Puis arrosez le tout d’eau bouillante (un verre par personne, plus un verre en sus pour la cuisson).

Mettez votre casserole sur un feu très vif et poussez à l’ébullition. Pour être à point, la bouillabaisse doit bouillir de 10 à 15 minutes, pas davantage. Retirez alors votre casserole. Versez le bouillon sur des tranches de pain d’un demi centimètre d’épaisseur que vous aurez préalablement coupés et rangés dans un plat creux (à peu près deux tranches par personne). Dressez votre poisson en évitant de le briser, sur un autre plat et servez. Il est indispensable que la cuisson s’opère rapidement ; c’est une cause sine qua non de réussite. Pour éviter que les poissons se brisent mettre en premier lieu les espèces suivantes : rascasses, congres, murènes, langoustes et crabes. Quelques minutes après : roucaoux, serrans, girelles et poissons blancs. Les vrais amateurs font préalablement bouillir à part les petits poissons ; on les passe ensuite dans un linge ou au tamis et on emploie ce bouillon comme eau pour préparer la bouillabaisse. Cette préparation  lui donne plus de saveur et de velouté et permet de ne présenter sur la table que de belles pièces. Maintenant, si vous n’avez pas le bonheur d’habiter sur les bords de la grande bleue, vous ne mangerez jamais une bouillabaisse parfaite, pour la bonne raison que vous ne trouverez, ni dans l’Océan, ni dans la Manche, tous les poissons requis à cet usage, vous ne pourrez y mettre ni rascasse ni roucaou, ni Saint-Pierre, parce que ces poissons ne voyagent pas.Je vous conseille après de boire un petit vin blanc de Cassis, dont vous me donnerez des nouvelles.

Dr BARBIER DE LA SERRE, Agen.

BOUILLABAISSE A LA MARSEILLAISE. Bases pour six personnes : 4 rascasses ; 1 Saint-Pierre ; 1 baudroie ; 2 rouquiers ; 3 tronçons de congre ; 2 langoustines, coupées en deux sur la longueur ; ½ litre de moules et quelques crabes. Tous très frais ; 1 verre de vin blanc ;  2 oignons ; 2 blancs de poireaux ; 2 tomates concassées ; 3 gousses d’ail ; 1 cuillerée à soupe de safran ; thym, laurier, fenouil, citron, farine.  Émincer les oignons, les blancs de poireaux, les tomates pressées et pelées, faire revenir à l’huile d’olive dans une casserole. Ajouter les poissons tronçonnés ; les sauter et les saupoudrer d’une cuillerée de farine. Ajouter un verre de vin blanc sec, un bouquet garni, une bonne pincée de safran, trois gousses d’ail broyées et les chairs d’un citron, sans écorce ni pépins. Verser sur le poisson assez d’eau chaude pour le couvrir, saler et faire cuire un quart d’heure à feu vif. Le poisson étant cuit, le dresser sur un plat et le tenir au chaud. Passer le bouillon au chinois et le verser sur des tranches de pain de ménage grillées.

Dr A. LOURTAU, Toulouse.

BOUILLABAISSE A LA ROUILLE. 1° La Bouillabaisse (pour six personnes) : Il faut un kilogramme de poissons, la plupart de roche, très frais : rascasse, Saint-Pierre, loup, grondin, langouste, sans oublier les délicieuses cigales de mer et quatre beaux morceaux de merlan ou de bar. Faites-les mariner avec quatre cuillerées de véritable huile d’olive fruitée, une tomate, du persil, un grain d’ail, deux pommes de terre coupées en tranches. Et cela pendant six heures. Après ce temps, à feu vif, le jus de la marinade, faites dorer un oignon, la tomate, l’ail, le persil ; joignez-y les têtes de poissons et saupoudrez de farine. Une fois cette préparation au point, étendez ce jus avec deux tiers d’eau et un tiers de bouillon de bœuf dégraissé ; ajoutez une feuille de laurier, une branche de fenouil, des pommes de terre, un peu de sel, beaucoup de poivre, et tous les poissons. Faites cuire à feu moyen pendant vingt bonnes minutes, jusqu’à cuisson complète de la langouste. Dorez alors ce bouillon que vous recueillez à part, avec du safran jusqu’à teinte d’or jaune. Versez-le sur des tranches de pain grillées des deux faces, en comptant deux tranches de pain par personne, et en évitant de les faire trop épaisses car elles gonfleront beaucoup. Servez très chaud le pain et le bouillon dans la soupière, et, à part et à sec, dans un plat, les beaux morceaux de poissons (langouste, merlan, etc.) et les pommes de terre.

La sauce à la rouille : Faites tremper un piment rouge pendant six heures dans un verre d’eau fraîche. Dans une coupe de bois de pin, pilez le piment avec une gousse d’ail cru, deux foies de poissons, blanchis, autant que possible de dorade, une mince tranche de pomme de terre de la bouillabaisse, couvrez et patientez une heure. Puis étendez ce mélange avec huit à dix fois son volume de bouillon de la bouillabaisse. Remuez bien, filtrez au tamis fin. Servez dans une saucière chaude. On ajoute la rouille à la bouillabaisse par petites cuillerées pour obtenir le « tonus » que l’on désire et qui varie selon les palais. Boire un vin blanc du type du vin de Cassis.

La légende la Rouille :

Elle me fut contée par un vieux pêcheur de Cary. Deïclause, par ses cajoleries attirantes, avaient enflammé l’amour du jeune pêcheur Victor. Mais la fille du Conse de Carro était bien trop gentille femme pour lui, simple salarié du patron Guilhem. L’histoire fut banale, brutale comme toujours. Un soir pourpre de soleil couchant, sur la mer violette, Elle s’élança dans la galère capitane de la flotte massilienne. Or, à ce moment, près du port, Victor faisait une bouillabaisse qu’il rêvait de manger avec Elle : les fiasques de vin de Cassis étaient au frais sous la carène de la vague ; le pêcheur avait mis tout son art dans la composition du plat national, et tandis qu’à genoux devant le foyer il surveillait le deuxième bouillon de la soupe divine, Elle passa, fière, aux côtés de l’élu. Victor tendit les bras à la forme blanche qui le narguait encore sur la proue du navire. Dans l’air salé un rire d’argent sonna clair : « Tiens, ami, mange ta bouillabaisse et oublie-moi !... » A ses pieds, comme devant un chien que son maître abandonne, tombèrent deux piments rouges et un foie de poisson que la belle lui jetait, du haut pont, tandis que s’éloignait la galère. Mais la main aimée avait touché ce détritus des repas du bord : plus douce que le cœur sauvage elle y laissa, pour le désespéré, un peu du parfum chéri… Alors, malgré ses larmes, il le recueillit, l’accommoda comme elle, par ironie, le lui avait enseigné… Bonnes gens qui appréciez la Rouille, pensez en la dégustant que c’est le dernier parfum d’un rêve, le goût amer d’un amour brisé, mais aussi la force revigorante de la rupture d’un lien, la liberté neuve d’actions redevenues possibles… Et méditez…

Dr Charles VINCENTI, Avignon.

BOURRIDE. Mets provençal qui est une sorte de bouillabaisse liée à l’aïoli. Prendre deux gros merlans, trois rascasses, une belle daurade, quatre ou cinq rougets, une baudroie, un Saint-Pierre, deux langoustes. Couper ces poissons en tronçons, les mettre dans une casserole large dont le fond aura été garni avec oignon émincé, thym, fenouil, laurier, zeste d’orange séché. Couvrir d’eau bouillante, saler, poivrer et faire cuire dix minutes à gros bouillon.  Ranger sur un plat creux des tranches de pain d’un centimètre d’épaisseur, les humecter d’un peu de bouillon de poisson. Mettre dans une autre casserole deux cuillerées d’aïoli et un jaune d’œuf par convive. Passer dessus, petit à petit, le bouillon en tournant avec le fouet. Poser la casserole sur un feu très doux et faire prendre comme une crème, sans cesser de remuer et en évitant l’ébullition. Quand la préparation est épaisse et qu’elle masque la cuiller, la verser de suite sur les tranches de pain. L’usage habituel, en Provence, est de dresser les morceaux de poisson sur un plat, puis de servir la soupe en même temps. La bourride, comme la bouillabaisse, est un mélange de poisson et de soleil !

Dr BEAUCHARD, Saint-Aignan-sur-Cher.

BOURRIDE. Couper en tronçons une demi-baudroie, un loup, un demi-merlan (à noter que sur les bords de l’étang de Berre on fait avec des muges de fameuses bourrides). Mettez les poissons dans une casserole avec oignon, thym, fenouil laurier, écorces d’orange ; mouillez avec de l’eau, salez, poivrez, laissez cuire douze à quinze minutes. Pendant ce temps, coupez dix à douze tranches de pain, assez épaisses, un bon centimètre et rangez-les dans un légumier. Le poisson cuit, retirez-le de côté et imbibez les tranches de pain de son bouillon. Vous avez préparé auparavant l’aïoli, à raison de deux grandes cuillerées par convive, ajoutez à cet aïoli un jaune d’œuf par personne. Versez dedans, en le passant, le bouillon de poisson, une fois bien délayé, mettez-le dans une casserole et avec une cuiller en bois, remuez sur feu doux jusqu’à ce que ça commence à épaissir en masquant le bois de la cuiller et sans laisser bouillir. A ce moment arrosez les tranches de pain. Dressez le poisson sur un plat à part et faites-le passer en même temps qu’une saucière d’aïoli.

Dr FRANÇOIS, Marseille.

BOURRIDE DE BAUDROIE A LA MODE DE SÈTE. Hachez finement ensemble : salade, poivrons, céleri, carottes, oignons, persil et ail ; faites revenir à la casserole avec un peu d’huile ; y jeter la baudroie coupée en morceaux et ne pas trop laisser roussir. Ajouter un peu d’eau, le poisson en rendant toujours ; il vaut mieux en ajouter ensuite, si c’est nécessaire. Saler et poivrer, ajouter un peu de laurier et de thym. Laisser cuire une vingtaine de minutes. Au moment de servir faire une liaison avec un jaune d’œuf monté à l’huile.

Dr A. LOURTAU, Toulouse.

DAURADE SAINT-LAURENT. Choisissez une belle daurade fraîche d’au moins 500 grammes et videz-la. Pratiquez quelques incisions parallèles de chaque côté. Salez discrètement. Garnissez l’intérieur de ce poisson d’un bouquet fait avec quelques brins de thym, de persil, de fenouil, de basilic, de cerfeuil et d’une feuille de laurier. Faites tremper quelques minutes le poisson ainsi préparé dans un peu d’huile d’olive mélangée de chapelure. Préparez une bonne braise avec des sarments de vigne ; interposez entre le gril et le poisson quelques tiges de fenouil. Laissez cuire à grand feu. Pendant la cuisson, sans arrêt, au moyen d’un petit bouquet de thym et de fenouil, arrosez doucement les deux faces de votre daurade. Au moment de servir, enlevez le bouquet garni enfermé dans le ventre du poisson. Dressez la daurade sur un lit de fenouil orné de branches de céleri et de copeaux de beurre frais.

Dr BOURGIN, Soctrang (Cochinchine).

LAMPROIE A LA MODE DE BORDEAUX. Cette façon de préparer la lamproie est très en vogue à Bordeaux. C’est en somme une façon de matelote mouillée au vin rouge et qui comporte une garniture de blancs de poireaux coupés en tronçons réguliers. On prépare ainsi cette matelote : Saignez les lamproies. Réservez le sang qu’elles auront rendu pour, en dernier lieu, lier la sauce. Échaudez les poissons et en enlever la peau en les raclant. Retirer le nerf central des poissons, ce que l’on fera en opérant de la façon suivante : coupez le bout de la queue du poisson ; faites une incision autour du cou, au-dessous des ouïes, et, par cette ouverture, saisir le nerf avec un linge et l’enlever en tirant dessus. Détaillez les poissons en tronçons de 6 à 7 centimètres. Mettez ces tronçons, placés bien à plat, dans une casserole à rebords peu élevés, beurrée, foncée de deux oignons et de deux carottes émincées. Mettez un fort bouquet garni au milieu de poisson ainsi qu’une ou deux gousses d’ail. Assaisonnez ; mouillez de vin rouge en quantité suffisante pour couvrir le poisson. Cuisez vivement, la casserole couverte, pendant dix minutes. Égouttez les morceaux de poisson ; les remettre dans la casserole en les alternant avec des blancs de poireaux, longs de 5 à 6 centimètres, et que, d’autre part, on aura légèrement fait revenir au beurre avec quatre cuillerées de jambon cru coupé en dés. Avec la cuisson de la lamproie, passée à la passoire fine. Mouillez un roux blond, fait de beurre et de farine. Cuisez cette sauce pendant douze minutes et passez-là. Versez cette sauce sur la lamproie et les poireaux. Cuisez, à chaleur douce et la casserole couverte, pendant quinze minutes. Prenez la lamproie et les poireaux dans un plat creux. Versez dessus la sauce que vous aurez liée avec le sang mis en réserve. Entourez de croûtons frits au beurre.
                               
Dr Ernest MONTAGNÉ, Bordeaux.

SOUFFLÉ DE MERLAN. Lever les filets d’un merlan de 200 à 300 grammes. Faire avec les arêtes et la tête un fumet. (Mettre l’arête dans une petite casserole ; mouiller de 1 décilitre d’eau ; ajouter une pincée de sel, un brin minuscule de thym, un fragment de feuille de laurier et une goutte de jus de citron ; faire bouillir six à huit minutes. Passer à la mousseline). Mettre les filets dans une plaque légèrement beurrée mouiller avec le fumet, saler ; faire cuire cinq à six minutes au four. Laisser refroidir les filets de merlan, les passer au tamis fin, ajouter à la purée une cuillerée de sauce blanche spéciale faite avec le fumet de cuisson et un jaune d’œuf. Mélanger et assaisonner et, au dernier moment, ajouter un blanc d’œuf fouetté très ferme. Remplir une timbale en métal (ou une casserole en porcelaine), beurrée et faire cuire de huit à douze minutes à feu modéré. Servir sans attendre.
                               
Dr BARBIER DE LA SERRE, Agen.

MORUE A LA PROVENÇALE. La morue étant bien dessalée, placez-la à sec, dans une casserole fermée sur la cuisinière, à feu modéré. Après quelques minutes, jetez l’eau que la morue aura rendue en abondance. Refermez la casserole et recommencez deux fois l’opération. Quand la morue ne jette plus d’eau, elle est cuite, tendre et jamais sèche ni filandreuse. Partagez en minces filets le poisson cuit comme ci-dessus ; mettez les morceaux dans une casserole où vous aurez déjà déposé du beurre, du persil, un peu d’ail haché, du poivre ; du sel et une douzaine d’olives. Faites cuire doucement une bonne demi-heure, ajoutez un jus de citron et arrosez, au moment de servir de deux à trois cuillerées de fine huile d’olive.
                               
Dr Raymond HABAULT, Vierzon,

MORUE AU GRATIN A LA MARSEILLAISE. Couper la morue en carrés, la faire blanchir et égoutter ; la passer dans du lait et la rouler dans la farine ; la faire dorer dans un peu de beurre et d’huile ; la dresser dans un plat, l’entourer de moules et de champignons. Verser dessus une sauce béchamel et faire gratiner au four.

Dr FRANÇOIS, Marseille.

MORUE (SOUFFLÉ DE). Piler finement 250 grammes de morue fraîchement cuite et effeuillée, ajouter petit à petit quatre cuillerées de béchamel très épaisse (on peut employer un reste de brandade à laquelle on ajoute la béchamel). Chauffer la pâte dans une casserole, ajoutez six jaunes d’œufs, puis huit blancs en neige très ferme. Mettre au four douze à quinze minutes. La composition doit doubler de volume ; servir aussitôt.

Dr FRANÇOIS, Marseille.

LA BRANDADE DE MORUE. La brandade, que Thiers appelait un peu ironiquement, un peu malicieusement, un chef-d’œuvre du genre humain, était peu appréciée de Mme  Thiers qui, entre autres bonnes raisons, l’interdisait à son époux pour ménager son estomac. L’historien Mignet se fit le complice de son ami pour tromper la vigilance de son épouse, d’autant plus qu’il en était fort amateur lui-même. Pour ce faire, il arrivait chez Thiers avec un volumineux paquet sous le bras. Ils prétendaient avoir à travailler dans le bureau où ils défaisaient le paquet et se délectaient tous deux d’une bonne, blanche et odorante brandade… Préparation : La morue mise à l’eau froide est près de bouillir, on l’écume, et on la met loin du feu. On la couvre dix minutes, on l’égoutte et on l’épluche très bien. Elle est mise dans une casserole avec un peu d’huile d’olive. La casserole va à feu doux et on tourne une demi-heure. Il faut réduire la morue en bouillie compacte et la mouiller avec du lait chaque fois qu’elle menace de prendre trop de consistance. Prendre ensuite et hacher fin deux truffes, ajouter de l’huile, goutte à goutte, en tournant toujours. Finir en salant et en poivrant fortement. Un peu d’ail pour terminer (l’ail est pourtant facultatif).

Dr FRANÇOIS, Marseille.

MORUE A LA NIÇARDE (ESTOCKFICADE). Tremper le stockfish trois jours à l’eau froide courante, racler, ôter l’arête, puis couper en petits morceaux carrés. « Océan » d’huile fine, « monceau » d’oignons hachés fin, faire revenir dans une casserole, en terre si possible, faire passer un instant le stockfish, ajouter tomates à foison, sel, un nuage de poivre, épices, girofle, muscade, pas un « bouquet garni », mais une « gerbe », une « fascine » d’aromates, thym, laurier, romarin, ail en masse, persil, basilic. Réduire une demi-heure. Un verre de madère. Mouiller d’eau bouillante, ajouter pommes de terre, nouvelles ou non, coupées en tranches épaisses. Couvrir, faire partir, passez au four une heure et demie. Dégraisser légèrement, ajouter olives noires salées et blanchies. Servir chaud.

Dr FRANÇOIS, Marseille.

LE POUPETON. Le poupeton permet d’utiliser les restants d’une bouillabaisse, après le départ des invités qui auraient eu l’inconvenance de ne pas lécher le fond du plat. Ramassez pieusement ce que vous trouverez comme débris de chair des rougets, des rascasses, des Saint-Pierre et autres bestioles marines ; agrémentez ces dépouilles de bribes oubliées de queues de lottes ou des crustacés échappés au ravage. Pilez dans un mortier avec deux cuillerées de crème et trois fois autant d’une panade épaisse cuite dans du lait. Quand le mélange est parfait, vous ajouterez successivement trois jaunes d’œufs, deux cuillerées de parmesan frais râpé, les trois blancs battus en neige, une truffe et un cèpe émincés. Assaisonnez légèrement. Le plus dur est fait. Encore un peu de courage ! Il vous reste à beurrer un moule ; on y verse avec précaution l’appareil ; on porte le tout dans un bain-marie au four et on laissera cuire une demi heure. Le temps révolu, démouler et servir au milieu d’une couronne garance de tomates sautées le plus simplement du monde, à l’huile, dans la poêle. Un Mercurol blanc n’est pas de trop. La recette provient du Rhône inférieur et se déguste dans toute la Provence côtière.

Dr Raymond BOISSIER, Paris.

RASCASSE A LA SUFFREN (CASSOULET DE). Se procurer deux belles rascasses de bonne taille, bien fermes, de 300 à 400 grammes chaque, trois têtes d’ail, deux oignons, de l’huile, strictement d’olive et de l’année, poivre, sel, cumin et persil. Une petite terrine plate, de celles qui servent pour le confit d’oie. Après avoir vidé les poissons, on remplit d’eau fraîche une poissonnière appropriée ; au premier bouillon, on jette dedans les oignons et, trois minutes après, les rascasses. On laisse cuire dix minutes, montre en mains ; on retire sur un égouttoir et, dans un plat, on se met en devoir d’enlever la peau et les arêtes. On dresse alors les filets de poisson sur une assiette et on laisse complètement refroidir. Pendant ce temps, on pile l’ail au mortier. Le travail achevé, on ajoute des morceaux de rascasse que l’on écrase modérément au pilon, en versant le poivre et le cumin pour saupoudrer, et un peu de sel. Dès qu’on a obtenu une masse bien homogène, on place sur un feu vif une poêle à frire où l’on a jeté trois cuillerées à soupe d’huile. Lorsque l’huile chante, on y fait tomber à la fourchette la masse retirée du mortier ; on tourne sur le feu et on fait sauter et dorer. Dans la terrine, préalablement flambée au rhum, on dépose la friture et on tasse très exactement avec une fourchette. On laisse refroidir dans un garde-manger placé dans une cave bien fraîche ; on recouvre d’un bon saindoux (un demi-centimètre) et on garnit de persil. On utilisera ce cassoulet soit le matin, au petit déjeuner, avec des olives et du vin rouge, soit au repas de midi comme entrée. Cette recette, commune sur la côte méditerranéenne, daterait du Bailli de Suffren. Elle est délicieuse.

Dr J. ARONVALD, Ézy.

THON A LA PROVENÇALE. Prendre une tranche de thon frais un peu épaisse, l’arroser légèrement d’huile d’olive, saler, poivrer ; la faire griller sur de la braise de sarments de vigne en la retournant une seule fois. En même temps, faire bouillir dans une casserole un demi-verre de vinaigre de vin avec une feuille de laurier ; quand le vinaigre a diminué de moitié, le verser bouillant sur la tranche de thon et servir sur un plat très chaud.

Dr Gaston-A. MANOUVRIER, Directeur du domaine neuro-psychiâtrique du Pont-du-Cens, près Nantes.

THON A LA BONNE FEMME (ROUELLE DE). Ayez une rouelle de thon, c’est-à-dire une tranche prise sur le milieu du corps du poisson et d’une épaisseur de 6 centimètres (environ 750 grammes en poids). Mettez-la dans une casserole avec de l’eau froide ; faites-la bouillir huit minutes et séchez-la dans un linge. Ensuite, avec quatre cuillerées d’huile, faites-la colorer des deux côtés et retirez-la sur un plat. Dans la même huile, faites blondir légèrement un oignon haché ; ajoutez une forte cuillerée de farine ; cuisez quelques minutes et mouillez avec un demi-litre de vin blanc et bouillon et un demi-verre de vinaigre. Mettez en ébullition, en remuant et ajoutez deux grosses tomates ou trois moyennes pelées, pressées et hachées, un bouquet garni, un grain d’ail écrasé, sel et poivre. Remettez la rouelle dans cette sauce ; couvrez et cuisez doucement, au four de préférence, pendant quarante-cinq minutes. Au moment de servir, dressez la rouelle sur un plat. Ajoutez dans la sauce quatre cornichons hachés (ceux-ci ne doivent pas bouillir dans la sauce, c’est pourquoi ils ne sont mis qu’au moment de servir et hors du feu). Versez la sauce sur le thon ; parsemez dessus une cuillerée de câpres et une pincée de persil.

Dr G. LEBRET, Paris.

TRUITES A LA VALBORGNE. Videz le poisson, salez, épicez légèrement. Parfumez discrètement de laurier, de basilic, ou d’ail, selon votre goût. Bourrez le ventre vide d’une lèche de pain trempée au lait, bien beurrée, roulée dans le persil fin haché, et refermez. Enduisez le poisson de beurre et enveloppez-le en son plein de feuilles de vignes prises aux souches du cagnard de vigne longue. Allongez-le alors dans une gloute de verre. Arrosez-le, qu’il baigne à sa moitié, d’eau coupée de bon vin, deux d’un, un de l’autre. Vous fermez d’une taie de papier huilé, le couvercle par dessus et mettez au four. Surveillez pour retourner une fois. Quand le jus est réduit, les feuilles dorées, vous pouvez servir.

G. de BOUSQUET, à Saint-André-de-Valborgne (Gard).

TRUITES DE L’HÉRAULT FRITES AU LARD. Faire fondre dans une poêle des tranches de lard. Quand le lard est fondu, retirer les lardons et mettre à la place les truites préalablement vidées, lavées et enfarinées. Laisser prendre une belle couleur. Servir avec une décoration faite de quelques branches de persil et de rondelles de citron.

Légende :L’histoire et, peut-être bien, la légende encore plus que l’histoire, prétend que, vers l’an 1002, sous le règne de Robert Ier, des moines, venus d’Aniane, en remontant la vallée de l’Hérault pour se rendre à l’abbaye de Bonheur que venait de fonder H. de Roquefeuil, s’arrêtèrent au pied de l’Aigoual, surpris et ravis par les belles et nombreuses truites qu’ils voyaient nager dans la rivière. Ils s’y fixèrent pour consommer des truites dont ils étaient friands. Ce fut l’origine de Valleraugue ; ce fut aussi celle de la recette, transmise de génération en génération, des truites préparées au lard. Ces moines, en effet, n’ayant pas d’autre assaisonnement à leur disposition, furent les premiers à cuire les truites avec le lard qu’ils allaient quémander chez le paysan.

Dr CAMBESSÉDÈS, Valleraugue (Gard).

TRUITES A LA PACERONATA. Pour quatre personnes : Prendre douze truites de moyenne taille ; les étriper, les saler, les plonger ensuite dans une poêle contenant deux litres de vin rouge de Corte (le vin doit être de la dernière récolte). Jetez sur le tout deux douzaines de piments rouges hachés menus, une dizaine de gousse d’ail et faire cuire à petit feu jusqu’à ce que le liquide soit réduit des trois quarts. Servez chaud. Origine de la Paceronata : Avant l’apparition du phyloxera, le Cortenais n’était qu’un vaste vignoble. La récolte de vin fut coup sur coup si abondante qu’une année on dut jeter quelques milliers d’hectolitres de vin de la récolte précédente dans les eaux glacées de la Restonica. Quelques instant après, c’est par centaines qu’on pouvait ramasser les truites, saoûles comme des Polonais, flottant le ventre en l’air. Quelqu’un s’avisa de faire frire de ces truites dans un bouillon fortement pimenté. La paceronata était inventée.

Dr Xavier POLI, Bastia.

PAUCHOUSE DE LA SAONE. Ceci est un excellent plat régional ; c’est la meurette bourguignonne, mais faite au vin blanc et, pour la réussir à souhait, il faut du poisson, sinon vivant, du moins de toute première fraîcheur et d’espèces variées ; il faut surtout aussi un vin blanc léger et sec (celui dont on dit qu’il a un goût de « pierre à fusil »). On n’obtiendrait rien de bon avec du Graves ou du Sauternes, par exemple. Ces préliminaires connus, voici, pour quatre ou cinq personnes, le modus faciendi : Couper en dés du lard gras ; le faire revenir et prendre couleur dans une bonne cuillerée de beurre. Faire un roux blondi fortement avec une cuillerée de farine. Mouiller d’un tiers d’eau et deux tiers de vin blanc, le tout formant environ 1 litre et demi de liquide. Y mettre cuire six aulx, six oignons moyens pendant une heure et demie environ à feu assez vif. Assaisonner de sel, poivre moulu (il en faut beaucoup et, bien que cela puisse paraître énorme, il n’y en a jamais de trop), épices, trois clous de girofle piqués dans un oignon, bouquet garni.

Pendant que cette cuisson s’achève : 1° Éplucher, vider, nettoyer et couper le poisson, qui doit comporter des espèces à chair ferme : brochet, perche, carpe, d’autres à chair grasse : anguille ou tanche. Y joindre un poisson blanc, chevesne ou rousse (qu’on ne mange généralement pas, mais qui rend le plat plus moelleux) ; 2° Pétrir, pour la liaison de la sauce, une cuillerée de farine avec une bonne cuillerée de beurre frais. Marier le tout et spatuler pour bien incorporer la farine au beurre ; 3° Faire griller des petits croûtons de pain épais d’un doigt et les frotter d’ail. Les ranger alors dans le plat creux où le poisson sera servi.

La sauce étant cuite, comme il est dit plus haut, y mettre le poisson, l’y laisser dix minutes, un quart d’heure au plus, de façon qu’il reste ferme (légère ébullition sous un feu modéré). Le sortir à l’aide d’une écumoire et le poser délicatement sur les croûtons. Tenir au chaud. Enfin, par petites boulettes, incorporer le beurre manié de farine dans la sauce d’où l’on vient de retirer le poisson. Remuer à la cuillère de bois et laisser à peine bouillir (cinq minutes suffisent pour tout cela). Passer à la passoire fine sur le poisson et les croûtons et servir chaud.
                               
Dr Paul BIDAULT, Les Maillys (Côte-d’Or).

PAUCHOUSE DE SAINT-JEAN-DE-LOSNE. Pour 1.000 grammes de poisson, il faut : 250 grammes de beurre manié avec de la farine ; 125 grammes de gros lard ; une poignée de gousses d’ail. On emploie en général trois sortes de poissons dans les suivantes : anguille ou lotte de rivière, brochets, grosses perches, tanches, carpes, barbeau, etc. Coupez le poisson en tronçons (après l’avoir écaillé et vidé). Coupez également le lard en petits carrés ou dés. Mettre d’abord ces dés de lard au fond de la casserole avec la poignée d’ails écrasés (avec le dos d’une fourchette), un bouquet de thym, en été, une branche d’estragon (pas de laurier). Placez sur tout ceci les tronçons de poissons, salez, poivrez (assez) ; mouillez au vin blanc, que cela baigne. Faites partir à gros feu. Au moment où cela bout, mettez, par petites cuillerées, votre beurre manié (cela forme une crème épaisse), agitez la casserole que cela se mélange bien régulièrement (ne vous servez pas de la cuillère, vous casseriez votre poisson). Laissez cuire vingt à vingt-cinq minutes un peu moins fort qu’au début ; dès que le beurre est pris, retirez du plein feu et laissez mijoter sur le coin du fourneau. Coupez de petites flûtes de pain en rondelles, frottez-les avec de l’ail partout et passez-les au beurre dans une poêle. Placez-les au fond d’un plat creux, vos morceaux de poissons en pyramide et la sauce pour arroser le tout. Servir très chaud.
                               
Dr GUICHARD, Saint-Jean-de-Losne.

B) CALMARS, SEICHES, CRUSTACÉS, COQUILLAGES, GRENOUILLES


CALMARS FARCIS. Nettoyer soigneusement des calmars faisant des cornets de 12 à 15 centimètres. Les débarrasser de toute pellicule un peu noire pouvant y adhérer ; enlever tête et pattes, mais en les réservant. Ayant bien vidé les cornets, les remplir de la façon suivante : Mettre dans une petite casserole à fond épais deux oignons hachés grossièrement, les faire revenir au beurre, ajouter deux cuillerées d’eau ; couvrir la casserole et laisser mijoter dix minutes. Tremper un peu de mie de pain dans de l’eau ou du lait froid ; faire cuire un œuf mollet ; hacher les pattes réservées et mélanger le tout. Sel, poivre et persil haché. Remplir les cornets avec cette farce, mais modérément, car elle gonfle un peu. Coudre les cornets. Les mettre dans une cocotte en fonte ou une casserole émaillée épaisse avec trois ou quatre cuillerées de bonne huile d’olive bien chaude ; faire revenir un instant, ajouter quatre gousses d’ail non épluchées, laurier, girofle, deux cuillerées de sauce tomate, rouge et épaisse, un peu de vin blanc si on veut, sel, poivre, un petit morceau de piment ; ajouter deux verres d’eau, laisser mijoter une bonne heure, à couvert et à feu doux. Ajouter à la fin un peu de safran. Ne perd rien à être réchauffé.

Dr NOEL, Paris.

CALMARS ROSES FARCIS. Nettoyer les calmars ; hacher leurs tentacules avec ail, persil ; ajouter chapelure et faire revenir le tout dans une cuillerée d’huile. Garnir de cette farce les poches des calmars. Coudre. Arroser de vin blanc et de beurre. Mettre au four. A mi-cuisson, saler, poivrer, saupoudrer de chapelure.

Dr André TACHERON, Pau.

SEICHE A L’AGATHOISE. Après avoir bien nettoyé la Seiche à l’eau froide jusqu’à ce qu’elle soit bien blanche, préparez un hachis, moitié porc, moitié veau, avec oignon, persil, sel et un jaune d’œuf cru pour le lier. Introduire cette farce dans la poche de la seiche ; coudre l’extrémité de cette poche. Mettre de l’huile d’olive dans une casserole, y faire roussir de l’oignon et du jambon, y mettre assez d’eau pour couvrir la seiche faire bouillir et y déposer alors la seiche avec quelques carottes et des olives noires. Faire cuire quatre heures. Ce plat se prépare ainsi à Agde, petit port de cabotage de l’Hérault.

Dr LAFON, Toulouse.

LA SEICHE AU RIZ. La seiche, céphalopode mou répandu dans toutes les mers, de forme ovale, est reconnaissable à son sépion, ou os de seiche, placé sous la peau du dos et à la sépia, substance noire qu’elle rejette pour troubler l’eau et échapper à l’ennemi. C’est un mets succulent quand la seiche est fraîche et tendre, dont voici une préparation peut-être peu connue et digne des plus fins gourmets. Prendre une seiche bien fraîche, la bien nettoyer, la vider ; peler, faire rendre la sépia, enlever l’os de la seiche ; bien laver. Faire roussir à la poêle des oignons dans de la bonne huile, la seiche découpée en morceaux (pattes et corps). Bien cuire la seiche dans son jus ; un quart d’heure avant de servir, jeter dans la poêle un quart à une demi-livre de riz de première qualité, saler, poivrer et ajouter une pincée de safran qui colore et donne le bon goût à la préparation. Cuire un quart d’heure. On peut servir à part la seiche et le riz, mais chez nous on les présente sur le même plat juteux.

Dr Jean BÉDOS, Agde.

LA LANGOUSTE A LA PROVENÇALE (Recette du pêcheur). Prenez plusieurs langoustes femelles vivantes. Coupez-les en tronçons. Enlevez les œufs et excréments que vous mettrez dans un mortier. Faites roussir dans l’huile d’olive, oignons et tomates hachées. Ajoutez vos morceaux de langouste et laissez revenir. Versez ensuite un peu d’eau (très peu) et assaisonnez convenablement (fenouil, persil, sel, poivre, deux gousses d’ail, une cuillérée à soupe d’eau-de-vie, (si vous voulez). Pendant la cuisson prenez votre mortier ; ajoutez aux œufs de la langouste et aux excréments un jaune d’œuf et montez vigoureusement une mayonnaise. La cuisson terminée, retirez votre casserole du feu, mélangez votre mayonnaise à la sauce des langoustes et servez le tout chaud sur un plat.

Dr BARBIER DE LA SERRE, Agen.

LANGOUSTINES FRITES (QUEUES DE). (Un plat Maltais). A La Valette, les langoustines se vendent mal. Profitons-en, car il en faut une platée de quinze à vingt par convive. Faites-les cuire en les jetant vivantes dans de l’eau de mer bouillante – les crustacés ne donnent pas leur avis sur cette préparation, par pitié pour les cœurs sensibles – une demi-heure. Sortez, égouttez, levez les queues dont vous extrairez – sauf votre respect – le boyau culier. Chaque queue – on dirait une larve de hanneton – est enrobée dans une pâte à frire et jetée dans l’huile. Ce plat n’est pas spécialement recommandé aux dyspeptiques, qui le remplaceront par les langoustines au gratin. Encore un conseil : Si vous le dégustez à Malte, apportez à boire, car le vin de l’île, comme agrément, tient le milieu entre le vitriol et le sulfate de soude. Si les Templiers buvaient sec, je plains les chevaliers de l’Ordre.

Dr Raymond BOISSIER, Paris.

ÉCREVISSES DE LA HAUTE VALLÉE DE L’HÉRAULT SAUCE PIQUANTE. Pour une centaine d’écrevisses, mettre à blondir un gros oignon haché très fin dans 250 grammes de beurre ; ajouter quatre belles tomates pelées et débarrassées de leurs pépins, trois quarts de litre de vin blanc, trois cuillerées à soupe de farine, une pincée de safran, de sel, de poivre et de kary. Après vingt minutes de cuisson, passer au tamis, remettre sur le feu ; à l’ébullition y plonger les écrevisses vivantes (après un nettoyage soigné). Laisser cuire quinze à vingt minutes, verser dans un plat et servir chaud.

Dr CAMBESSÉDÈS, Valleraugue.

MOULES A LA PROVENÇALE (PILAU DE). Faites ouvrir un litre et demi de moules dans un peu d’eau, oignons, carottes coupées en rondelles, bouquet garni. Décoquiller les moules dès qu’elles sont ouvertes ; passer soigneusement le jus et le réserver. Mettre, d’autre part, dans une casserole de cuivre ou mieux dans un poêlon en terre, deux à trois cuillerées d’huile d’olive et quantité égale de beurre, y faire revenir le blanc d’un poireau et deux ou trois tomates, le tout finement haché. Puis ajoutez 300 grammes de riz que vous laissez bien s’imprégner en remuant avec une fourchette. Alors ajoutez l’eau des moules, en complétant avec de l’eau ordinaire pour avoir la quantité nécessaire à la cuisson. N’oubliez pas les proportions qui sont : deux bols de liquide pour un bol de riz. Vous ajoutez les moules, environ une demi-cuillerée de safran, mélangez le tout après avoir salé et poivré ; laissez cuire à couvert environ vingt minutes. Surveillez et rappelez-vous ceci : Il faut que tout le liquide ait été absorbé pour que le riz soit cuit, alors il commence à s’y former des trous. Laissez sécher quelques minutes au bord du fourneau, ou si vous voulez fignoler, versez dans un moule à charlotte dûment beurré que vous laisserez attendre huit à dix minutes et vous démoulerez sur un plat chaud. Pour accompagner ce pilau, je vous recommande tout particulièrement un vin blanc des Côtes du Rhône, vraiment charmant, le Mercurol.
                               
Dr T. MALACHOWSKI, Paris.

ESCARGOTS A LA FAÇON DES PÊCHEURS DE LUNE. (Cacalauso à la Piscaluna.) Faire jeuner les escargots au moins quinze jours avant de les préparer. Les laver à grande eau puis les faire bouillir à l’eau salée, d’abord trente minutes à petit feu, puis autant à gros bouillons. Égouttez et jetez cette eau. Retirez les escargots des coquilles, enlevez le petit boyau amer et recoquillez avec quelques gouttes d’huile d’olive. Plongez les escargots dans un court-bouillon bouillant, assaisonné de sel, poivre, laurier, fenouil, menthe, thym, eau-de-vie, et laissez cuire trois heures. Concentrer une partie de la cuisson et y ajouter quatre à cinq morceaux d’ail, pilé avec deux anchois, des noix, des échaudés (petits gâteaux à l’anis) ou, à défaut, de la mie de pain rassis. Mélangez vivement à grand feu, à la spatule, et finalement, lier avec un jaune d’œuf. Mettre cette sauce sur les escargots dans une sauteuse, faire sauter pour faire pénétrer la sauce dans les coquilles. On sert également les escargots nappés de la sauce sans les recoquiller.Cette recette d’escargots est très en vogue dans la région de Lunel ; on sait que cette ville porte dans ses armes l’image de Séléné.

Dr CHUCHE, Paris.

ESCARGOTS A L’AGATHOISE (OU CAGOULAT). Laver les escargots à cinq ou six eaux successives, légèrement vinaigrées. Les cuire dans de l’eau aromatisée de thym, laurier, persil, sel et poivre. Après trois heures de cuisson, les escargots sont cuits ; égouttez-les soigneusement. Pendant ce temps, vous avez préparé ce qui suit (pour cent escargots) : cent vingt-cinq noix mondées, une brioche, un anchois, une tête d’ail, du persil et une branche de menthe. Laissez cuire le tout ensemble pour obtenir une sauce bien liée avec un peu d’huile d’olive ; ajouter ensuite 25 grammes de jambon cru, haché et rissolé. Mettre les escargots égouttés dans cette sauce, avec leurs coquilles et laissez cuire doucement une heure, en éclaircissant la sauce avec du vin blanc dit Picpoul. Au moment de servir, montez à part deux ou trois jaunes d’œufs avec un verre de la cuisson des escargots, en mélangeant bien. Servez

Dr LAFON, Toulouse.

GRENOUILLES AU BLANC. Écorcher les grenouilles, les faire dégorger une heure dans de l’eau fraîche, les couper (c’est-à-dire enlever les pattes de devant et une partie du corps). Les faire sécher dans un linge. Mettre un bon morceau de beurre frais dans une casserole, le faire fondre y jeter les grenouilles et les faire sauter dans le beurre ; les saupoudrer avec un peu de farine, sel, à peine, poivre encore moins (en cuisine diététique). Les couvrir, les laisser cuire. Délayer dans de la crème un jaune d’œuf avec une pincée de fécule, remuer, mettre dans la casserole des grenouilles, faire prendre la sauce. Petit hachis de persil par dessus.

Dr FRANÇOIS, Marseille.


VIANDES DE BOUCHERIE, ABATS, CASSOULETS, COUSCOUS, DAFINA, RIZ A L’ESPAGNOLE

A) BŒUF


BŒUF A L’ANCHOIS. Historique. – Depuis mon installation à Beaucaire, j’ai constaté que, dans les vieilles familles autochtones, on appréciait un mets particulier, le « Bœuf à l’Anchois ». Les recettes que je me procurais présentaient de grandes divergences ; il s’agissait d’une sorte de sauce piquante. Des relations familiales m’ont mis en rapport avec Mme C… dont les quatre-vingt-cinq ans n’ont altéré ni l’entrain, ni la mémoire ; cette dame, petite-fille d’un hôtelier de Beaucaire m’a raconté ceci : Mon grand-père était propriétaire depuis plusieurs générations d’un hôtel situé près du Rhône, surtout fréquenté par les bateliers et, en particulier, par les conducteurs de radeaux de bois qui, autrefois, flottaient nombreux sur le fleuve. Ces mariniers appréciaient fort la spécialité de la maison, le bœuf à l’anchois, qu’ils appelaient la « grillade », bien que le gril ne joue aucun rôle dans cette préparation. Quelques gourmets d’Arles, Nîmes et d’Avignon connaissaient aussi cette spécialité et, de temps à autre, venaient la savourer. Mon grand-père avait abandonné son établissement qui fut repris par des étrangers au pays. La foire de Beaucaire n’attire plus personne, les radeaux ne flottent plus, les bateliers ne s’arrêtent plus ici et cette ancienne recette fut dédaignée par les multiples successeurs de ma famille, mais moi, je ne l’ai pas oubliée. Napoléon l’a peut-être goûtée lors du fameux souper de Beaucaire :

Couper dans la cuisse de bœuf des tranches minces (200 grammes par personne) faire macérer pendant huit à dix heures dans une marinade aromatique. Le lendemain, placer dans un poêlon, par couches successives, ail haché, viande, oignons grossièrement hachés, de façon qu’il y ait huit à dix couches de chaque chose. Saler, poivrer, mouiller avec le vinaigre ; faire cuire à couvert pendant deux heures, ajouter alors des câpres hachées (une à deux cuillerées par personne), faire cuire encore pendant deux heures, puis mouiller avec de l’eau, lier à la farine et ajouter un demi anchois pilé par personne. Laisser mijoter quelques minutes et, au moment de servir, arroser avec un peu d’huile d’olive vierge. Ce plat est d’autant meilleur qu’il est préparé pour un plus grand nombre de convives. Réchauffé le lendemain, ce plat ne perd aucune de ses qualités, au contraire.

Dr J. MARTIN, Beaucaire.

BŒUF MARINIÈRE. Plat cuisiné par les mariniers sur leurs péniches naviguant sur la Saône et les canaux. Dans le fond d’une cocotte de fonte, mettez des bandes de lard gras de la longueur et de la largeur d’un doigt, un petit lit d’oignons hachés fins et des tranches de bœuf prises dans la cuisse ou le paleron. Puis recommencez : bandes de lard, lit d’oignons, tranches de bœuf, et ainsi de suite. Salez, poivrez et arrosez avec deux verres de vin blanc, ajoutez laurier, thym, couvrez bien et mettez au four chaud deux à trois heures suivant quantités.

Dr GUICHARD, Saint-Jean-de-Losne.

GRILLADE DE BŒUF A LA MARINIÈRE. Prendre une tranche de faux-filet épaisse comme deux doigts. Mariner un jour ou deux avec vinaigrette, bouquet garni, cognac. Mettre un morceau de beurre dans la poêle et en garnir le fond avec de gros oignons coupés en tranches. Mettre la tranche de viande et la marinade par dessus. Puis recouvrir le tout avec des oignons. Laisser cuire le tout très doucement jusqu’à ce que l’oignon soit bien roussi et fondu ; environ trois quarts d’heure. Ajouter alors du bon vin rouge, en couvrant la viande et laisser cuire ainsi une heure. Servir dans le plat, avec de petits morceaux de beurre frais et un peu de persil haché sur chaque tranche. Cette grillade s’accompagne bien d’un Châteauneuf du Pape, mais surtout d’un bon vin de Côte Rôtie, où l’on retrouve la saveur de l’abricot, autre gloire d’Ampuis.

Dr Camille BADIN, Lyon.

RECETTE DE LA GRILLADE DES MARINIERS DU RHÔNE Prendre 1 kilogramme de bœuf, en deux tranches, épaisseur de trois doigts. Faire mariner vingt-quatre heures (avec poivre et sel, huile, vinaigre, bouquet garni, cognac). Garnir le fond d’une poêle de tranches d’oignon et de petits morceaux de lard, y mettre la viande, sans la marinade. Faire légèrement dorer, puis ajouter la marinade. Faire réduire. Mouiller avec une bouteille de Côte-Rôtie, d’Hermitage ou de Bourgogne, ou de bon vin rouge vieux. Ajouter doucement, pour ne pas refroidir. Mettre un bouquet garni, deux clous de girofle, laisser mijoter trois heures, couvert, en bouillant tout doucement. Amener la sauce au point voulu en faisant réduire. Mettre sur la viande un gros morceau de beurre frais et du persil haché, au moment de servir.

Dr FRÉCON, Vienne (Isère).


SONNET DE LA GRILLADE DES MARINIERS DU RHONE

                De Condrieu, jadis, ils partaient dès l’enfance,
                Les mariniers du Rhône, heureux sur leurs bateaux,
                Toujours gais et remplis de belle insouciance !
                Le Royaume et l’Empire étalaient leurs coteaux.

                Ils longeaient les cités, vrais joyaux de la France,
                Lyon, Vienne, Avignon, pour citer les plus beaux ;
                Ils s’arrêtaient le soir, prêts à faire bombance,
                A l’escale accueillante et riche en vins nouveaux.

                A table, sur le pont, ils fêtaient la grillade
                Épicée et fumante, et toute galéjade
                Éveillait à l’entour et la joie et les ris.

                Ces temps-là sont passés, la vie était joyeuse,
                Mais la grillade reste, elle est encor fameuse :
                Vrai régal des gourmets connaisseurs et ravis !

Dr FRÉCON, Vienne (Isère).

DAUBE. Voici un plat ancien que l’on faisait chez mes parents, quand le vertige de la vitesse n’avait pas gagné les cuisinières et quand le cordon bleu ne rendait pas son tablier à la moindre observation. Achetez 1 kilogramme de bœuf, pris dans le gîte à la noix. Découpez-le en morceaux réguliers et de bon aloi. Au fond d’une daubière, une daubière en cuivre rutilant, comme on n’en voit plus que dans les auberges de campagne, mettez, parmi le saindoux et l’huile d’olive, 100 grammes de lard maigre, en dés, quatre oignons coupés en quartiers et un autre piqué d’un clou de girofle, deux carottes, deux tomates, dix gousses d’ail, le bouquet et quelques grains de poivre. Sur ce lit d’aromes et de fumet, couchez douillettement un pied de veau et les morceaux de bœuf. Couvrez le tout d’un bon vin rouge (ah ! si vous aviez du Beaune !), fermez votre daubière, faites bouillir pour exprimer les essences de cette symphonie, puis laissez mijoter pendant six heures. Bien entendu, la daubière doit cuire feu dessus, feu dessous. La garniture de la daube comporte le macaroni, que vous préparez économiquement avec le fonds de votre daube. Et, comme vin, un vieux Pommard de derrière les fagots !

Dr Maurice CHARENTON, Paris.


B) VEAU


ESCALOPE A LA TITA-RUFFO (PLAT LIGURE). Il y avait une fois un cuisinier gênois que les hasards de la guerre avaient amené, sans qu’il sût pourquoi ni comment, sur les bords de la Vesle, dans la fière cité des sacres, dans Reims glorieuse et mutilée. Il s’y fixa et y devint un restaurateur  achalandé, mais le souvenir de la Gênes des Doges et des palais le poursuivait encore inexorablement, et sa cuisine s’en ressentait. Il avait conservé de l’Italie natale le goût des tranches de viande minces comme un portefeuille en temps de crise, dures comme un cœur de policier et sèches comme le gosier d’un Américain moyen. Un jour cependant, pour m’amadouer, il me servit – ô cher signor Torta – cette escalope à la Tita-Ruffo qui, en l’honneur d’un musicien, n’était pourtant pas aux Soissons… Procurez-vous, pour préparer ce plat, une mince escalope, une lichette de jambon de Parme qui ne pue pas le suif (c’est plus difficile qu’on ne pense !), un œuf et un cure-dents vierge, un cure-dents en bois, s’entend. Faites revenir l’escalope au beurre, dans la poêle, quand elle est au point, non durcie, vous fixez sur l’escalope le jambon à l’aide du cure-dents, ce qui explique pourquoi il vaut mieux en prendre un tout neuf… Remettez à la poêle ; à ce moment cassez votre œuf sur le jambon, laissez cuire, assaisonnez et servez chaud. Comme accompagnement, des courgettes, des aubergines et des tomates, sautées au beurre. Comme vin, en souvenir de la double origine de ce plat, vous aurez le choix entre le vin de Bouzy – triomphe de la Champagne – et un Nébiolo généreux.
                               
Dr Raymond BOISSIER, Paris.


C) MOUTON, AGNEAU, CABRI

LE QUARTIER D’AGNEAU A LA SAUCE LÉZAT. La Sauce Lézat, qui, comme toute sauce languedocienne qui se respecte, est parfumée à l’ail, s’emploie pour condimenter et parfumer les viandes qui sont de nature un peu fade, et notamment l’agneau rôti, le chevreau ou le lapin de clapier rôtis. Cette sauce-condiment fut inventée, il y a quelque quatre-vingts ans par M. Toussaint-Lézat qui, en même temps qu’ingénieur civil, était un parfait gastronome. Aussi, dans quelques vieilles familles de Toulouse ou de Luchon, celles dans lesquelles vivait M. Lézat, a-t-on conservé et exécute-t-on encore bien souvent quelques-unes des recettes qu’avait imaginées cet excellent homme. C’est lui qui a construit de ses propres main, et sur place même, un magnifique plan en relief du massif pyrénéen, plan que l’on peut voir encore exposé dans une grande salle du Casino de Luchon et qui est une œuvre de grande envergure. M. Lézat avait aussi inventé et construit lui-même divers ustensiles de cuisine des plus pratiques, ustensiles qui pourraient servir de modèles aux fabricants d’outillage culinaire d’aujourd’hui.

Voici la recette de cette sauce fleurant bon l’ail : Tout d’abord, il faut faire cuire à la broche, devant une belle flambée, un quartier d’agneau de Toulouse (ou de Pauillac) que l’on aura arrosé d’huile d’olive. Pendant que cuit l’agneau et que doucement il se dore, devant le brasier, on prépare le mélange suivant : Piler dans un petit mortier en bois (pour un quartier d’agneau) quinze gousses d’ail. Assaisonner cet ail d’un peu de sel, de poivre et d’une pincée de thym et de laurier pulvérisés, et lorsqu’il est réduit en pâte fine, lui ajouter trois ou quatre cuillerées de vinaigre (vinaigre de vin bien entendu !) Passer ce mélange à travers un linge fin, en tordant bien ce linge afin de bien exprimer tout le suc de l’ail broyé. Avec ce vinaigre parfumé à l’ail déglacer la lèchefrite au-dessus de laquelle aura rôti l’agneau. Par « déglacer » j’entends dire mettre un liquide quelconque : eau, bouillon ou autre, dans un récipient où a été cuit une substance quelconque, afin d’en détacher toutes les parties savoureuses qui se sont fixées sur les parois et dans le fond de l’ustensile. Ajouter à ce jus d’ail une ou deux cuillerées d’huile d’olive et le servir avec la pièce rôtie.

Dr CHUCHE, Paris.

DAUBE DE MOUTON A L’AVIGNONNAISE. Qui dit « daube », dit une viande de boucherie ou une volaille, doucement, lentement cuite à l’étouffée dans un ustensile spécial que l’on appelle « daubière », cuisson très courte et très aromatisée. La Daube avignonnaise se fait en principe avec du mouton, mais, comme toutes les daubes qui se préparent dans les différentes régions de la France, peut aussi être faite avec de la viande de bœuf.

Voici comment se prépare cette daube. Daube avignonnaise. – Désossez  un gigot de mouton et détaillez-en la viande en morceaux carrés de 90 à 100 grammes chacun. Traversez chaque morceau de mouton, dans le sens du fil de la viande, avec un lardon de lard gras assaisonné d’épices, arrosé de cognac et saupoudré de persil haché. Faites mariner ce mouton pendant deux heures avec vin rouge, huile, carottes et oignons émincés, gousses d’ail écrasées, thym, laurier, persil. Mettez les morceaux de mouton dans une daubière en terre garnie de minces bardes de lard, en les alternant par couches avec de l’oignon haché, du lard maigre en dés et des couennes fraîches blanchies et détaillées en petits morceaux. Assaisonnez chaque couche de viande avec du sel épicé. Mettez au milieu de la viande un fort bouquet garni additionné d’un fort morceau d’écorce d’orange séchée. Mouillez avec le vin de la marinade. Complétez le mouillement avec un bouillon que vous aurez préparé avec les os du gigot (cassés en menus morceaux) et les légumes de la marinade. Mettez sur la viande quelques bardes minces de lard gras. Couvrez la daubière avec son couvercle et buttez ce dernier avec une bande de pâte molle que vous aurez préparée avec de la farine et de l’eau. Cuisez la daube au four, à chaleur douce, pendant cinq heures. Servez tel quel, dans la daubière.

Dr GENTIL, Paris.

LE CUL DE CABRI A LA RELEVETTE. Je n’aime pas, moi, le cabri, ou plutôt je l’aime bien en liberté, mais pas dans la casserole. C’est une viande hypocrite qui n’a pas le courage de ses opinions. Enfin, n’en dégoûtons pas les autres ! Prenez donc les cuisses d’un cabri et leur source commune, ce que feue ma mère-grand – que Dieu la conserve en sa sainte garde, car elle est mieux chez lui que chez moi – appelait le cû, d’un mot propre, si l’on peut dire. Ces cuisses, faites-les revenir au lard, à la cocotte, à feu moyen ; elles reviendront, j’en gagerais. Lorsqu’elles seront d’une belle couleur chaude et ambrée, saupoudrez-les de sel et de poivre. Introduisez avec égards une poignée de petits oignons blancs, semez à la volée un hachis bien senti d’ail, d’échalote et de persil. Laissez cuire alors une demi-heure au ralenti. Avec un petit vin sec des coteaux de Nice, un rouge de préférence, de Ba Boutto, vous m’en direz des nouvelles ! (Recette des Alpes Maritimes, versant français).

Dr Raymond BOISSIER, Paris.


D) PORC

LA QUEUE DE COCHON PARLEMENTAIRE. Recette inventée à Alger par un ancien magistrat. Un plat excentrique, mais qui a toujours eu plein succès chez moi, c’est la Queue de Cochon parlementaire. Elle fut ainsi baptisée par trois aimables députés qui m’avaient demandé à déjeuner, pendant leur tournée de vacances : 1° Loin de tout électeur influent ; 2° Loin de tout fonctionnaire ou autre quémandeur ; 3° Encore plus loin de tout collègue du Parlement. Ils me prièrent de faire un bon petit plat, à mon idée, sans craindre qu’il fût un peu canaille. Je fis couper un beau morceau d’échine d’un jeune porc pas trop gras, long de 25 centimètres environ, avec la queue adhérente. Il fut un peu dégraissé, frotté de salpêtre, puis de sel, et couvert tout la nuit d’un mélange de sel légèrement sucré (2 kilogrammes environ, avec la queue). Bien lavé de son sel, qui avait raffermi le gras, le morceau fut mis à la casserole où il revint fortement pendant une demi-heure, puis on lui adjoignit un gros bouquet garni, trois plantureux oignons coupés en quartiers, une gousse d’ail et les assaisonnements d’usage ; puis on le couvrit de haricots, cueillis le matin même. Un felfel amer de Biskra, un litre et demi de bouillon. La graisse et le jus d’une rognonnade de veau rôtie la veille, complétèrent ces préliminaires. Cent minutes plus tard, on introduisit dans la casserole quelques tranches de cet excellent saucisson de ménage qu’on ne fabrique qu’à Lyon. Après quoi le plat fut servi bien dressé, la queue en l’air, décorée d’une papillotte frisée de papier blanc et d’une faveur rose, l’échine émergeant à peine des haricots et les tranches de saucisson la flanquant des deux côtés. Nous n’étions que six : il n’en resta pas. Il est vrai que c’était le plat d’ouverture et on y revint trois fois.

Dsse J. QUESLIER, Paris.

PETIT COCHON SAUVAGE FARCI (CORSE). Le cochon (12 kilogrammes environ) largement égorgé, ébouillanté, gratté, flambé, vidé, doit être vigoureusement frotté de sel et de poivre intérieurement et extérieurement, d’herbes odorantes, de gros sel et de poivre. Le farcir (4 kilogrammes de farce, composée des rognons, rate, foie, cœur, poumons, langue, cervelle, chairs de la tête (supprimée), du cou et des pieds, mie de pain trempée dans du lait de chèvre, œufs, noix, raisins secs, riz cuit à l’eau, le tout assaisonné de haut goût, sel, poivre en grains, safran, canelle, cumin, coriandre, ail, oignons, persil, sauge, menthe, serpolet et arrosé de vin blanc sec. Coudre, ficeler, inciser au couteau le dos et les flancs en formant des motifs simples qui apparaîtront plus tard sur la peau croustillante qu’il est bon d’arroser d’huile d’olive.Quatre heures de cuisson.

Dr André TACHERON, Pau.


E) ABATS


GAYETTES. 250 grammes de foie de porc, 250 grammes de mou de veau, 300 grammes de rognon de porc, 300 grammes de chair à saucisses, 75 grammes de saindoux, 100 grammes de foies de volaille, sel, poivre, échalote, crépine de porc. Couper en petits morceaux le foie, le mou, le rognon, saler et ajouter une gousse d’ail, une échalote hachée et du persil. Laisser dans un plat dix à douze heures. (On peut ajouter une truffe). Hacher le tout grossièrement ; y joindre la chair à saucisses et les foies de volaille. Diviser la masse en petites boules de la grosseur d’une mandarine, envelopper chacune d’un morceau de crépine de porc. Poser sur un plat allant au four et faire cuire une heure et demie, à four chaud. Servir froid.

Dr VAILLANT, Paris.

GAYETTES DE PROVENCE. Bases pour 15 gayettes d’environ 80 grammes : 500 grammes de foie de porc ; 500 grammes de graisse prise autour des intestins ; 250 grammes de hachis (chair à saucisses) ; trois gousses d’ail broyées ; une cuillerée à bouche de persil haché, 65 grammes de sel ; 350 grammes de crépine très fine. Méthode. – Saupoudrer de sel le foie et la graisse coupés en petits dés ; quand le sel a bien pénétré, mettre les dés dans une terrine, avec hachis, ail, persil et bien malaxer le tout. Retirer de l’eau qui l’a rendue malléable la crépine qu’on divise en petits rectangles et 8 à 10 centimètres de côté et sur lesquels on place 80 grammes de l’appareil précédent ; envelopper parfaitement les gayettes. Beurrer un plat, y ranger les gayettes, arroser largement de graisse et cuire au four pendant une demi-heure. Les gayettes peuvent se servir indifféremment chaudes ou froides (dans ce dernier cas on les tient deux fois plus grosses et on les coupe en tranches comme une galantine et alors le temps de cuisson doit être porté à quarante-cinq minutes.

Dr A. LOURTAU, Toulouse.

PIEDS ET PAQUETS MARSEILLAIS. La préparation de ce plat est assez longue, car sa cuisson réclame plusieurs heures, condition sine qua non. Une tripe de mouton donne une quinzaine de paquets ; on met un pied de mouton par personne. Nettoyez très soigneusement la tripe ; coupez-la en morceaux carrés de 8 centimètres ; étendez-les sur une planche. Râclez les pieds et lavez-les bien. Préparez une farce composée de deux gousses d’ail, de lard maigre (100 grammes) et des boyaux gras, le tout haché. Assaisonnez de haut goût. Mettez sur chaque morceau de tripe une cuillerée de cette farce ; roulez-le et attachez-le avec un fil. Vous avez confectionné le paquet. Dans une marmite de terre (daubière), faites fondre environ 80 grammes de lard gras. Ajoutez un oignon haché et faites roussir. Complétez ensuite par deux carottes coupées, trois ou quatre tomates hachées, un clou de girofle, une pointe de muscade (pas trop). Rangez les pieds au fond de la marmite et placez les paquets par dessus. Arrosez d’un verre de vin blanc et d’un quart de verre d’eau, un bouquet garni, deux gousses d’ail, sel et poivre. Couvrez la marmite avec une assiette creuse (calotte) demi-pleine de vin rouge, faites partir à grand feu. Au premier bouillon, modérez votre feu en le couvrant avec de la cendre ou faites petit feu si vous avez le gaz. Laissez mijoter pendant huit heures au moins. L’assiette doit pendant toute la cuisson contenir du vin. Servez sur assiette chaude.

Dr BARBIER DE LA SERRE, Agen.


F) CASSOULET, COUSCOUS, DAFINA, RIZ A L’ESPAGNOLE

LE CASSOULET DE CASTELNAUDARY. D’aucuns prétendent que les haricots blancs n’ayant été introduits en France qu’après la découverte de l’Amérique, le Cassoulet qui n’est autre chose qu’un « Estouffat » de viandes diverses (avec surtout la dominante du confit d’oie) et de haricots, ne peut dater que de cette époque. Pour beaucoup d’autres personnes l’origine de ce plat est bien plus lointaine puisqu’ils la font remonter aux Arabes qui, dit-on, apprirent aux habitants du Carcassez non seulement la culture des fèves blanches – alias haricots – mais encore à faire avec cette légumineuse, associée à du mouton, un ragoût qui serait l’ancêtre du Cassoulet castelnaudarien. Il est enfin d’autres personnes qui assurent que c’est pendant la guerre de Cent ans, lorsque les Anglais assiégeaient la ville de Castelnaudary, bien longtemps par conséquent avant la découverte de l’Amérique, que fut réellement inventé ce plat magnifique. Je ne saurais dire laquelle de ces origines – toutes fort lointaines il est vrai – est la vraie. Ce que je puis dire c’est que le cassoulet, tel qu’on le prépare, soit à Castelnaudary, soit à Carcassonne, soit enfin à Toulouse, est un plat de grande succulence. Voici comment on le prépare chez des cousins à moi qui habitent en plein pays d’Oc et chez qui, chaque année, à l’automne, je vais passer quelques jours de repos. J’écris cette recette sous la dictée de ma cousine :

Cassoulet. Dans un pot en terre vernissée (pot, qu’en Languedoc on appelle toupie) mettez à cuire des haricots (ceux de Cazères ou de Pamiers sont les plus réputés) préalablement trempés (mais pas trop longuement) avec l’eau nécessaire et l’assaisonnement de légumes (sans oublier l’ail) et toute la série des éléments nutritifs voulus, tels que : jarret de porc, couennes fraîches, filet (ou loumbet) de porc, saucisson à l’ail, etc. Lorsque les haricots sont bien cuits (la cuisson doit être lente), ajoutez dans le pot un quartier, ou deux, ou même trois, de confit d’oie. Faire mijoter quelques minutes. Égoutter les haricots et les viandes. Mettez le tout, les viandes détaillées en morceaux, dans une terrine ad hoc (terrine en terre d’Issel) en superposant par couches les haricots et les viandes. Mouillez avec la cuisson des haricots que vous aurez fait réduire et que vous aurez additionnée de quelques cuillerées de purée de tomates (pas trop). Saupoudrez de chapelure blonde ; arrosez de graisse d’oie. Faites cuire doucement au four, à chaleur douce, pendant quelques heures. Durant la cuisson, enfoncez deux ou trois fois la croûte qui s’est formée à la surface et recouvrez chaque fois d’une nouvelle couche de chapelure. C’est tout.

Dr NOEL, Paris.

COUSCOUS ORANAIS. « Couscous », « Riz à l’Espagnole », deux recettes du pays oranais, deux souvenirs d’enfance. Elles s’associent pour moi à l’image de la grande cuisine pleine de lumière où, chaque jour, va et vient, la tête toujours recouverte d’un foulard sombre noué sous le menton, fine cuisinière et pieuse, la vieille servante espagnole – la « Vieille », tout court. – Parfois une juive, vêtue à l’orientale, à la mode d’avant la conquête, vient « en extra » préparer le couscous. Contrairement à beaucoup de recettes provinciales ou exotiques, ces deux formules peuvent être réalisées à peu près partout, et, en tous cas, très facilement à Paris : les camarades de certaine salle de garde, assez bons vivants – parfois un peu émus au dessert – ont conservé de Rose et de sa cuisine un souvenir que vingt-deux années n’ont pas encore effacé. Ils auront plaisir à retrouver la saveur des mets qui leur avaient plu, et dont voici les exactes formules :

COUSCOUS (Pour six personnes). On doit hésiter à rédiger cette recette de couscous, tant ce plat varie avec les cuisiniers, les ressources locales et les saisons. La semoule préparée et cuite à la vapeur, le couscous proprement dit, peut s’accommoder de cent façons : il en est beaucoup d’excellentes, plaisant à nos palais d’Européens. Les recettes, assez incomplètes, en général, sont peu faciles à exécuter pour qui n’a pas été élevé dans le sérail. Celle qui suit n’est pas sans doute selon la vraie mode arabe ; c’est une recette familiale, mais ceux que des essais malheureux de certaines tambouilles exotiques auraient découragés peuvent l’essayer, sans se laisser rebuter par une complication plus apparente que réelle, due aux nombreux détails qui ont paru nécessaires pour ne pas aboutir à un échec ou à un fâcheux à peu près.

La préparation complète, qui demande quatre à cinq heures, se décompose en trois parties : 1° Un pot-au-feu ; 2° Le couscous proprement dit ; 3° Des boulettes de viande et une sauce, préparation accessoire, non négligeable, mais non indispensable.

Pot-au-feu. – Viandes : Maigre de bœuf : 800 grammes ; jeune mouton : 300 grammes ; poule à mettre au pot. Légumes : Garbanzos (pois chiches) : 250 grammes ; carottes : six moyennes ; navets : dix moyens ; courge : 250 grammes ou bien deux courgettes ou 125 grammes de potiron ; cardes ou bien fonds d’artichauts, une tomate moyenne ; une ou deux gousses d’ail. Condiments : sel, poivre, gingembre frais ou sec, râpé, poivre de cubèbe, cardamone, macis, deux clous de girofle (ces épices se trouvent, à Paris, chez Hédiard et votre pharmacien peut aisément vous les procurer). Elles jouent un rôle très important, par leur saveur particulière. Ne pas les négliger, ni le thym, ni le laurier.

Le bouillon du pot-au-feu doit être très maigre ; il y a donc intérêt à choisir le bœuf dans un morceau très maigre ; pas d’os à moelle. Le mouton pourra être un morceau de poitrine ou de collet ; il est surtout là pour donner son parfum au bouillon. La courge ou les courgettes étant très douces, il faut relativement peu de carottes et pas mal de navets. Pour ne pas troubler et noircir le bouillon, il est préférable de faire cuire à part les fonds d’artichauts ; on peut ajouter une poignée de petites fèves fraîches et de petits pois ; ils ont également l’inconvénient de donner au bouillon un moins bel aspect. Il faut en tous cas s’abstenir de choux, de pommes de terre et de haricots. Ne pas craindre d’épicer fortement : gros comme une amande de gingembre, une vingtaine de grains de cubèbe, le même volume de cardamone dont les grains sont plus petits ; quatre à cinq brins de macis (enveloppe de la muscade, qui peut le remplacer). Bien piler toutes les épices. Le pot-au-feu se prépare de la façon la plus classique, en mettant de bonne heure, à l’eau froide, le bœuf et le mouton qui doivent cuire longuement (quatre heures au moins), en écumant soigneusement, avant d’ajouter le sel, le poivre, les épices, la tomate, l’ail, les carottes, les navets, longs à cuire ; les garbanzos, trempés depuis la veille à l’eau légèrement salée, sont mis à l’eau froide, dans la marmite, en même temps que la viande. Pour ne pas tomber en ruines, la poule ne demande qu’une cuisson de une à une heure et demie, selon son âge ; les courgettes ou le potiron ne supportent guère qu’une demi-heure.

Le Couscous. – Un kilo de couscous (semoule) ; une pincée de safran, 125 à 200 grammes de beurre très frais, sel. Pour cuire le couscous, il faut, à défaut de l’instrument spécial employé en Algérie, le keskes, une passoire à larges trous, s’adaptant exactement sur l’ouverture d’une marmite haute qui fait très bien l’affaire. Inutile de décrire la façon dont les indigènes préparent la semoule : il y faut un tour de main et des instruments spéciaux et on trouve du couscous en semoule dans le commerce, qu’il suffit de traiter comme suit : Verser la semoule sur un linge propre, ou dans un grand plat creux, l’arroser de deux verres d’eau chaude légèrement salée, en la brassant bien pour répartir l’humidité et éviter la formation de grumeaux. Laisser reposer dix minutes puis, après un nouveau brassage, verser d’un seul coup dans la passoire et placer celle-ci au-dessus de la marmite du pot-au-feu, pour que le couscous cuise à la vapeur. Il faut, naturellement, que le fond de la passoire soit hors d’atteinte du bouillon en ébullition et, d’autre part, la jonction de la passoire et de la marmite doit être aussi parfaite que possible, afin que toute la vapeur passe à travers le couscous, ce qu’on obtient en ajustant tout autour des linges humides, serrés en turban. S’il n’est pas possible d’ajuster ainsi la passoire au-dessus du pot-au-feu, faire cuire simplement le couscous à la vapeur d’eau, au-dessus d’un autre récipient.

Après une première cuisson de trois quarts d’heure, verser de nouveau le couscous sur un linge ou dans le plat ayant servi à sa préparation ; le traiter de la même façon, en détruisant ou en enlevant tous les grumeaux qui ont pu se former et en l’arrosant à nouveau, modérément ; on peut teinter l’eau en la faisant bouillir pendant quelques minutes avec une grosse pincée de safran en brins : la semoule en prendra une plus belle teinte et un très léger parfum. Bien entendu, passer la décoction de safran pour ne pas mêler les brins à la semoule. Dès que les grains de semoule sont à nouveau bien mélangés et tous au même point d’humidité et de chaleur, les remettre dans la passoire et reprendre la cuisson à la vapeur pendant une demi-heure. La cuisson terminée, verser le couscous dans un plat creux et le travailler une dernière fois en détruisant les grumeaux et en y mêlant le beurre en petits morceaux, qui fondent à la chaleur de la semoule. Saler légèrement, si nécessaire. En cinq minutes, la préparation est terminée et prête à paraître à la table, pour accompagner les viandes et les légumes du pot-au-feu.

Boulettes de viande. – 300 grammes de viande maigre de bœuf, hachée, une cuillerée à soupe de semoule, un œuf entier, sel, poivre, épices (dites quatre épices), persil haché, 100 grammes de graines de pin (pignons), un ou deux oignons émincés, beurre, farine. Mêler dans un plat la viande la semoule, l’œuf, le sel, le poivre, les épices, le persil, ajouter les pignons. Former six à huit boulettes avec cette pâte (grosseur d’un œuf de dinde), les rouler dans la farine. A feu modéré, faire légèrement dorer les oignons émincés, dans du beurre, puis ajouter les boulettes que l’on fait revenir légèrement, en les retournant sans les briser ; la casserole doit être assez large pour que les boulettes puissent toutes reposer sur le fond, à côté les unes des autres. On mouille alors de trois ou quatre louches de bouillon du pot-au-feu et on laisse mijoter pendant une bonne demi-heure. Surveiller le jus, et ajouter au besoin du bouillon.

Sauce piquante. – On peut se contenter de prélever une saucière de bouillon et d’y ajouter une forte dose de cayenne, ou bien, après cuisson des boulettes, ajouter à leur sauce une pincée de poivre rouge doux et une forte dose de poivre de Cayenne. Il est mieux encore de cuire un poivron et deux ou trois piments que l’on écrasera en passant cette sauce piquante, qui se rapproche de la merga arabe.

Pour servir. – Présenter séparément le couscous dans un plat creux, le bouillon dans une soupière, les viandes découpées et les boulettes, les légumes, la sauce piquante et, si l’on veut, un ravier de raisins de Corinthe que l’on aura fait bouillir. En général, chaque convive mêle, dans son assiette creuse, le couscous, plus ou moins arrosé de bouillon selon le goût (il doit être bien humecté, sans être noyé), et un peu de chaque viande et légumes ; on relève prudemment avec la sauce piquante et on ajouter à volonté, quelques grains de raisins. La recette du riz à l’Espagnole se trouve plus loin.
                               
Dr Maxime LEROY, Paris.

COUSCOUS ALGÉRIEN (Pour six personnes). 1 kilogramme de couscous (Grima ou Ricci d’Alger), 1 kilogramme de viande pour hacher, un boyau assez grand pour contenir cette viande, un demi-chou, quelques navets, une branche de céleri, deux ou trois oignons, deux ou trois courgettes, trois ou quatre fonds d’artichauts, une demi-livre de pois chiches, qu’on fait tremper dans l’eau vingt-quatre heures avant de les cuisiner ; et facultativement : trois œufs, un poulet.

a) Préparation du couscous : Verser le couscous dans un grand plat ; ajouter une grosse pincée de sel puis l’asperger d’eau afin de le ramollir, verser ensuite sur ce couscous deux ou trois cuiller à soupe d’huile sans goût et bien mêler l’huile au couscous à l’aide d’une cuiller ; verser le couscous ainsi préparé dans un plat dont le fond est perforé. Ce plat sera placé sur une marmite contenant beaucoup d’eau dont l’ébullition produira la vapeur qui cuira le couscous ;

b) Préparation du bouillon qui sera mêlé au couscous au moment du repas : Avec le boyau, la viande hachée, des épices, du sel, du poivre, on confectionne un saucisson. Ensuite faire revenir deux ou trois oignons dans de l’huile. Ajouter suffisamment d’eau pour baigner tous les légumes ci-dessus nommés et le saucisson. Faite cuire à bouillon.

Quand le couscous et le bouillon sont cuits, on ajoute le deuxième au premier et on fait un excellent repas. Facultativement, nous pouvons ajouter à ce bouillon un poulet rôti, et des œufs durs. Le Couscous est le mets national indigène. Actuellement, il est adopté par toute la population européenne de l’Afrique du Nord.

Dr M. ZERMATI, Alger.

COUSCOUS MAROCAIN. Dans une marmite, mettez 1 kg. ½ de mouton (épaule désossée et coupée en morceaux), puis une poule découpée par membres ; ajouter 3 lit. ½ d’eau et du sel. Faites bouillir et écumez avec soin ; ajoutez alors les légumes : trois tomates, trois piments doux, deux oignons, trois fonds d’artichauts coupés en morceaux, 150 grammes de fèves fraîches,  250 grammes de pois chiches à moitié cuits à l’eau. Sel, une cuillerée de poivre rouge, une pincée d’épices, un clou de girofle. Couvrez la marmite avec la passoire (dite keskes) sur laquelle on a mis le couscous. Couvrez d’un linge mouillé et cuisez à petite ébullition pendant deux heures. Le couscous cuit à la vapeur. Mélangez à cette semoule quelques cuillerées de beurre. Placez le couscous sur un plat et dressez autour les morceaux de mouton de poulet, ainsi que les légumes. Servez en même temps le bouillon de cuisson nature.

Nota. – Il faut savoir préparer la semoule de couscous. Pour cela mettez  dans une terrine évasée (la djefna des Arabes) 250 grammes de semoule, humectez avec de l’eau légèrement salée. Travaillez la semoule avec la main ; quand la semoule est bien imbibée et bien mélangée, elle doit avoir la grosseur d’un grain de plomb et être sans grumeaux.

Dr VAILLANT, Paris.

COUSCOUS DU RIF. Le kskou, en voici la recette vraie, la recette du modeste paysan, sans recherches ni esbroufes, mais admirable quand il est réussi. Il ne doit pas son succès à la harira de poivre rouge et au piment. Il est nu, tout nu dans sa simplicité. C’est lui que préparaient jadis les chameliers du Hedjaz en écoutant la parole ardente de Mohammed, entrepreneur de transports et fondateur de religion. Quand le Marocain récolte son blé dur, il l’étend sur le sol et le mouille d’eau fraîche : il se gonfle, mais le soleil du Moghreb a raison de ses velléités de fermentation, et en moins de deux, le voici sec comme un saurot ; on le porte au moulin, au vieux moulin à meules de pierre, et le voici moulu en grumeaux que l’on passe au vent de mer, le soir, au crépuscule. On obtient ainsi une farine grossière, mais d’un pouvoir nutritif élevé. Cette farine, on la prend par petites pincées, on l’étale sur un van, on la mouille légèrement et on la roule avec les doigts (c’est un art) jusqu’à ce qu’elle prenne l’apparence de grains de la grosseur du millet. Ensuite, on passe au crible pour rejeter le surplus de farine. Pour la cuisson, il faut posséder un ustensile en terre ou en cuivre étamé (on en vend d’admirables à Taroudant) composé d’une marmite et, au dessus, d’une sorte de plat profond, perforé de multiples trous, lui servant de couvercle. Dans la marmite, on dépose deux ou trois poulets, une épaule de mouton, quelques pigeons, 1 kilogramme de macreuse, des pois chiches, des fèves, de gros haricots blancs, un panais, des bettes, un cœur de chou, quelques carottes et deux coings ; un peu d’eau, du sel, du poivre. Dans le plat, on dépose le couscous ; la vapeur de cuisson, obligée de la traverser, le cuira donc doucettement, et pendant plusieurs heures, à feu doux. Quand c’est prêt, on verse le couscous dans un plat, on l’égrène, et on le malaxe avec du beurre non rance (contrairement à l’usage à la caïda). On le dresse en cratère de volcan et, au centre, on dispose viandes et légumes ; on peut ajouter au dernier moment des raisins de Corinthe cuits à l’eau sucrée. Le couscous doit se manger avec les doigts (si vous ne savez, n’essayez pas, il faut un long apprentissage, prenez une coquille Saint-Jacques en guise de cuiller). Ne buvez pas de vin : de l’eau pure, ou simplement versée dans un bol préalablement frotté de bitume. Tout le monde n’aime pas ça. Le vin de l’Ouanzine, grand cru des Oufad Said, n’est pas à dédaigner.

Dr Raymond BOISSIER, Paris.

DAFINA. Plat qu’on prépare tous les vendredis dans les familles juives algériennes ; qu’on met à cuire toute la nuit du vendredi au samedi et la matinée du samedi sur un réchaud en terre séchée, chargé de charbon de bois. Ce plat mijote donc près de vingt heures pour être finalement servi le samedi à midi. Dans une grande marmite en terre, on met successivement, à froid, 1 décilitre d’huile d’olive, un pied de veau, coupé en deux, une livre de viande de bœuf (gîte), une tête d’ail entière et intacte, trois pommes de terre pelées, trois œufs (dans leur coquille bien lavée), une livre de haricots blancs, une cuillerée à café de poudre de poivron rouge séché (et surtout pas un ersatz), qu’on trouve, en Algérie dans toutes les épiceries. Couvrir d’eau à hauteur, saler et poivrer. Mettre d’abord à l’ébullition pendant une demi-heure, puis laisser mijoter une vingtaine d’heures, sans remuer à la cuiller, mais seulement en agitant la marmite d’un mouvement circulaire, car, malgré la longue cuisson, haricots, viande, pommes de terre, ail, tout doit rester intact. Pendant la dernière heure, surveiller et activer l’évaporation, si besoin, pour éviter un excès de sauce, ou bien ajouter de l’eau chaude pour que le plat soit bien onctueux. Une variante consiste à remplacer les haricots par des pois chiches, trempés au préalable pendant vingt-quatre heures dans de l’eau légèrement bicarbonatée. Et le poivron rouge est remplacé comme condiment par du safran associé à la noix muscade râpée. On ajoute ordinairement à cette forme de Dafina une livre d’épinards à petites feuilles, finement coupés.

Dr TUBIANA, Paris.

RIZ A L’ESPAGNOLE (Recette africaine). C’est tout autre chose que la Paella de Valence, chef-d’œuvre de la cuisine espagnole. Vigoureux et plus simple, ce plat, s’il est d’origine espagnole, s’est bien acclimaté en Afrique et y a pris une personnalité très nette.

Pour quatre personnes : 1° Un poulet coupé en morceaux, ou bien un morceau de porc frais (filet ou carré), bien maigre, de 600 à 800 grammes (désossé, dégraissé, coupé en dés de 4 à 5 centimètres de côté). On peut mélanger poulet et porc avec quelque avantage ; 2° Une demi-livre de riz, lavé et bien égoutté ; 3° Une grosse poignée de petits pois tendres ; 4° Deux fonds d’artichauts (mieux vaut s’en abstenir s’ils ne sont pas très tendres) ; 5° Deux petites gousses d’ail, ou une grosse (ail frais, si possible) ; 6° Deux gros poivrons verts ou rouges ; deux façons de les préparer : a) Les faire cuire au gril ou au four, sans les ouvrir ; enlever la pellicule superficielle et les débiter en  lames en rejetant les graines ; b) Les couper crus, en lames, et réserver pour les frire (on enlève la pellicule superficielle après friture) ; 7° Deux petites tomates ou une grosse, bien mûres, épépinées, coupées en petits quartiers ; 8° Un demi-gramme de safran en brins (une bonne pincée). Le faire sécher à la chaleur, sans le griller, dans un papier fin, et réduire en poudre ; 9° Un ou deux clous de girofle, traités comme le safran ; 10° Une branche de persil, sel, poivre (Cayenne facultatif) ; 11° Huile d’olive.

Se servir d’une casserole en terre ou d’une cocotte en fonte, ou d’une casserole en cuivre, mais éviter les récipients trop minces, trop bons conducteurs de la chaleur (aluminium, tôle galvanisée ou émaillée). A feu vif, faire chauffer l’huile, qui doit couvrir largement tout le fond de la casserole. Y faire revenir l’ail sans le faire roussir, et, si l’on veut, les poivrons (2e façon de les traiter). Enlever, réserver, puis faire cuire la viande ; quand elle est bien ferme et dorée, la retirer et la tenir au chaud. Faire réduire complètement la tomate à feu très vif ; remettre alors viande, ail, saler, poivrer, mouiller d’eau bouillante en quantité telle que tout le liquide puisse être absorbé par le riz en vingt minutes (deux verres d’eau pour un verre de riz, disent les livres de cuisine). Ajouter alors les petits pois, artichauts, poivrons, le persil, les clous de girofle, le safran et, si l’on veut, une pointe de Cayenne. Couvrir et laisser bouillir une dizaine de minutes, à feu doux. Verser alors le riz en pluie sur toute la surface ; pousser la flamme pour obtenir une forte ébullition ; afin que les grains n’attachent pas, il ne faut pas remuer le mélange à la cuiller ; ne jamais couvrir, surveiller si le liquide est un peu court ; baisser un peu la flamme à la fin de la cuisson. Quelques minutes après avoir ajouté le riz, il ne doit plus y avoir de liquide en surface. Éteindre, laisser reposer cinq minutes, sans couvrir. Le riz doit être sec, les grains détachés et assez fermes.

Dr Maxime LEROY, Paris.

RIZ A L’ESPAGNOLE. (Peut se préparer, à volonté, avec du poulet ou avec des calmars). Pour quatre personnes : Dans une marmite en terre, faire chauffer 100 grammes d’huile d’olive non fruitée, y faire rissoler trois poivrons doux, verts ou rouges, coupés en quatre et aussi trois têtes d’artichauts, également coupées en quatre. Les retirer après cinq minutes de cuisson. Jeter alors dans l’huile un poulet coupé en morceaux et le faire dorer ; saupoudrer d’un hachis de trois gousses d’ail et remuer sans cesse ; dès que l’ail a pris couleur (sans roussir) ajouter trois tomates moyennes, débarrassées de leur « aigre » et coupées en petits morceaux, saler, poivrer, laisser cuire un quart d’heure, à couvert. Quand la sauce tomate commence à réduire, verser environ trois quarts de litre d’eau tiède dans laquelle on aura fait macérer une dizaine de stigmates de safran bien séchés et pulvérisés au mortier. Laisser cuire doucement trois quart d’heure. Environ vingt minutes avant de servir, jeter en pluie trois quart de livre de riz Caroline (ne plus remuer, c’est essentiel) ; ajouter les morceaux de poivrons et d’artichauts et surveiller la cuisson, car c’est de là que dépend le succès de l’opération. Dès que le grain de riz peut s’écraser entre le pouce et l’index, retirer la marmite du feu, le complément de cuisson, comme l’absorption du liquide, doit se faire en dehors du feu. Le riz a alors une belle couleur jaune d’or et chaque grain se détache. Servir le riz dans la marmite de

Dr TUBIANA, Paris.

RIZ A LA CATALANE. (Rappelant l’Arroz à la Valencia). D’une part : Faites revenir dans une casserole : lapin, poulet, porc, le tout coupé en petits morceaux ; ajoutez oignon haché, pointe d’ail, tomate, sel, poivre. Mouillez avec du bouillon. D’autre part : Grattez, lavez, nettoyez de belles moules, mettez-les dans une casserole avec oignon émincé, une brindille de thym, poivre, quelques branches de persil et du blanc de céleri coupé en petits morceaux. Mouillez avec du vin blanc, couvrez la casserole et faites partir en plein feu. Laissez bouillir cinq minutes en faisant sauter pour égaliser la cuisson. Laissez au chaud et revenez à la première casserole. Quand la viande est à moitié cuite, ajoutez le riz, quelques quartiers d’artichauts, des petits pois, des piments rouges émincés, les moules, une pincée de safran. Laissez cuire vingt-cinq minutes environ ; égouttez et servez.

Dr Gaston BAISSETTE, Paris.


VOLAILLE, GIBIER, VENAISON, LAPIN

A) POULETS

LE COQ DE L’OLIVADE OU LA CROUTE DE CAVAILLON. Préparez une pâte brisée avec : 250 grammes de farine, une pincée de sel, un quart de beurre, un demi-verre d’eau. Mélangez rapidement, sans travailler la pâte, mettez en boule et, pendant que vous laissez reposer la pâte, videz et flambez deux jeunes poulets très tendres. Découpez-les en morceaux en laissant de côté : la tête, les pattes et la carcasse qui pourront servir à préparer une soupe. Faites dorer les morceaux de poulet avec un quart de lard maigre coupé en dés et cinq ou six oignons. Liez avec une bonne cuillerée de farine et ajoutez : deux grosses tomates bien mûres, une demi-livre d’olives dénoyautées, une gousse d’ail, une branche de persil, sel et poivre. Laissez cuire les morceaux de poulet une demi-heure environ (les tomates suffisent à faire la sauce, qui doit être courte et assez épaisse pour ne pas ramollir la pâte.) Étendez la pâte au rouleau. Prenez-en la moitié pour garnir un moule plat ; mettez les morceaux de poulet sur cette pâte et recouvrez avec un couvercle fait de l’autre moitié de la pâte. Soudez les bords et ménagez une cheminée. Faites cuire une bonne demi-heure à four chaud et servez.
                               
Dr Gérard DESFARGES, Paris.

POULET EN VESSIE. Prenez une belle poularde, ou, de préférence un beau chapon bien tendre, videz-le soigneusement et flambez-le. Enduisez légèrement de beurre frais l’intérieur et l’extérieur de la bête ; garnissez l’intérieur de grosses truffes coupées en quartiers ; troussez et bridez. Introduisez le chapon ainsi garni dans une vessie de porc dont vous amarrez solidement l’extrémité avec du gros fil. Plongez la vessie ainsi préparée dans un pot-au-feu fait avec une vieille poule ou un vieux coq, 1 kg. 500 de jarret de veau, un bouquet garni, pas de céleri ni de cerfeuil. Surveillez votre pot-au-feu pour qu’il cuise doucement, à petits bouillons. Si la vessie a été choisie convenablement elle ne crèvera point. Le chapon demandera, suivant sa grosseur, de deux à trois heures de cuisson. Le chapon étant à point, fendez la vessie, retirez le chapon de son vêtement. Ouvrez le ventre de la bête et retirez les truffes qui, en donnant leur parfum auront accompli leur devoir et servez, enveloppé dans une serviette.

Dr Pierre BOURGIN, Soctrang (Cochinchine).

POULE A L’ESPAGNOLE. Choisir une poule grasse – mais non coriace, – la flamber, vider, découper ; faire fondre dans une casserole en cuivre épais ou en terre des Alpes, un bon morceau de beurre ou, mieux de la graisse de jus de rôti ; y mettre les morceaux de poule et les faire bien dorer ; ajouter une gousse d’ail, deux ou trois oignons, une carotte entière, faire revenir légèrement, mouiller à hauteur, avec du consommé, saler peu (à cause du consommé), poivrer fortement, ajoute persil, thym, laurier, laisser cuire à petit bouillon deux heures, davantage si la poule est dure. Un quart d’heure avant la fin de la cuisson, retirer le bouquet garni et la carotte, ajouter du riz de bonne qualité (deux cuillerées par personne), le laver sans le laisser tremper, le verser dans la sauce qui doit être courte, ajouter un peu de consommé ; surveiller la casserole à partir de ce moment et la tenir sur un feu doux jusqu’à ce que le riz soit cuit à point. Délayer du safran, gros comme trois têtes d’épingle, dans une cuillerée de bouillon et mélanger au riz qui doit prendre une belle teinte jaune d’or (si on poussait jusqu’au jaune de chrôme, la saveur serait trop accentuée). On peut ajouter un soupçon de kari. Vérifier l’assaisonnement.

Dsse J. QUESLIER, Paris.

POULET GRILLÉ. Prendre un petit poulet (un pour quatre convives), l’aplatir à la batte après l’avoir ouvert du côté du dos. Rentrez les pilons dans une petite ouverture faite du côté du croupion. Briser les os longs pour éviter la rétraction à la cuisson. Mettre le poulet dans un sautoir avec un peu d’huile d’olive bien brûlante (l’huile agit ainsi uniquement comme conducteur de chaleur et n’est pas absorbée par la viande). Faites prendre rapidement couleur des deux côtés. Saler légèrement, retirer du sautoir et mettre à four chaud pendant quinze minutes, puis passer à la chapelure blanche et faire griller. Servir avec riz à la créole et sauce tomate spéciale.

Dr CHUCHE, Paris.

BOUILLABAISSE DE POULET. Prendre : une belle volaille ; Trois quarts de litre de bouillon bien dégraissé et fait chez soi avec les légumes ordinaires et du milieu de poitrine de bœuf ; Trois quarts de litre de vin blanc sec venant directement de la propriété et n’ayant rien d’une mixture trafiquée ; Un verre à bordeaux de madère ou de porto authentiques selon la préférence ; Une gousse ou une gousse et demie d’ail, selon l’attirance que l’on a pour la saveur aliacée ; Une pincée de safran ; Un quart ou même plus d’olives dénoyautées ; Même quantité de champignons ; Un litre de sauce tomate bien liée, épaisse et, cela va sans dire, faire chez soi ; prendre des tomates très minces et très rouges, de façon à éviter les deux gouttes de carmin que ma cuisinière s’obstine à y mettre ; 125 grammes de bon beurre ; Quelques tranches de pain.

Mettre dans la casserole le bouillon, le vin blanc, le bouquet, ail, sel, poivre et laisser ainsi cinq minutes sans découvrir. (Il est nécessaire de conserver le couvercle). Ajouter la sauce tomate, le madère ou porto, assaisonner encore s’il y a lieu (et là il faut goûter, car il n’y a aucune bonne cuisine si on ne goûte pas pendant la confection) mettre alors le safran. Découper la volaille (en désarticulant et en évitant les éclats d’os) faire cuire dans la sauce trois quarts d’heure environ (il faut surveiller intelligemment selon la « tendreté du poulet »). Pendant que ça cuit, éplucher les champignons et, dix minutes avant la fin de la cuisson, les ajouter ainsi que les olives avec une ou deux grosses noix de beurre frais. Lier la sauce avec une cuillère à café environ de bonne fécule délayée à l’eau froide et servir très chaud sur des croûtons dorés dans l’huile. Vous m’en direz des nouvelles.

Dr Jean LABORDE, Paris.

POULET A LA DAUBE.
Découper en morceaux moyens, un beau poulet (à l’exclusion de la carcasse et des abattis) et ajouter moitié poids égal de jarret de veau et un ou deux pieds de veau. Disposer toute cette viande en intercalant veau et volaille et des échalotes en assez grande quantité (une vingtaine au moins par pièce de volaille), un peu de sel, très peu de poivre, brindille de thym et mettre au-dessus du tout les pieds de veau ; quelques feuilles de laurier (pas trop). Mettre le tout dans une grande terrine en terre et recouvrir de vinaigre de bière (à défaut, de bière légère et d’un peu de vinaigre orléanais ; mais ça ne vaut pas le vinaigre de bière, devenu très rare du reste, depuis la guerre). Fermer hermétiquement la terrine en mettant de la pâte (farine et eau malaxée) autour du couvercle et faire bouillir quatre heures au moins, doucement. (Mes parents le faisaient porter chez le boulanger et… c’était meilleur). Après cuisson, enlever le couvercle, dégraisser, enlever le thym, le laurier et les pieds de veau et mettre la terrine dans un endroit frais (cave). Cet excellent plat se mangeait autrefois (encore maintenant, mais plus rarement) lorsqu’on revenait du bal, après avoir fait des repas plantureux de huit heures parfois et avoir bien consommé. Cela nous remettait d’aplomb !

Dr F. DE BIL, Rosendael.

HACHIS DE VOLAILLE (Recette diététique). Par personne : Poule au pot désossée, 125 grammes ; Mie de pain, 40 grammes ; Lait, 50 grammes (une demi-tasse à café) ; Œuf, un ; Sel, une pincée ; Purée de pommes de terre, 125 grammes. Passer la viande au hachoir, la mélanger avec la mie de pain trempée dans le lait chaud, saler, ajouter l’œuf entier, battu. Alterner une couche de hachis et une couche de pommes de terre ; porter au four. Possibilité d’ajouter du beurre frais sur l’assiette, après cuisson.

Dr LÉON MEUNIER, Paris.

B) LAPIN

LAPIN PANÉ. Prendre le râble et les cuisses d’un beau lapin, au besoin, tout le lapin excepté la tête, cœur, foie et poumons. Couper en morceaux moyens, sans désosser, mais en faisant attention de ne pas laisser d’éclats d’os. Prendre une casserole de cuivre ; couvrir le fond avec des tranches très minces de lard plutôt maigre et demi-salé. Mettre ensuite une couche de mie de pain finement émiettée (il faut du pain de la veille) mélangée avec du persil et de l’échalote hachée très fin, sel et poivre, puis une couche de lapin, une de lard, une de mie de pain, et ainsi de suite en terminant par le lard. Arroser le tout de vin blanc de Bordeaux et laisser mijoter à feu extrêmement doux pendant trois heures environ : bien couvrir la casserole. Lorsqu’il est encore chaud, passer le lapin, comme il vient, dans une terrine et laisser refroidir. A faire la veille. Très bon en été et à manger très froid. Saler peu, à cause du lard. Prendre une casserole qui sera bien remplie et mettre le vin au ras des morceaux sans qu’ils soient complètement recouverts.

Dr BRUDER, Paris.

LAPIN MORICAUD. Prenez un lapin de 2 kilogrammes. Parez et coupez en morceaux. Mettez ensuite à mariner vingt-quatre heures, avec oignons coupés, persil, thym, laurier, vinaigre, sel et poivre. Le lendemain, faites sauter et dorer les morceaux dans un peu de graisse. D’autre part, faire revenir dans la cocotte en fonte, un gros oignon haché avec un morceau de jambon gras et maigre coupé en dés et une bonne cuillerée à soupe de tomate concentrée. Quand tout est cuit, ajouter une tasse à thé de bouillon et une tasse à café d’eau bouillante dans laquelle on aura fait préalablement dissoudre deux grosses billes de chocolat. Salez et poivrez, puis jeter les morceaux de lapin dans la cocotte, couvrir d’eau chaude, juste à hauteur. Laisser cuire doucement pendant deux heures et demie. Servir dans un plat bien chaud.

Dr CLAVEL, Biarritz.

RABLE DE LAPIN. Laisser mariner quelques heures au vinaigre et vin blanc, avec aromates (thym, laurier, hysope, ail, oignons coupés) le râble très frais d’un lapin de clapier ou de garenne. Avant cuisson, enrober, badigeonner le râble de moutarde de Dijon ; cuire au four, avec beurre, épices, bouquet ; l’arroser au cours de la cuisson avec quelques cuillerées de marinade chaude, beurre fondu ou vin sec, tiédi.

Dr Pierre TISON, Le Cateau.

LE PATÉ DE LAPIN. Prendre un très beau lapin de choux ; 500 grammes de veau ; 500 grammes de porc ; 250 grammes de lard ; 250 grammes de petit salé ; deux ou trois belles truffes ; 30 grammes de sel, 10 grammes de poivre (pour 2 kilogrammes de viande). Désosser soigneusement le lapin et la viande ; couper le tout en morceaux longs et fins. Garnir la terrine (en terre) d’un linge propre et fin, y arranger la viande en mélangeant bien les qualités et assaisonner à mesure. Coudre le linge ; retirer le pâté de la terrine et le mettre à bouillir dans une grande casserole avec : carottes, céleri, oignons, poireaux, ail, noix muscade, thym, sariette, girofle, laurier, marjolaine, os de bœuf (de la jambe), os de veau, pied de porc, pied de veau, couenne maigre. Ajouter un peu de gros sel et laisser bouillir quatre heures. Goûter pour vérifier l’assaisonnement et les aromates (la gelée doit être très parfumée). Remettre le pâté en terrine en enlevant le linge, le recouvrir avec le jus passé et le tenir au frais jusqu’à ce que la gelée soit bien prise. Cette recette m’a été laissée par ma grand’mère qui la tenait de la sienne. Elle la préparait généralement deux ou trois jours avant Noël et c’était une des grandes joies de mon enfance que d’en surveiller la confection.

Dr A.-E. LÉVY, Antibes.


C) GIBIER ET VENAISON

CAILLES VIGNELONGUE. Je tiens les vieux papiers en très grande estime, et les originales découvertes que, parfois, j’y fais, ne sont pas pour me faire changer d’avis. Exemple : Dans une cassette bourrée de documents plutôt banals : actes et contrats, exploits judiciaires, sentences et reçus, j’ai, sur des feuillets servant de chemise à des liasses, trouvé deux recettes entr’autres qui me paraissent dignes d’être communiquées à de fines g… bouches doctorales. Les précieux feuillets ont été arrachés à un livre de compte d’un sieur Plantier, successeur d’autre sieur de Malleville, cabaretier, à Vignelongue. C’est le 1er avril 1695, l’hôte vient de consigner sur ses comptes qu’il vient de payer au sieur Sauvaire, receveur du Bureau de Charité, une amende de six livres à lui infligée tout à l’heure, sur procès-verbal dressé par le R.-P. Clerc, missionnaire, et Nozernier, prêtre secondaire, pour avoir tantôt, ce jour de vendredi saint, servi un chevreau rôti à six soldats et une fille étrangère. Il ajoute que Malafosse, valet de ville, sort de chez lui, emportant les reliefs du festin, confisqués au profit des pauvres assistés. Pas de commentaire. De la même plume, de la même encre, dans la marge au droit de cette inscription de dépense, Plantier note les deux formules qu’il dit recevoir du noble E. de Branche, sieur des Barbuts, l’intraitable huguenot que rien ne put décider jamais à être des nouveaux convertis. Peu avant, avec son copain, J. de Caulet-Follaquier, lui-même avait été verbalisé au logis de la Croix-Blanche, par les mêmes agents, pour manger de la viande en temps de carême. Il avait dû débourser une égale somme. Il devait rire de la contrariété du traitant et c’est en manière de consolation, qu’en bon chevalier du rôt, il lui donna ces précieuses recettes. J’estime que le cabaretier fit une bonne journée.

Cailles à la Vignelongue. – Bourrez vos oiseaux de beurre épicé selon le goût et aromatisez. (Ici, et surtout à l’époque, il ne peut être question que de serpolet, le terrain du lieu entièrement schisteux, ne nourrit ni lavande, ni thym, ni romarin qui pourraient être utilisés). Vous couvrez de mousseline, de lard et habillez le tout de feuilles de vigne muscat ointes de beurre. Mettez en broche ou au four. Fausses cailles. – Taillez des carrelets de veau de 12 centimètres environ de longueur – le texte dit quatre pouces. – Vous les liez d’abord ensemble par un bout. Vous aurez pétri une boulette de beurre aux épices, aromates et fin hachis de viande que vous emprisonnerez dans les carrelets ; vous les liez alors par l’autre bout. Habillez enfin de feuilles que vous aurez beurrées. Broche ou four. Pour les deux, ail et persil fin, ad libitum. Les feuilles, dont il faut être approvisionné doivent être ébouillantées (non pas bouillies), par raison de propreté d’abord, afin de les débarrasser de toute poussière et pour les assouplir de façon qu’elles s’appliquent très exactement sur les pièces. Au dire des gourmets, l’un vaut l’autre et l’on peut, pour la deuxième préparation, employer le porc.

Dr G. de BOUSQUET, Valborgne.

FAISAN OU PERDREAU A LA DU CHAMBLAY

Rôtir à la broche un faisan ou deux perdreaux, comme d’usage ; de temps en temps retirer ce qui est tombé comme jus dans la lèchefrite, qu’on décolle avec une goutte d’eau. D’autre part, manier vivement une cuillerée de farine et un morceau de beurre de 30 à 40 grammes, ajouter le jus du rôti en tournant, puis une tasse à thé de crème qu’on incorpore lentement. Bien mélanger le tout et laisser cuire à petit feu quelques minutes. Puis découper les rôtis, les dresser sur canapés avec des foies bien écrasés et pilés ; napper le tout de la sauce à la crème, décorer de rondelles de citron et servir chaud.

Dr A. MAGNAN, Nice.

GRIVES AUX OLIVES CASSÉES. Prendre de belles grives non faisandées, les plumer, flamber, vider et trousser en les bardant d’une mince tranche de lard de poitrine fumé. Les sauter au beurre dans un poêlon en terre ; lorsqu’elles auront pris couleur, ajouter des tomates, un gros oignon, une gousse d’ail, une branche de persil, le tout finement haché, un brin de fenouil, sel et poivre, et surtout une grande assiétée d’olives cassées soigneusement lavées. Laisser mijoter à petit feu. « L’olive cassée » est tout à fait spéciale à la Provence et, plus particulièrement, à la région comprise entre Avignon et Arles, c’est-à-dire Saint-Rémy, Maillane, les Baux, Tarascon. On les prépare de la façon suivante : prendre 2 ou 3 kilogrammes de belles olives vertes. Les choisir de forme presque ronde, les pointues étant réservées pour la préparation dite « à la Picholine » qui est pratiquement la seule connue pour les olives vertes, en dehors des pays de production. Les fendre carrément sur une planche à hacher sans en briser le noyau. Les mettre à mesure dans un pot en grès que l’on remplira d’eau ; les olives ne doivent pas être tassées mais nager à leur aise. Changer cette eau tous les jours, pendant huit à dix jours, et quand les olives auront perdu toute amertume changer l’eau une dernière fois en ajoutant 250 à 300 grammes de sel fondu et un gros bouquet de fenouil. Ces olives se conservent au maximum deux à trois mois. On les prépare en général dans la deuxième quinzaine d’octobre et on en mange jusqu’à la Noël.                                                   

Dr A.-E. LÉVY, Antibes.

LA PERDRIX A LA CATALANE

Cette façon d’apprêter la perdrix, la « rouge » qui, on le sait, est celle que l’on trouve surtout dans notre région, perdrix dont la chair est des plus savoureuses, est très ancienne. De la même manière on accommode aussi les pigeons. J’entends les tendres pigeonneaux et non les vieux oiseaux de colombier dont la chair est noire et coriace. De la même façon également, avec toutefois quelques variantes dans le mode de préparation, on apprête la viande de mouton. Ce dernier apprêt est désigné sous le nom de « Pistache de mouton ». En Languedoc et en Roussillon, régions où, traditionnellement, on a le culte de la bonne chère, la plupart des apprêts sont condimentés, parfumés à l’ail. La Perdrix à la Catalane n’échappe pas, on le comprend bien, à cette loi savorique. Et pour si bizarre que cela puisse paraître aux gourmands qui vivent – et mangent ! – au nord de la Loire, la perdrix s’accommode très bien avec le bulbe qu’exécrait Horace et que prisent fort les gens des deux Midis, celui de l’Ouest et celui de l’Est.

Voici comment, chez moi, se prépare la Perdrix à la Catalane. Troussez une jeune perdrix bien en chair et, naturellement, non « faisandée » dans l’intérieur de laquelle vous aurez mis une farce faite avec le foie de l’oiseau, un peu de jambon maigre (salé et non fumé) haché, un peu de pain trempé dans du bouillon et pressé, farce congrument assaisonnée de sel, poivre et d’un peu d’épices, condimentée d’une pointe d’ail et rehaussée d’une forte cuillerée d’Armagnac. Recouvrez la poitrine de la perdrix d’une mince barde de lard gras. Mettez-la dans une casserole en terre où vous aurez fait chauffer deux bonnes cuillerées de graisses d’oie. Ajoutez deux ou trois cuillerées de jambon maigre (non fumé) détaillé en petits cubes. Faites revenir le tout sur feu doux. Lorsque la perdrix est bien colorée, mettez dans la casserole douze gousses d’ail (je dis douze), choisies de même grosseur et légèrement blanchies. Ajoutez un petit bouquet garni contenant un morceau d’écorce d’orange. Faites suer le tout sur feu doux pendant douze minutes. Saupoudrez d’une forte cuillerée de chapelure ; mouillez d’un verre à bordeaux de vin blanc sec, puis de quelques cuillerées de bon jus de veau lié et ajoutez une cuillerée d’Armagnac. Cuisez, à feu doux, dans le four ou sur le fourneau, la casserole couverte pendant vingt minutes environ. Retirez le bouquet garni et servez la perdrix entourée de croûtons frits à la graisse d’oie et arrosée de sa sauce. Inutile de dire que la perdrix est un oiseau individuel et que chaque convive doit avoir la sienne. Le vin qui, à mon avis, accompagne le mieux ce plat méridional est un beau vin rouge d’Aquitaine. Cependant, certains amateurs préfèrent l’arroser avec quelque vieux vin rouge de Bourgogne…

Dr BOUCHÈRE, Belvianes (Aude).

PERDREAU A LA CATALANE. Découper un gros perdreau ; le faire revenir à l’huile d’olive dans une cocotte couverte. D’autre part, deux têtes d’ail (soit une douzaine de gousses) bouilliront avec un citron mûr, épépiné, coupé en fines rondelles et un bouquet garni, dans trois verres d’eau. Quand une tête d’épingle peut pénétrer dans l’ail, le retirer ainsi que le citron. Dans le jus du perdreau mis au chaud par ailleurs, faire revenir une ou deux cuillerées de farine ; mouiller avec la cuisson des aromates. Laisser mijoter le perdreau dans cette sauce. Servir dans un plat en terre vernissée, orné des gousses d’ail et des rondelles de citron.

Dr André TACHERON, Pau.

LE CIVET DE LIÈVRE TEL QU’ON LE FAIT EN DAUPHINÉ ET EN SAVOIE. Le Dauphiné est encore un peu la Provence. La Mure est en Dauphiné. Au nord de La Mure on parle français, évidemment, mais aussi le patois savoyard, et l’on n’entend plus du tout le provençal ; au sud de La Mure, changement radical : on ne comprend plus du tout le patois savoyard et on parle le provençal. Cette recette est donc, si l’on veut, provençale, bien qu’elle ne demande rien aux condiments favoris des Méridionaux. Elle est le résultat de l’expérience séculaire de générations de cordons bleus habitués à satisfaire des amateurs de gibier, vraiment connaisseurs. J’en ai tant entendu parler autrefois dans les familles de chasseurs de mes amies, en Dauphiné et en Savoie que je puis la donner dans ses détails, et en affirmer l’authenticité. Chez ces chasseurs, ce fut de tout temps, et c’est encore aujourd’hui, un point d’honneur pour la maîtresse de maison de faire servir un civet de lièvre parfaitement réussi ; aussi les jours de civet, fait-elle avec anxiété de nombreux tours à la cuisine, d’où, trop curieux, je fus maintes fois pourchassé jadis. La qualité du civet classe une table digne de chasseur.

Voici comment on procède : Pour faire un civet, prenez un lièvre. Si les convives doivent être nombreux ayez deux lièvres, mais faites deux civets, séparément. Exécuté en quantité, votre civet ne saurait être vraiment succulent. La succulence du civet dépend de la qualité du lièvre et de la quantité de son sang recueillie. N’acceptez donc qu’un bon lièvre, un lièvre roux, couleur de robe de capucin, un « capucin », comme disaient irrévérencieusement nos chasseurs. Rejetez impitoyablement les grands lièvres de race étrangère, dont les pattes ne finissent pas et dont le pelage est gris pâle sur le dos et blanc sous le ventre ; leur chair se délitera en longues fibres sans nulle saveur.

Laissez votre lièvre trois ou quatre jours dans sa chemise, six ou sept si la saison est avancée, s’il fait froid. Dépouillez-le, ne le lavez pas, comme le recommandait Taillevent. Mettez de côté le foie, le cœur, les poumons. Recueillez avec le plus grand soin tout le sang dans un bol et ajoutez un peu de vinaigre pour qu’il ne coagule pas. S’il y en a vraiment peu, si le lièvre l’a malheureusement perdu par sa blessure, sacrifiez au besoin une volaille et mêlez son sang à celui du lièvre, mais surtout ne demandez jamais du sang au boucher.

Vous coupez votre lièvre en morceaux pas trop gros, que vous disposez dans un plat creux ou un saladier, avec un bouquet garni, laurier, thym, lavande, cerfeuil, des petits oignons piqués de clous de girofle et des ronds de carottes et de citron. Faites mariner au vin rouge. Réservez les puissantes marinades au vinaigre pour les grosses bêtes, sanglier, cerf, chamois, chevreuil. Prenez un vin de deux à trois ans ; inutile de sacrifier une vénérable bouteille : ces vins dépouillés ne conviennent pas et donnent moins bon goût. Que tous les morceaux soient bien couverts par le vin dans lequel ils marineront vingt-quatre heures. Comptez pour la cuisson de trois heures à trois heures et demie, suivant la grosseur du lièvre. Mettez la marinade au frais, ainsi que le sang, le foie, le cœur et les poumons.

Le lendemain vous faites votre civet dans une cocotte en terre fermant bien pour une cuisson à l’étouffée. Autrefois, en Dauphiné et en Savoie, le civet se cuisait dans une sorte de marmite en bronze, appelée « coquelle », portant sur quatre pieds et dont le couvercle était entouré d’une couronne découpée, ornée, assez haute. On installait le civet au coin de la cheminée, dans la cendre chaude, sur les braises vives que l’on mettait aussi sur le couvercle où elles étaient retenues par la couronne ; on découvrait avec un double crochet à feu.

Aujourd’hui, sur le fourneau de cuisine, dans la cocotte, vous faites un roux : beurre, farine, rondelle d’oignons ; verser un verre de bouillon, tourner à la cuillère de bois. Ajouter une douzaine de petits oignons piqués de clous de girofle, et une vingtaine de carrés de lard salé. Puis mettez les quartiers de lièvre, avec le cœur et les poumons, par couches que vous salez ; jetez du poivre en grains et quelques feuilles de laurier.

Vous avez passé la marinade à l’étamine (et rejeté le bouquet garni, les oignons et le reste), vous la versez sur le lièvre et mouillez de vin rouge pour qu’il soit recouvert. Mettez sur un feu doux, la rondelle de fonte à sa place. Pour peu que quelques quartiers « attachent » sur un feu vif, le civet est « brûlé », irrémédiable catastrophe ! Surveillez donc de temps en temps et remuez à la cuillère de bois. Jamais d’ébullition à bouillons, seulement quelques grosses bulles qui montent à la surface et qui éclatent. Faites revenir le foie à la poêle et, quand il est bien tendre, mettez-le sur une assiette et écrasez-le avec le dos d’une fourchette, faites-en une purée que vous mélangez au sang. Au bout d’une heure, découvrez : cela embaume, versez le sang avec le foie, recouvrez vite. Puis faites griller des tranches de pain, qu’elles soient fort bien dorées et non brûlées.

Après une seconde heure de cuisson, le civet a sa couleur noir, café, ou chocolat. Vous goûtez, vous mettez autant qu’il faut sel et poivre du moulin. Si la sauce est courte, versez un verre de bouillon, et un peu de vinaigre ; si elle n’est pas assez épaisse, mettrez une ou deux cuillères de farine et mélangez, si elle n’est pas assez onctueuse, mettez une ou deux cuillerées de bonne huile d’olive. Puis incorporez le pain grillé. Enfin, avec une fourchette, piquez un membre du lièvre, et le mettez sur une assiette ; avec deux fourchettes essayez de détacher les chairs de l’os. Si elle résiste, encore un peu de cuisson à feu doux. Si elle se sépare facilement, la cuisson est terminée et retirez la cocotte au chaud sur un coin du fourneau et laissez mijoter une heure ou plus… Renouvelez l’expérience s’il le faut. Un quart d’heure avant de servir, ajouter un verre d’excellent vin vieux, un verre à Porto de Madère, un verre à liqueur de vieil Armagnac ou de vieille eau-de-vie fine et quelques tranches de citron.

Avec le civet, on boit un de ces délicieux crus des côtes ensoleillées de la « Petite Provence ». C’est la vallée de l’Isère, depuis le Grésivaudan jusqu’à l’entrée de la Maurienne, un Montmelian, un Arbin,… le Beaujolais ou le Bourgogne conviennent d’ailleurs aussi bien. Menthe et safran ne sont pas à rejeter, mais il faut s’en méfier, ces condiments sont envahissants ; or, aucun arome ne doit prédominer. Le civet de lièvre passe pour meilleur réchauffé ; c’est possible, d’ailleurs s’il est réussi, vous viderez le plat.

Dr Louis MORET, Saint-Germain-en-Laye.

RABLE DE LIÈVRE ROTI A LA CRÈME. L’ancien accompagnement obligé du lièvre était le vinaigre : « Et de tant loing que peust estre ouy, s’écria, disant Panurge, mon amy, vinaigre, vinaigre ! » (Pantagruel, l. II, ch. XXV). En effet, il était de coutume en Languedoc, entre les chasseurs, de se crier l’un à l’autre : Vinaigre ! dès qu’ils avaient tiré un lièvre, parce que la vraie sauce de cet animal est le vinaigre (Le Duchat). Quand votre râble de lièvre à la broche est cuit (ce qui se voit quand la fumée sort par jets), ayez une bonne jatte de crème fraîche et épaisse, assaisonnée de poivre et de sel et versez par cuillerées successives sur le rôti qui continue à tourner sur le feu. Cette crème s’unit dans la lèchefrite où elle tombe avec le jus provenant du lièvre et des lardons dont il est piqué ; reprenez-la avec la cuillère et continuez à arroser ainsi jusqu’à ce que cette sauce soit devenue légèrement brune et soit réduite à moitié. Ajoutez-y un filet de vinaigre, des échalotes hachées et des cornichons découpés. Cette méthode attendrit singulièrement le lièvre et lui forme un accompagnement parfait.

Dr Raymond HABAULT, Vierzon.

SANGLIER MORVANDELLE. 1° Marinade : Mettez mariner le quartier de gibier dans la marinade suivante : vin blanc, un ou deux litres ; vinaigre, un demi-verre ; thym, laurier, ail, poivre, sel, oignons et carottes coupés en rondelles, clous de girofle, muscade, épices, baies de genièvre, sauge, mélilot (une grosse pincée de chaque). En hiver laisser le sanglier une huitaine de jours en le retournant plusieurs fois. 2° Cuisson : Le sanglier ayant été suffisamment mariné comme il est dit ci-dessus, foncer une cocotte de quelques minces bardes de lard, avec tranches de carottes et d’oignons (on peut utiliser celles de la marinade, ces condiments ne devant pas être mangés). Faire légèrement roussir et y placer le sanglier. Mouiller avec une partie de la marinade. Ajouter un verre de madère et laisser cuire doucement, deux à trois heures, suivant l’importance ou l’âge de la bête. 3° La sauce : Une bonne demi-heure avant de servir, hacher finement deux ou trois échalotes et les faire revenir avec une cuillerée de farine et du beurre. Quand tout sera bistre clair, mouiller d’un peu d’eau chaude et d’un demi-verre de vin blanc ; y couper en tranches une tomate bien mûre et laisser cuire environ vingt minutes en remuant. Mélanger alors à ce roux une partie de la cuisson (plus ou moins importante selon la quantité de sauce que l’on désire). Ajouter une cuillerée de glace de viande, une bonne cuillerée à dessert de sucre pulvérisé et une pincée de poivre de Cayenne. Laisser mijoter cinq minutes en remuant. Goûter et rectifier s’il y a lieu… Passer et servir sur le gibier que l’on a tenu au chaud.

N. B. – Cette sauce doit être légèrement épaisse et moelleuse ; on peut la colorer ad libitum. En la goûtant, elle paraît légèrement acidulée, mais cette sensation disparaît presque tout de suite pour faire place à une saveur agréable et moelleuse obtenue par l’adjonction du sucre.

Dr Paul BIDAULT, Les Maillys (Côte-d’Or).

CUISSOT DE SANGLIER A L’ESTOUFFADE. Découper en morceaux un cuissot (2 kilos) et le laisser mariner quarante-huit heures dans : un litre de vin blanc, un demi-litre d’eau, quelques échalotes coupées, sel et poivre. Mettre dans le fond d’une terrine les morceaux de sanglier, recouverts de leur marinade, ajouter un bouquet garni, clore hermétiquement. Cuire à feu doux pendant quatre heures. Enlever le bouquet ; servir chaud.

Dr CAMBESSÉDES, Valleraugue.


SAUCES

SAUCE TOMATE SPÉCIALE (Recette diététique). Couper en quartiers des tomates bien mûres ; les mettre dans une casserole avec un demi-verre d’eau, une pincée de sel et une petite cuillerée de sucre. Faire partir à plein feu ; couvrir et laisser cuire quarante-cinq minutes en remuant souvent. Passer au chinois ou à la passoire fine. Remettre la purée dans la casserole et lier au dernier moment avec de la crème fraîche.

Dr CHUCHE, Paris.

SAUMURE PROVENÇALE. Placer dans un tonneau debout, mis par couches, des melets, d’une part, et de l’autre, du sel marin, poivre et aromates. On obtient ainsi une sauce, analogue à la pâte d’anchois dont les Anglais font grand usage et qui est le meilleur condiment pour les poissons. Le melet (Meletta mediterranea de Cuvier) est un petit poisson blanc avec une raie argentée sur le côté, qui se pêche sur la côte de l’ancienne Ligurie, de Saint-Raphaël, à San-Remo, où on l’appelle « poutignoun » (poutine).
                  
« E zou l’oli, zou la sausseto
« Sus la coucho de poutignouné. »
(du poète provençal, C. Poncy).

La melette méditerranéenne pourrait bien être la mæna ou mena, chantée par Ovide, que consommaient, salée, les classes pauvres de la société romaine. Mais la plupart des auteurs pensent que le melet servait à préparer le garum des Romans, le garon des Grecs. On peut affirmer qu’il existait deux sortes de préparations : une saumure pour les classes pauvres, une sauce pour les riches : Ausone (Epist. 21) : Garum : ubi significat, hoc liquamen hoc Latino vocabulo carere (nam garum græcum est), muriam autem minus apte dici ; hæc etiam minoris emebatur. Le garum est cette sauce (de poisson) dont le nom manque en latin (car c’est un mot grec), c’est bien moins justement qu’on l’appelle saumure ; cette dernière était, en effet, achetée par une foule de petites gens. Le garum était très coûteux (garum pretiosum malorum piscium saniem. Sénèque, Ep. 95, med.). Le garum piperatum était préparé avec des entrailles de poissons (sanies pretica de Manilius V-671), confites dans du vinaigre et de l’huile et assaisonnées de poivre et de fines herbes. Martial, dans ses épigrammes, parle du luxuriosum garum.

Dr L. SAINT-PIERRE, Montgeron.

AIOLI. D’abord, un avertissement : après une « séance d’aïli », quand vous quitterez la table pour un autre « climat », mâchez des feuilles de cerfeuil et de persil ; loin de vous être funestes, comme au perroquet, elles désodoriseront votre bouche. Sachez que, pour être invité « pour l’aïoli », à Toulon, par exemple, c’est s’asseoir à une table présentant au centre un large plat d’aïoli et, tout autour, d’autres plats, chargés de mets divers : escargots, morue bouillie, mostelles ou loups, coquillages, violets, pommes de terre en robe de chambre, carottes, et, suivant saison, légumes : asperges, haricots verts, artichauts, crus et cuits, tomates, etc. L’aïoli est donc une sorte de mayonnaise consistante, onctueuse que vous réussirez, j’imagine, selon cette recette : Pour six personnes : huile 200 grammes ; quatre gousses d’ail, écrasées au plus fin ; trois jaunes d’œufs montés comme pour la mayonnaise. Pas de sel ni de vinaigre ; jus de citron et versez l’huile tout doucement. Remuez au pilon sans arrêt jusqu’à consistance. Sont indiqués : vin de Cassis, vins du Rhône, Marc du pays, Sieste. Cure de silence.

Dr Louis CAMOUS, Nice.

AIOLI. Pour dix personnes : prendre douze gousses d’ail ; 600 grammes d’huile d’olive vierge, deux jaunes d’œufs, 10 grammes de gros sel, un demi-citron. Pilez en pâte fine les gousses d’ail et le sel dans un mortier, ajoutez, petit à petit les jaunes d’œufs, puis, doucement, l’huile d’olive comme si vous faisiez une mayonnaise. A Marseille même on est heureux quand le pilon tient debout au milieu du mortier. C’est dire que cette sauce doit être très consistante.

Dr FRANÇOIS, Marseille.

AIOLI A LA MARSEILLAISE. Deux têtes d’ail ; 300 grammes d’huile d’olive ; deux jaunes d’œufs crus ; mie de pain grillée, trempée dans le vinaigre ; sel, poivre. Faites griller devant le feu une tranche de pain de la grandeur d’une carte à jouer et de l’épaisseur d’un centimètre, puis la faire tremper dans du vinaigre. Épluchez les têtes d’ail ; pilez-les dans un mortier avec sel et poivre ; une fois réduites en pâte fine, verser l’huile, goutte à goutte en tournant toujours dans le même sens, sans discontinuer ; ajouter, par intervalles, les jaunes d’œufs et la mie de pain trempée. Il faut une heure et demie pour faire cette sauce (la mie de pain en morceaux de la dimension d’une noisette). L’aïoli doit ressembler à une crème ; être mœlleux, bien lié et d’un beau velouté.

Dr A. LOURTEAU, Toulouse.

SAUCE A L’AIL A LA PROVENÇALE. Coupez du maigre de jambon en petits filets, mettez-le dans une casserole sur le feu avec un peu d’huile, un oignon et une carotte coupés en tranches, les gousses de deux ou trois têtes d’ail. Faites revenir un moment, puis ajoutez un peu de farine et mouillez avec du jus ou du bouillon. Mettez un petit bouquet garni, une pincée de noix muscade, une de poivre blanc et faites cuire à petit feu. Passez avant de servir. Se sert avec le bouilli, le rôti de veau, le porc frais, la saucisse, etc.
                           
Dr A. LOURTEAU, Toulouse.


LÉGUMES ET FARINEUX



ARTICHAUTS BRAISÉS A LA PROVENÇALE. Parez vos artichauts en enlevant seulement quelques feuilles autour et en coupant le bout des autres. Mettez quelques cuillerées d’huile dans une casserole avec un oignon haché et deux carottes coupées en très petits dés, mettez les artichauts dessus, les feuilles tournées en haut, assaisonnez de sel et de poivre, arrosez d’huile, couvrez la casserole et faites partir sur le feu ; remuez de temps en temps. Lorsque l’oignon et les carottes commencent à roussir, mouillez-les avec un verre de vin blanc que vous faites réduire de moitié ; ajoutez deux gousses d’ail, quelques cuillerées d’eau et laissez cuire à couvert et à petit feu. Servez les artichauts en versant la sauce dessus. On peut encore enrichir le fonds de deux anchois ou avec des truffes, mais cela masque le fugitif parfum de l’artichaut exquis.

Dr Fernand CLÉMENT, Marseille.

ARTICHAUTS EN OMELETTE. Alexandre Dumas a raconté comment il apprit à faire l’omelette d’artichaut du cuisinier toulonnais Vecchi, dans la villa du docteur Cloquet : « Prenez, disait Vecchi, des artichauts de Carqueiranne, des moures di zati s’il est possible ; enlevez les plus grosses feuilles, coupez en tranches sur la longueur, émincez, faites sauter à l’aide d’une sauteuse dans deux ou trois onces d’huile de Dardennes, et dès que vos artichauts ont pris couleur, jetez-les dans les œufs que vous aurez battus, puis vous terminez votre omelette selon la manière habituelle ». Il paraît que Dumas se régala.

Dr FERNAND-CLÉMENT, Marseille

GRATIN DE FONDS D’ARTICHAUTS. Prenez de gros artichauts, parez les fonds en supprimant toutes les feuilles, le foin et toutes les parties vertes adhérent au fond. Trempez-les dans de l’eau acidulée avec du jus de citron, pour éviter le noircissement. Après quelques minutes de séjour dans cette eau acidulée, faites cuire les fonds à l’eau salée bouillante ; lorsqu’ils sont cuits, retirez-les, égouttez-les et émincez-les finement. Dans un plat allant au feu et pouvant être présenté à table, ordonnez une rangée de tranches de fonds que vous recouvrez de la composition suivante : Battez dans de la crème fraîche un œuf entier et ajoutez une demi-gousse d’ail finement hachée. Saupoudrez largement de fromage de gruyère râpé. Suivant la même technique, emplissez le plat de rangées successives, nappées de même à l’œuf et saupoudrées de fromage. Sur la dernière couche, doublez la dose de gruyère et répandez sur toute la surface de fins copeaux de beurre frais. Mettez au four doux, laissez cuire doucement ; il faut que le tout forme un ensemble parfaitement souple et mœlleux.                                                            

Dr Pierre BOURGIN, Soctang (Cochinchine)

AUBERGINES SAUTÉES.

                Prenez, pour apprêter ce plat,
                Huit aubergines bien ventrues
                Glacées dans de mauves appats,
                Toutes rondes et toutes dodues.

                Pelez ces belles, émincez-les,
                Et, pour qu’elles soient encore meilleures,
                D’une main juste, salez-les,
                Puis délaissez-les quelques heures.

                Après quoi, pour tarir leur onde,
                Essuyez-les bien. Tour à tour,
                Blondissez-les dans l’huile blonde,
                Placez-les sur le coin du four.

                Ail et persil, en un hachis
                Seront par vos soins mariés,
                Puis, prestement, semés en pluie
                Sur les aubergines étonnées.

                Amalgamez tout un instant.
                Versez dans un chaud légumier,
                Entourez d’un petit cordon tentant
                De petits champignons dorés.

Dr CHANOT, Attigny (Ardennes).

GATEAU D’AUBERGINES. Prendre quatre aubergines bien fermes, les éplucher, les couper en dés assez gros et les blanchir dans un peu d’eau salée. Après cuisson, les hacher finement avec un peu de persil et deux hectogrammes de jambon (mi-gras, mi-maigre). D’autre part, préparer avec 25 grammes de beurre, deux cuillerées à café de farine et un peu de lait, une béchamel très épaisse à laquelle on ajoutera quatre jaunes d’œufs, le hachis d’aubergines, 50 grammes de gruyère râpé et les quatre blancs montés en neige ; saler, poivrer, beurrer grassement un moule, y vider le mélange et mettre au four chaud jusqu’à ce que le gâteau soit bien doré. Démouler et servir chaud avec une couronne de sauce tomate.
                               
                                   Dr F. CONIL, Roquevaire (Bouches-du-Rhône).

GRATIN D’AUBERGINES. Couper des aubergines pelées ou des courgettes en tranches minces ; les frire à l’huile, saler à chaud ; en disposer une partie au fond d’un plat à gratin ; y verser une couche de béchamel assez épaisse, puis une couche de sauce tomate au beurre, liée à la farine et légèrement sucrée, une couche de fromage râpé et ainsi de suite. Gratiner à four moyen.

Dr André TACHERON, Pau.

BARBOUILLADE (OU RATATOUILLE). Je regrette de n’avoir pas à donner un nom plus pompeux à un mets excellent, connu en Provence sous des appellations encore moins convenables. C’est un mélange de tomates, d’aubergines et de poivrons qui exige une savante proportion sans laquelle il ne produit pas son effet. Je conseille, après expérience, d’employer par poids égal des aubergines pelées et des tomates épluchées et épépinées et, par moitié de leur poids total des poivrons doux, jaunes ou rouges, à défaut un quart de ce poids de poivrons verts frais et jeunes, avant que leur peau ait durci et soit devenue comme rigide et laquée. Ces légumes sont coupés par tronçons et non hachés, mis à bouillir après avoir rendu leur eau, puis mis à mijoter avec un bouquet garni, sel et poivre, cuits à l’huile de préférence, mais non baignés, de façon à les imbiber fortement. Les personnes qui n’aiment pas les mets de haut goût peuvent ajouter à ce mélange deux petites courgettes ou deux chayottes traitées comme les aubergines, ce qui adoucit le goût. On doit servir le tout, qui doit cuire longtemps, en pochant, par personne, un œuf frais sur la barbouillade.

Dr A. MAGNAN, Nice.

CARDON A LA BAGNA CALDA. A vrai dire la bagna calda est une sauce condiment d’origine italienne plutôt que provençale. Mais de cette sauce, on est très friand dans la région niçoise, et m’en étant bien souvent régalé chez un mien ami qui habite Menton, je pense bien faire en en donnant la recette. Cette sauce n’est pas exclusivement réservée aux cardons. On peut en accompagner d’autres légumes crus tels que céleris, artichauts nouveaux, fenouil, etc. Voici comment on la prépare chez mon ami : Dans une petite casserole mettez 100 grammes de beurre, 75 grammes d’huile, deux ou trois gousses d’ail détaillées en minces filets, quatre anchois déssalés, dont on aura enlevé les arêtes et une très faible pincée de sel. Cinq minutes avant de servir, faites chauffer cette composition sur le feu, en évitant de faire colorer l’ail qui doit rester très blanc. Mettez cette sauce dans une petite écuelle en métal et servez-la sur un réchaud. Alors – c’est le raffinement que l’on apporte à cette préparation – mettez dans la sauce de la truffe blanche détaillée en lames aussi minces que possible. En ce qui concerne le cardon, on le préparera ainsi : détailler le cardon (choisi bien blanc) en tronçons de 5 centimètres. Défilandrez avec soin les morceaux de cardon et mettez-les dans de l’eau fraîche acidulée de quelques gouttes de jus de citron.

Dr ARONVALD, Ézy.

CÈPES DES CÉVENNES FARCIS. Prendre de beaux cèpes jeunes, épluchés et bien lavés. Séparer les têtes. Faire frire celles-ci dans une poêle avec moitié beurre, moitié huile. Quand elles ont pris belle couleur, saler et poivrer légèrement et les mettre dans un plat allant au four. D’autre part, hacher avec les queues une tranche de jambon, de l’ail et du persil ; hacher très fin. Passer cette farce à la poêle, dans le jus où auront cuit les têtes. Garnir les champignons de cette farce, saupoudrer de chapelure, laisser gratiner. Servir chaud.

Dr CAMBESSÉDÈS, Valleraugue.

CÈPES A LA PROVENÇALE. Six cèpes de chataignier ; 5 centilitres de vin blanc ; 5 centilitres d’huile d’olive ; 10 grammes d’ail ; une échalotte, persil, sel, poivre. Nettoyer les champignons, retirer les pédoncules et les tubes du chapeau. Préparer un hachis des pédoncules, avec l’ail, l’échalote et le persil. Faire sauter le reste des champignons dix minutes à l’huile, ajouter le hachis, mouiller avec le vin blanc, saler, poivrer et laisser bouillir doucement pendant quinze à vingt minutes.

Dr L. SAINT-PIERRE, Montgeron.

CHOU FARCI A LA PROVENÇALE OU SOU-FASSUM. Blanchissez un gros chou vert. Rafraîchissez-le et égouttez-le. Détachez toutes les grandes feuilles du tour. Mettez ces feuilles, bien étalées, sur un filet. Sur ces feuilles, placez, en les mélangeant, les éléments suivants : les feuilles de l’intérieur du chou hachées et assaisonnées ; 250 grammes de feuilles de bette blanchies ; 200 grammes de lard maigre détaillé en dés et rissolé ; 100 grammes d’oignon haché fondu au beurre ; deux grosses tomates pelées, épépinées, concassées ; 100 grammes de riz blanchi ; 125 grammes de petits pois frais ; 750 grammes de chair à saucisses condimentée d’une pointe d’ail haché. Relevez les feuilles sur cette farce formée en boule. Fermez le filet en tirant les extrémités. Plongez le chou farci dans un pot-au-feu préparé avec du mouton. Cuisez à très légère ébullition, pendant trois heures et demie.

Nota. – On peut préparer le chou farci, en le garnissant avec tous les éléments de la farce préalablement mélangés ensemble. On peut aussi le cuire dans un pot-au-feu de bœuf au lieu de

Dre  J. MARTIN, Paris.

COURGETTES AU RIZOTTO GRATINÉES. La courgette est un excellent légume. En Provence, ce légume est très apprécié et les gourmands parisiens le dégustent avec plaisir. Voici une bonne manière pour le préparer. Il en est beaucoup d’autres. Aussi peut-on accommoder les courgettes grillées, frites à l’huile, sautées – à l’huile toujours – et condimentées à l’ail, en salade, à la grecque, ce qui donne un hors-d’œuvre délicat, etc., etc. Partagez les courgettes en deux, sur la longueur. Incisez circulairement la chair des moitiés de courgettes, sans entamer la peau. Saupoudrez-les de sel et placez-les, la partie à vif en dessous, sur un linge plié en deux, où elles rendront leur eau de végétation. Faites cuire les courgettes à l’huile. A l’aide d’une cuillère en argent, retirez la chair des moitiés de courgettes (en évitant de déchirer l’écorce). Hachez cette chair et ajoutez-la à un bon Rizotto (riz au fromage) que vous aurez préparé d’autre part. Ajoutez deux cuillerées de tomates pelées, hachées et cuites à l’huile, assaisonnées et condimentées, d’une gousse d’ail. Rangez les moitiés de courgettes dans un plat à gratin huilé. Saupoudrez-les de fromage râpé, arrosez-les d’un peu d’huile ; faites-les gratiner doucement au four.

Dsse M.-L. VOUAUX, Paris.

LE FARCEMENT SAVOYARD. Faire tremper une dizaine de bons pruneaux à l’eau pendant vingt-quatre heures. Ensuite râper une dizaine de pommes de terre de choix. Répartir les pruneaux trempés dans la masse. Faire un trou au milieu et y mettre un bon morceau de lard avec son rouge et son blanc. Mettre le tout dans un moule qui se ferme par un couvercle et faire cuire au bain-marie pendant cinq à six heures. Servir chaud sur un plat et découper en tranches.

Dr Élie ROUX, Saint-Gervais-les-Bains.

FENOUIL A L’ÉTOUFFÉE. Prendre des fenouils jeunes à tête bien blanche ; couper les têtes en deux ou en quatre, selon la grosseur. Mettre au feu dans une cocotte 60 grammes de beurre ; dès qu’il est un peu chaud, poser soigneusement les demis ou les quarts de fenouils ; fermer le couvercle et laisser mijoter à feu doux, en retournant les morceaux quand ils sont légèrement dorés. Une demi-heure de cuisson environ. Saler et poivrer au goût.

Dr NOEL, Paris.

LA FLÈQUE. Ce sont des pommes de terre que l’on coupe, selon leur grosseur comme des pièces de 1 ou de 5 francs. Elles sont mises au four avec une proportion d’eau variable selon leur qualité, dans un plat creux et recouvertes d’une tranche de lard pas trop gras (mescladis comme on dit dans le pays) qui fond peu à peu et les imprègne à mesure de la cuisson. On ajoute un peu, très peu, de sel et du poivre, deux à trois feuilles de laurier. La couche supérieure est rôtie, le dedans est moelleux et fondant. Ce plat, malgré son apparence, est d’une digestion facile, il demande au moins trois heures de cuisson, à petit feu.

Dr Henri SAUVEPLANE, Nîmes.

GNOCCHI. D’une part, faire trois verres de béchamel additionnée de sel, poivre et muscade et 75 grammes de fromage râpé. D’autre part, mettre dans une casserole un verre et demi de lait bouillant et 60 grammes de beurre. Retirer du feu ; ajouter, en tournant, 125 grammes de farine, sel, poivre, un peu de muscade, remettre sur le feu en tournant jusqu’à ce que la pâte se détache de la casserole. Laisser refroidir et ajouter un par un, trois œufs entiers. Prendre cette pâte par cuillerées et la jeter dans l’eau bouillante. Après quelques minutes de cuisson, égoutter les gnocchi, les ranger dans un plat à gratin, déjà garni d’une couche de béchamel ; recouvrir de béchamel, saupoudrer avec 75 grammes de fromage râpé et de quelques petits morceaux de beurre. Passer quelques minutes au four.

Dr André TACHERON, Pau.

GNOCCHI AUX POMMES DE TERRE (Recette diététique). Prendre environ un kilo de pommes de terre cuites à l’eau, à peine salée, pour environ 300 grammes de farine. Les éplucher, les passer finement, les mélanger à la farine et bien travailler à la main, pour faire une pâte souple ; en faire ensuite un rouleau que l’on découpe en morceaux de 5 centimètres environ, que l’on allonge en les calibrant à peu près de la grosseur d’un doigt ; ces morceaux sont eux-mêmes découpés en morceaux d’un centimètre et demi environ ; les passer à la fourchette pour leur donner la forme d’un escargot ; les faire cuire environ 5 minutes à l’eau bouillante un peu salée ; garnir avec du beurre. (Pas de fromage pour les dyspeptiques).

Dr FRANÇOIS, Marseille.

MACARONI A LA MODE CORSE

Faites cuire les macaronis à l’eau salée ; une fois cuits, retirez-les du feu et verser dans la casserole un peu d’eau froide pour arrêter la cuisson et les maintenir entiers. Faites-les égoutter. Prendre, poids pour poids autant de fromage râpé (gruyère et parmesan, par moitié). Vous aurez préparé, d’autre part, un bœuf à la mode selon les règles, avec un pied de veau et les accompagnements convenables pour avoir un bon jus. Dans un plat profond, allant au feu, ou mieux dans une casserole d’argent, mettez alternativement, un lit de macaroni, un lit de fromage et couvrez de jus. Recommencez ainsi plusieurs fois et tenez très chaud, sans faire cuire jusqu’au moment de servir.

Dr Raymond HABAULT, Vierzon.

RIZ A LA CRÉOLE. Jeter 250 grammes de riz bien lavé dans une casserole d’eau bouillante, salée à 20 grammes par litre. Laisser bouillir quinze à dix-sept minutes ; l’égoutter ; le rincer à l’eau froide jusqu’à ce que l’eau soit claire. L’éponger sur une serviette. Le mettre dans un grand plat avec sel fin et quelques petits cubes de beurre très frais. Le sécher à feu doux jusqu’à ce qu’il s’égrène sous les doigts sans coller.

Dr CHUCHE, Paris.

RIZ A LA SÉVILLANE. Dans trois cuillerées d’huile jeter : safran, brin de canelle, trois gousses d’ail, une cuillerée de persil haché, deux clous de girofle, une pincée de muscade râpée, un oignon haché. Ajouter trois tomates, trois blancs de poireaux, trois gros piments doux, trois fonds d’artichauts, le tout coupé en petits morceaux, une poignée de petits pois, pointes d’asperges vertes, etc. Saler, poivrer, laisser cuire. Jeter un bol de riz, sauter en remuant, couvrir de bouillon ou d’eau et jus de viande. Cuisson une heure environ.

Dr André TACHERON, Pau.

TARTELETTES DE LÉGUMES GRATINÉES. Faire cuire, à blanc, des tartelettes de pâte brisée, non sucrée (on peut aussi faire ce plat dans une grande tarte). Couvrir le fond d’une couche légère d’épinards cuits et passés. Disposer sur cette couche des légumes coupés en dés : carottes, navets, céleris-raves, fonds d’artichauts, haricots verts, petits pois, pointes d’asperges, selon la saison, cuits au préalable ; leur ajouter quelques dés de champignons et, à volonté, quelques lames de truffes. Parsemer de quelques petites noisettes de beurre. Recouvrir le tout d’une sauce Mornay (Béchamel épaisse additionnée de fromage de Gruyère râpé). Gratiner vivement au four chaud et servir aussitôt.

Dsse M.-L. VOUAUX, Paris.

SALADE CUITE (Recette diététique). Par personne : Chicorée, laitue, scarole ou pissenlit, 300 grammes ; Beurre (une noix), 15 grammes ; Sel de Vichy, une pincée ; Œuf, un ; Sel, une cuillerée à soupe. Éplucher la salade, laver à plusieurs reprises à grande eau ; cuire dans une bassine ouverte contenant 2 litres d’eau, le sel et le sel de Vichy, pendant trente minutes. Retirer les feuilles et les égoutter dès qu’elles cèdent sous le doigt. Hacher finement et passer, mélanger avec le beurre et le jaune d’œuf, ajouter ensuite le blanc battu en neige et cuire au four.

Dr LÉON-MEUNIER, Paris.


ENTREMETS, DESSERTS, PATISSERIES

CONFIT D’ANGÉLIQUE. Premier jour : Coupez les tiges d’angélique par morceaux d’un centimètre de longueur ; les mettre sur le feu dans de l’eau jusqu’au moment où l’on s’aperçoit que celle-ci va bouillir ; retirer du feu et laisser infuser quelque temps. Enlever l’épiderme et les plus grosses fibres. Remettre sur le feu, avec une nouvelle eau et faire bouillir jusqu’à ce que l’angélique soit blanche et facilement traversée par une tête d’épingle. Retirer du feu, égoutter. Faire cuire une quantité suffisante de sucre au petit lissé ; y jeter l’angélique et donner quelques bouillons. Deuxième jour : Le lendemain, séparer le sirop, le faire cuire à la nappe, y remettre l’angélique et faire bouillir quelques minutes. Troisième jour : Même opération. Quatrième jour : Faire cuire le sucre au grand perlé ; y jeter l’angélique et faire bouillir quelques minutes. Retirer du feu. Après douze heures on retire l’angélique, on la fait sécher à l’étuve et on la renferme.

Dr A. VALLET, Blida.

CRÈME GLACÉE (Recette diététique). Les préparations glacées ont une action vaso-constrictive qui peut jouer, non seulement un rôle dans les hémorragies stomacales, mais également comme freinateur de la sécrétion gastrique. Par personne : Lait, un demi-litre ; Jaunes d’œufs, trois ; Sucre, 50 grammes (deux morceaux) ; Crème, une cuillerée à soupe. Faire bouillir le lait avec le sucre, verser peu à peu sur les jaunes d’œufs, délayer le tout, remettre sur le feu et cuire jusqu’à consistance telle que la cuillère reste enduite de crème. Ajouter la crème fraîche à la préparation une fois refroidie. Faire prendre à la sorbetière.

Dr LÉON-MEUNIER, Paris.

GATEAU ALGÉRIEN. 250 grammes de dattes dont on enlèvera les noyaux (reste environ 210 grammes) et que l’on coupe finement. Mélanger avec : 210 grammes de sucre en poudre ;
110 grammes d’amandes mondées et hachées ; 100 grammes de cacahuètes finement hachées. Incorporer ce mélange à quatre blancs d’œufs fouettés en neige ferme. Mettre le tout dans un moule bien beurré et cuire à feu doux.

Dr Pierre UHRY, Neuilly-sur-Seine.

GATEAU AUX GAUDES D’ECHENON. Echenon est un petit pays situé sur l’Ouche, affluent de la Saône. On y cultive le maïs, dont les grains séchés d’une façon spéciale produisent les fameuses gaudes employées dans ce délicieux gâteau. 60 grammes de gaudes ou farine de maïs ; 125 grammes de farine de gruau ; 125 grammes de sucre en poudre ; 125 grammes de beurre frais. Faire fondre doucement le beurre dans une petite casserole ; d’autre part, mélanger la farine de maïs avec celle de gruau et le sucre en poudre. Versez-y le beurre fondu, mélangez le tout et le versez sur une plaque de tôle munie d’un cercle mobile ; étendez régulièrement dans ce moule la pâte, qui est un peu grumeleuse, aplatissez avec le dos d’une cuillère, que tout soit bien lisse et bien plat. Vingt minutes au four moyen. Surveillez ! Cela brûle facilement. Démoulez au sortir du four et coupez en tranches tout de suite, car ce gâteau durcit rapidement. Bon à servir avec le thé, chaud ou froid, selon le goût.

Dr GUICHARD, Saint-Jean-de-Losne.

GATEAU DE MARRONS DE L’ARDÈCHE. Prendre une livre de beaux marrons de l’Ardèche. Enlever la première peau. Faire bouillir dans de l’eau légèrement salée jusqu’à cuisson complète. Enlever la seconde peau. Piler finement au mortier ou passer au presse-purée. Faire bouillir d’autre part une petite tasse de lait avec un morceau de vanille et deux ou trois cuillerées à soupe de sucre en poudre. Mélanger ce lait sucré avec la purée de marrons. Laisser un peu refroidir. Ajouter un jaune d’œuf. Bien mélanger et incorporer le blanc monté en neige. Verser dans un moule préalablement enduit de caramel, puis graissé avec une petite noisette de beurre frais, afin que le gâteau se démoule plus facilement après cuisson. Faire cuire au four une demi-heure environ et s’assurer que la cuisson est complète à l’aide de la lame d’un couteau. Démouler. Arroser avec une cuillerée de rhum. Servir avec une crème à la vanille ou au chocolat.

Dr Hubert CLEU, Aubenas.

GELÉE D’AGAR-AGAR A LA VANILLE (Recette diététique). Faire bouillir un quart d’heure dans un litre de lait sucré, une cuillerée à soupe de paillettes d’agar-agar et un bâton et demi de vanille. Passer le tout au tamis fin. Le lait est pris en gelée au bout de trois heures environ.

Dr HAUTECHAUD, Fervacques (Calvados).

GELÉE DE NÈFLES (Recette diététique). Mettre des nèfles bien mûres dans une bassine d’eau froide, sans les éplucher. Faire cuire deux heures, jusqu’à ce que les fruits soient défaits. Égoutter et presser sur un tamis de crin. Le lendemain passer le jus qui s’est écoulé à travers une chausse de feutre ou de flanelle serrée et laisser le filtrage s’opérer lentement. Prendre autant de livres de sucre que de jus de fruits, mélanger dans une bassine, faire bouillir deux heures et mettre en pots. 15 livres de nèfles donnent environ 12 litres de gelée.
                               
Dr Pierre TISON, Le Cateau.

TOCINILLOS DEL CIELO (Petits cochons du ciel).

Deux tasses de sucre en poudre ; une tasse de farine de gruau ; trois œufs ; dix amandes amères pelées ; un demi-litre de lait froid ; un peu de sel. Verser la pâte dans de petits moules cylindriques (ou des coquetiers) huilés et cuire au bain-marie. (Recette baléare.)

Dr André TACHERON, Pau.


MENUS POUR DYSPEPTIQUES - INFUSIONS

UN MENU POUR DYSPEPTIQUE.

Bouillon maigre.

            Un bouillon maigre, mais extra,
            Trois cuillerées de tapioca,
            Deux jaunes d’œufs que l’on battra,
            Lorsqu’à table on s’installera.

Côtelette.

            La côtelette,
            Brune et coquette,
            Dont la fourchette
            Fait la conquête,
            Est vite prête.

Purée.

            La purée de pois onctueuse
            En plat de verre a mine heureuse !

Yaourt.

            Le yaourt est un entremets
            Pour le malade et le gourmet.

Compote.

            Compote de fruits, humble marmelade,
            C’est toi qui triomphe auprès des malades !
            Un biscuit croquant te rendra moins fade.

Conclusion.

            Je ne crois pas que ce repas
            Fatiguera votre estomac.
            P.S.  ̶  Biscottes grillées en place de pain
            Infusion comme boisson.

Dr CHANOT, Attigny (Ardennes).

MENU POUR DYSPEPTIQUE. Noques au parmesan ; filets de soles de Boulogne, sauce blanche ; volaille Excelsior (Fleur de la cuisine, p. 286) ; pommes de terre à la Duchesse (Ibid, p. 396) ; couronne de riz, avec compote de poire ; eau d’Évian (hélas !). Le même menu, un peu délayé.

            Tu n’oses te nourrir ? Ah ! la digestion !
            Au point de refuser toute invitation ?
            J’ai le profond souci de cette gastralgie,
            Et te veux convier cependant, sans magie,

            A déguster tous deux, simplement, en amis,
            Quelques plats savoureux et passés au tamis,
            Et si de l’apparat franchement, tu te moques,
            Un peu de parmesan, gratiné dans des noques.

            Puisque ton estomac ne doit souffrir en rien,
            D’une sole un filet, avec (comprends-moi bien,
            Son seul but : l’accompagner) épaisse sauce albine,
            Saura, pour le poulet, préparer ta babine.

            Pour éviter ton poing sur mon gaster ployé,
            Excelsior sera le seul mode employé,
            Pour te servir – à point – ce chapon de la Bresse,
            A manger lentement, vraiment rien ne te presse.

            Légume est nécessaire à qui veut digérer.
            Crois-moi, s’il est choisi, tu peux en ingérer.
            Essayons aujourd’hui la pomme à la Duchesse.
            Mais ton gosier, dis-tu, se plaint de sécheresse ?

            Aussi t’est-il permis, en cet instant précis,
            De boire ce qu’il te faut, mais pas plus d’un déci.
            Cela te suffira. Pour unique breuvage,
            Tu n’as droit qu’à de l’eau, la liqueur du sauvage.

            Connais-tu ce que Zeus à Evian cacha ?
            Tu donnes, n’est-ce pas – bien vrai – ta langue au chat ?
            Il y fit, pour ton bien, la boisson insipide,
            Exempte de tout sel, et sans gaz, et limpide.

            Puis, riz très onctueux, cuit au lait et sucré,
            Par un moule savant, fait un dôme sacré,
            Qu’humide de sirop surmonte dame poire.
            Demeurons rituel : le dessert après boire.

            Enfin le bon tilleul, en sa tiède infusion,
            Te dira que tu peux, sans nulle confusion,
            Pour bien parachever ce repas très digeste,
            Sur le divan couché, bavarder sans un geste.

Dr Gérard DESFARGES. Paris.

INFUSIONS. Verveine, tilleul : 20 grammes ; Cumin : 2 gr. 50 ; Feuilles de belladone. Une pincée pour une tasse.

Dr R. HAUTECHAUD, Fervacques.

INFUSION D’ORGE GERMÉE. Par personne : Orge germée et concassée, une cuillerée à soupe ; eau : 150 grammes, une tasse à thé. Mettre l’orge germée dans un pot avec une tasse à thé d’eau froide, porter au bain-marie bouillant pendant dix minutes (au bout de ce temps, l’eau de l’infusion ne dépasse pas 70°), température où le malt est détruit). Retirer du feu, passer et sucrer à volonté.

Dr LÉON-MEUNIER, Paris.

THÉ D’AMANDES. Casser 25 à 30 grammes d’amandes douces à coque dure. Mettre coquilles et noyaux dans trois quarts de litre d’eau ; faire bouillir lentement pour réduire à un demi-litre. Décanter, sucrer à volonté. Donne de bons résultats dans l’hyperchlorhydrie et l’ulcère. Cette préparation est très employée dans la région du sud-est (Savoie surtout) pour calmer les bronchites, trachéites, laryngites. Elle contient de l’huile d’amandes douces émulsionnée.

Dr VEYRAT, Lyon.

THÉ DE POMMES. Faire infuser une pommes de reinette coupée en tranches minces, bien essuyée mais non pelée dans deux à trois tasses d’eau bouillante. Sucrer à volonté. On peut, plus économiquement, préparer cette infusion avec les pelures et les poches à pépins de pommes utilisées pour une compote.

Dr GENTIL, Paris.

LIQUEUR D’ANGÉLIQUE. Pelures de tiges d’angélique raclées au couteau : 125 grammes par litre d’eau-de-vie. On les met infuser dans de l’eau-de-vie blanche. Au bout de cinq à six jours on ajoute 250 grammes de sucre par litre d’eau-de-vie. On met dans une bassine et on fait chauffer sans laisser bouillir. Quand le sucre est fondu, retirer du feu, laisser refroidir, passer au papier filtre avant de mettre en bouteilles. Très stomachique.

Dr Raymond HABAULT, Vierzon.




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